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Gazette des beaux-arts: la doyenne des revues d'art — 3. Pér. 3.1890

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Mantz, Paul: Watteau, 4
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https://doi.org/10.11588/diglit.24447#0031

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GAZETTE DES BEAUX-A11TS.

quoi et à quelle époque le tableau fut coupé en deux. En 1769, l’abbé
Guillaume en possédait un débris. Mais le roi de Prusse, qui avait
à Paris des émissaires intelligents et qui recherchait surtout les
œuvres françaises, parvint à acheter successivement les deux frag-
ments du tableau si sottement divisé, h’Enseigne reconstituée est
aujourd’hui à Berlin dans le salon rouge du vieux palais.

Ainsi qu’on le sait par l’estampe d’Aveline et par la copie
réduite de Pater qui a reparu en 1889 à la vente Secrétan, l'Enseigne
représente la galerie ou plutôt la boutique d’un marchand de
tableaux. Comme le dit la lettre de la gravure,

Watteau, dans cette enseigne, à la fleur de ses ans,

Des maistres de son art imite la manière.

Et ici, il cède, ainsi qu’il l’a fait tant de fois, aux souvenirs de ses
origines flamandes. En effet, sans être le moins du monde une
imitation, l’œuvre de Watteau a un lien de parenté avec l’idéal
dont se préoccupait David Teniers. Conservateur de la galerie de
l’archiduc Léopold-Guillaume d’Autriche, Teniers. s’est souvent
amusé à faire le portrait de la collection dont il avait la garde.
Il nous introduit dans un cabinet dont les murailles sont décorées
de tableaux anciens et il se plaît à les pasticher avec une prestesse
de pinceau et un esprit qui disent si bien le style et même l’exécution
des œuvres originales qu’on peut les reconnaître et les nommer.
Comme lui, Watteau a tapissé les parois de la boutique de son
marchand au moyen de tableaux, imitations ingénieuses des pein-
tures qui étaient peut-être chez Gersaint ou qu’il avait dessinées
quand il vivait à l’hôtel de Crozat. L’ensemble est infiniment
spirituel. Gersaint nous dit que, dans l’Enseigne, tout fut peint
d’après nature et en huit jours. Ce dernier détail donne une
heureuse idée de l’habileté de Watteau et de la certitude de sa
technique, car, dans, VEnseigne, rien ne sent la négligence. Si le
décor est parfait, les acteurs ne sont pas moins excellents. C’est une
scène prise sur le vif et notée par un pinceau qui ne se trompe pas.
On y voit des ouvriers en costume de travail occupés à emballer des
tableaux dans une caisse, des curieux qui visitent la boutique, en
un mot toute l’agitation d’un petit monde affairé et vivant. Je
croirais volontiers comme Gersaint que toutes ces figures ont été
étudiées d’après nature avec ce souci du geste vrai et de l’attitude
exacte qui est une des caractéristiques du génie de Watteau. Notre
 
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