Gazette des beaux-arts: la doyenne des revues d'art (3. Pér. 3.1890)

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GAZETTE DES BEAUX-AItTS.

médiocre, prêtée par sir Clare Ford, ni même entièrement le portrait en pied de
don Balthasar Carlos, debout en demi-armure, appliquée sur un riche costume,
quoique cette dernière toile provienne de la magnifique collection de Buckingham
Palace. Mais tout le reste est bien de l’illustre maître, quoiqu’il n’y ait rien dans
la série qui égale ses plus grands chefs-d’œuvre. Une grande page bien curieuse,
et même unique dans l’œuvre de Velasquez, est la Vénus avec Cupidon qui faisait
partie autrefois des collections de la couronne espagnole, mais qui orne mainte-
nant un château du Yorkshire appartenant à M. R. A. Morritt. C’est une belle
Andalouse, bien cambrée, qui, vue de dos, pose en Vénus, et contemple noncha-
lamment dans le miroir que soutient un robuste Cupidon, sa physionomie peu
idéale mais bien vivante. Les chairs sont rendues sans la transparence des Véni-
tiens, mais avec une force et une élasticité sans pareilles; tous les accessoires, les
draperies grises et blanches du lit de repos, le rideau d’un rouge pourpre, les
ailes de l’Amour accusent une maîtrise suprême qu'il serait difficile de qualifier
avec des mots. Cependant, ce que nous avons devant nous est une magnifique
étude peinte très simplement et avec une fidélité parfaite d’après un modèle et
avec les accessoires d’atelier, et pas autre chose. Velasquez n’a ni vu, ni senti
dans son sujet ce que Giorgione, le Titien, ou le Corrègc y auraient vu et senti; il
n’a pas su mettre dans son œuvre cette passion et celle grâce par lesquelles ces
grands Italiens corrigeaient ce que leur point de vue, en pareil cas, pouvait avoir
de trop sensuel et de trop terrestre.

Les autres toiles du maître sont : un portrait de l’Infant, Ballliazar Carlos, à
l’ùge de deux ansù peu prés, qui provient de Manchester Ilouse; le grand portrail
en pied de l'amiral Adrien Pulido Parcja,- prêté par le duc de Bedfond; les deux
grandes esquisses qui montrent, avec des fonds différents, don Ballliazar Carlos
apprenant l’équitation au manège royal, dont l'une est à sir Richard Wallace et
l'autre au duc de Westminster; et un portrail de femme, provenant de la collec-
tion du duc de Devonshire à Chiswick, qui parait être une élude préliminaire pour
la tète de la célèbre Femme à l'éventail que Sir Richard Wallace montra, il y a
deux ans, au même endroit.

Le duc de Sutherland et Lord Heylesbury ont envoyé de fort caractéristiques
Zurbaran, et Lord Rothschild se montre possesseur de deux œuvres célèbres de
Murillo : le Bon Pasteur cl une remarquable Madone avec l'Enfant, dont la tona-
lité étrange, dans laquelle prédominent le vert bouteille et le ronge ponceau, — est
bien celle de la seconde manière du peintre. Un portrail de Marianne d'Autriche
en veuve royale, par Juan Bautista del Mazo, montre ce que devint ce peintre après
la mort du chef d'école qu'il imita avec tant d'habileté.

De Rubens, il y a un magnifique morceau, qui est pourtant un tableau médio-
crement intéressant, — YHèrodiade qui fuit partie de la célèbre collection de Gastle
Howard; puis de Van Dyck deux magnifiques portraits provenant de Stafford
Ilouse : un Comte d’Arundel et un soi-disant Portrait d’artiste qui est, en toute pro-
babilité, celui d'un noble dilettante ou collectionneur, l'n des joyaux de l’exposition
est le magnifique Portrait du comte Jean de Nassau üillenburg, qui passe pour
être aussi un Van Dyck, et parait même comme tel dans le catalogue de Smith,
ainsi que dans celui qui est annexé îi la monographie de M. GuilTrey. On a voulu
prouver la justesse de l'attribution en alléguant que la grisaille de Munich, —