Universitätsbibliothek HeidelbergUniversitätsbibliothek Heidelberg
Metadaten

Gazette des beaux-arts: la doyenne des revues d'art — 3. Pér. 3.1890

DOI Heft:
Nr. 5
DOI Artikel:
Reinach, Salomon: La vénus de Milo
DOI Seite / Zitierlink: 
https://doi.org/10.11588/diglit.24447#0420

DWork-Logo
Überblick
loading ...
Faksimile
0.5
1 cm
facsimile
Vollansicht
OCR-Volltext
384

GAZETTE DES BEAUX-A11TS.

certainement pas négligé d’en dire un mot \ Si l’on s’est obstiné à
soutenir le contraire, c’est parce qu’il existe un dessin, fait au
Louvre en 1821, où la statue est placée sur un piédestal qui porte cette
inscription. Mais ce dessin ne peut être lui-même qu’une restitution
conjecturale; si la base inscrite s’était adaptée parfaitement à la
plinthe de la statue, elle aurait été mise en place avec elle et nous
la posséderions encore. Maintenant que l’original a été perdu ou
détruit, toute vérification est impossible, mais les apparences concor-
dent à nous persuader qu’il n’a jamais appartenu à la Vénus.

Je passe au second point : à quelle époque et par quel artiste
notre statue a-t-elle été sculptée?

Chacun sait que notre connaissance de l’art grec est encore très
fragmentaire, mais nous avons cependant, grâce surtout aux décou-
vertes de ce siècle, des points de repère absolument sûrs. L’histoire
politique nous apprend que Milo devint athénienne en 416 et le resta
jusqu’en 404; l’histoire de l’art nous permet d’affirmer que le style
de la Vénus de Milo est celui des sculptures attiques de la même
période, c’est-à-dire des élèves et des. successeurs de Phidias. Je sais
bien qu’il est aujourd’hui de mode en Allemagne d’attribuer la Vénus
à une époque beaucoup plus récente; mais, sans m’attarder à démêler
dans cette opinion un parti pris de dénigrement auquel nos chefs-
d’œuvre eux-mêmes n’échappent pas, je me contente de dire que
l’analogie de style, d’exécution, de sentiment, que l’on constate entre
la Vénus de Milo et les sculptures des frontons du Parthénon, suffit à
réfuter toute hypothèse qui placerait l’auteur de notre statue plus bas
que la première moitié du iv® siècle. Puis-je démontrer cela comme
un géomètre, qui prouve que les trois angles d’un triangle équiva-
lent ensemble à deux angles droits? Non, sans doute, mais la certitude
mathématique n’est heureusement pas la seule forme de la certitude.
Le goût a ses vérités, comme la raison et le cœur; ces vérités no
s’imposent pas à tous avec une égale évidence, mais elles ont cela de
commun qu’elles produisent en nous, à leur contact, un sentiment de
satisfaction et, si j’ose dire, de plénitude qui nous oblige à nous
incliner devant elles.

C’est là un point, du reste, sur lequel je me garderai d’insister;
je n’essayerai pas non plus de faire sentir la perfection d’un chef-
d’œuvre qui parle assez clairement et assez haut par lui-même. On

l. D’ürville signale bien une inscription, qu’il dit illisible, sur le piédestal d'un
hennés; mais la signature d'artiste rapportée parM. de Rivière étuit, au contraire*
parfaitement distincte.
 
Annotationen