Universitätsbibliothek HeidelbergUniversitätsbibliothek Heidelberg
Metadaten

Gazette des beaux-arts: la doyenne des revues d'art — 3. Pér. 3.1890

DOI Heft:
Nr. 5
DOI Artikel:
Courajod, Louis: Eugéne Piot et les objets d'art légués au musée du Louvre
DOI Seite / Zitierlink: 
https://doi.org/10.11588/diglit.24447#0437

DWork-Logo
Überblick
loading ...
Faksimile
0.5
1 cm
facsimile
Vollansicht
OCR-Volltext
400

GAZETTE DES BEAUX-ARTS.

moquer un peu. Ils ne voyaient là qu’un prétexte à théories scienti-
fiques, à gros livres ennuyeux. Ils s’en garaient de même qu’ils
s’étaient abstenus des monuments de l’antiquité depuis que ceux-ci
étaient entrés dans le domaine d’une science définie et comme s’ils
n’avaient pas continué à parler le langage universel. Le seul mot
d’archéologie leur faisait peur. Ils se méfiaient du moyen âge dont
les prétentions commençaient à s’afficher. Ils ne voulaient que du
bibelot inoffensif, amusant, sans tendances doctrinales. Ils prati-
quaient, en matière de curiosité, la devise de l’art pour l’art. Les
premiers succès scientifiques des grandes collections de curiosités
pures firent donc considérer les éléments de ces collections comme
exclusivement consacrés à l’usage des savants et comme incapa-
bles de procurer des jouissances à de simples possesseurs désin-
téressés sans arrière-pensées doctrinales. Les grands dilettantes
restaient toujours à apprivoiser. La persuasive prédication de Piot
verbo et opéra put seule les amener à la foi nouvelle.

D’un autre côté, nous ne pouvons pas oublier que des artistes
comme Wicar ‘ï comme Ingres 3, comme Gatteaux 3, que des amateurs
n’admettant pas d’autres collections que les collections d’art, comme
His de la Salle *, avaient ouvert leurs ateliers et leurs appartements
à des objets possédant à la fois le caractère de la curiosité et une
grande valeur esthétique. Mais la légèreté du goût public n’avait vu
là qu’un caprice personnel et n’avait pas su imiter le bon exemple.
En retard sur les artistes les plus doctrinaires', le dilettantisme
croyait sincèrement qu’en dehors de l’antique il n’y .avait réellement
pas d’art digne d’attention pour lui-mèine. Il ne prit jamais au sérieux
et ne voulut pas honorer d’un culte intime et convaincu les seuls élé-
ments de la curiosité qu’il consentait alors à exploiter.

Afin de démontrer que la curiosité, renfermée dans le cercle étroit
où je l’examine, n’a été pour les esprits les plus éclairés de la pre-
mière moitié de notre siècle qu’un ramas indigeste de choses hétéro-
gènes, je pourrais m’amuser à étaler l’incohérence d’un grand
nombre des collections do ce temps. Je me bornerai à évoquer le

\. Voyez le legs de Wicar au Musée de Lille en 1843, dont faisaient partie d'im-
portants monuments de la plastique italienne, comme la fameuse Télé de (lire et le
bas-relief de marbre de Donntello.

2. Collection d'Ingres nu Musée de Monlaubun.

3. Collection Gatteaux nu Musée du Louvre.

4. Les objets de curiosité donnés par M. His de la Salle ont été installés au
Louvre de son vivant dans la salle de Michel-Ange.
 
Annotationen