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Gazette des beaux-arts: la doyenne des revues d'art — 3. Pér. 3.1890

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Nr. 6
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Albert, Maurice: Le salon de 1890 aux Champs-Élysées, [1], Peinture
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https://doi.org/10.11588/diglit.24447#0503

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LE SALON DES CHAMPS-ELYSÉES.

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M. Chaplin, crème fouettée à la framboise, que le peintre nous offre
selon son habitude ; le rembranesque et intéressant portrait de
M. Franzini d’Issoncourt ; et je m’arrête un instant devant le
Printemps de M. Collin, étude tout à fait digne de ce délicat talent,
et qui tient à la fois du portrait et du paysage. Sur le fond vert
tendre des feuilles nouvelles se détache le visage rose d’une jeune
fille vêtue d’une très légère tunique bleu clair. On sent courir l’air
des bois dans ce petit cadre qui semble trop étroit, comme si l’ar-
tiste eût découpé ce carré de peinture au milieu d’un grand panneau
décoratif.

Paysage et portrait, tel est également le double caractère du
tableau, où M. Y. Lecomte nous montre de braves gens dinant Sous la
tonnelle, à la lueur un peu fantastique des lanternes vénitiennes.
L’artiste a évidemment recherché, et très habilement surmonté la
difficulté résultant de cet éclairage multicolore. Ajoutons que chaque
figure est traitée avec le même soin qu’un portrait, surtout le petit
profil de jeune fille, à gauche, qui s’enlève et se modèle en pleine
lumière avec une finesse extrême.

Ce sont de vrais paysans qu’a peints M. Buland dans son Baiser
des fiançailles, et cette idylle campagnarde n’a rien de fade. Les voilà
bien tels qu’ils sont, ces êtres primitifs, vieux militaires, vieux
marins, vieux laboureurs, avec leur gaucherie rustique, leurs visages
à la fois naïfs et flétris, leurs physionomies immobiles et comme
figées dans un sentiment unique, leurs corps déformés par de. rudes
travaux, et qu’on sent gênés dans leurs habits de cérémonie. Cela est
simple et vrai.

De la réalité nous passons à la fantaisie avec le grand tableau de
M. Lagarde, Le Blessé. Une forêt dénudée par l’hiver, avec, par-ci
par-là, des plaques bleuâtres représentant, je crois bien, de la neige ;
au milieu de la route, qui coupe cette forêt en biais, un âne arrêté,
sur lequel un homme vient de déposer un blessé : telle est la scène.
Serait-ce l’histoire du bon Samaritain? Mais, non ; ou, du moins, il
faudrait l’appeler le Bon lévite, car, ici, l’homme charitable et qui a
pitié, est, au rebours de la parabolë, un religieux : ce gros moine,
lui, n’a pas eu peur, comme le lévite et le sacrificateur. On sent qu’il
n’abandonnera pas son blessé avant de l’avoir remis en bonnes mains.
— Tout invraisemblable de couleur que soit ce paysage, il y règne
une harmonie de tons et un certain vague dans l’inachevé des for-
mes, qui a le charme des choses entrevues en rêve.

Il est toujours doux de retrouver M. Jules Breton. Il peut ne
 
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