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Gazette des beaux-arts: la doyenne des revues d'art — 3. Pér. 3.1890

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Nr. 6
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Mabilleau, Léopold: Le salon du Champ de Mars, [1]
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•483 GA;ZETTE DES BEAUX-ARTS.

peut-être que Delacroix dont la vision est plus violente que somp-
tueuse.

Le portrait de la « Dame en rouge », est une sorte de symphonie
monochrome où trois notes superposées, l’écarlate, le lie-de-vin et le
grenat, rivalisent de puissance pour donner aux yeux l’impression
de la richesse absolue. Celui de la « Dame en bleu ardoise», arrive
au même effet par l’opposition des glacis luisants et des cassures
nettes de la soie avec les tons chauds et moelleux de la peluche d’or.

La « Dame en gris » trahit au contraire un procédé d’un tout autre
ordre qui dénonce l’étonnante virtuosité du peintre : c’est un jeu de
colorations fines et nuancées où la pâleur nacrée du visage, le rose
du plastron et de la ceinture, le chamois clair des gants et le gris
argenté de la robe s’enlevant sur une tenture mate, forment une
délicieuse harmonie de teintes et de reflets.

Il serait d’ailleurs injuste de rie voir en M. Carolus Duran que le
décorateur magnifique de la beauté mondaine : il tient lui-même à
prévenir cette offensante méprise, et l’on n’a pas oublié son grand ta-
bleau de l’année dernière, Bacchus et les nymphes, où il s’était attaché
à faire chatoyer des nudités en pleine lumière. La tentative n’avait
pas paru décisive à tout le monde; mais, cette fois, il n’y a qu’une
voix pour déclarer que sa Lélia aux cheveux roux est un morceau de
maître.

Je préfère pourtant les parties nues de quelques-uns de ses por-
traits, — de la « Dame en rouge », par exemple, — où l’exécution
délicate des traits, l’exquise transparence des épaules, le modelé
souple du bras et de la main manifestent une entente fine et volup-
tueuse de la carnation vivante.

Enfin, M. Carolus Duran a voulu montrer ici une face encore
moins connue de son merveilleux talent. Le portrait du paysagiste
norvégien Thaulow, brossé en trois jours, nous permet d’apprécier
ses qualités d’improvisateur dans une œuvre franche et virile, qui
est faite pour décevoir la critique à préjugés. Le faire est rapide et
sommaire, mais d’une justesse et d’une décision dont l’Ecole fran-
çaise, enveloppée et apprêtée, s’est trop déshabituée. Il y a là quelque
chose de la facilité hardie et robuste d’un Rubens ou d’un Tintoret,
h qui il arrivait souvent ainsi de saisir au vol et d’esquisser une
physionomie qui leur avait plu.

Que ceux qu’impatientent parfois les fantaisies du mieux doué
de tous nos peintres, veuillent bien s’arrêter un moment devant
cette ébauche de chef-d’œuvre, et ils ne songeront plus à médire
 
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