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Gazette des beaux-arts: la doyenne des revues d'art — 3. Pér. 3.1890

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Nr. 6
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Fourcaud, Louis de: François Rude, 7
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https://doi.org/10.11588/diglit.24447#0553

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FRANÇOIS RUDE.

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ment, au sentiment de la possession suffisante? Mais si tout homme,
quelles que soient ses ressources, n’en a jamais assez à son gré, il
est évident que ce contentement ne dépend pas des richesses elles-
mêmes. Puis-je donc hésiter entre les deux partis à prendre? L’un
consiste à vouloir acquérir une immense fortune. C’est, en soi, très
difficile, je ne suis pas sûr d’y arriver, et je suis sûr que, si j’y
arrive, je n’en serai pas plus avancé puisque l’exemple de tous les
siècles m’apprend que, plus on a, plus on veut en avoir. L’autre parti
consiste à me trouver tout de suite assez riche. Cela en traîne infiniment
moins de tracas; cela ne dérange rien à ma vie, au contraire, et j’ai des
chances de bonheur, les exemples de modération dans la médiocrité
étant, sinon fréquents, du moins authentiques. Eh bien! j’en grossirai
le nombre, car le moyen m’a réussi, et je me trouve assez riche. S’il
me tombait un million aujourd’hui, je ne ferais demain ni plus ni
moins que ce que j’ai fait jusqu’à présent; il n’y aurait absolument
rien de changé dans ma vie et personne ne s’apercevrait de l’aubaine,
pas même moi. Il est vrai que cela me permettrait de soulager bien
des misères. Seulement je n’envisage la question qu’à un point de
vue personnel ‘. »

Exempt de convoitise, Rude ne connaît pas, non plus, la jalousie.
Si quelqu’un l’interroge sur les œuvres de ses confrères, il loue
abondamment ce qui lui parait louable et, touchant le reste, évite de
se prononcer. Le moment n’est pas encore venu où, par une évolu-
tion très humaine, blessé de certaines iniquités, il dépouillera sa
bienveillance voulue d’homme timide et dira ce qu’il pense crûment
Ce qui domine en lui, c’est la mémoire pieuse des services rendus et
l’attachement à ses amitiés éprouvées. Avec quel plaisir il parle du
vieux Devosge, auquel il doit tant et dont il a, d’entrainement,
sculpté le buste en marbre, d’après ses propres souvenirs et le por-
trait peint par Prudhon 3 ! Les bontés de Vivant Denon lui sont
toujours présentes. Et comment oublier l’indulgent et obligeant
Cartellier qui l’a soutenu toujours! Voilà, précisément, dans un
coin de l’atelier, une petite figure ébauchée, une jeune fille drapée
caressant un oiseau, d’un goût très classique, mais d’une très douce
expression, qu’il veut poser sur sa tombe3. Mon Dieu, que tout passe

t. Docteur M. Legrand : brochure déjà citée.

2. (le buste de François Devosge, exécuté par Rude en 1828, se trouve au
Musée de Dijon, ainsi que le portrait peint par Prudhon.

3. On peut voir celle allégorie de la Douceur au cimetière du Père-Lachaise,
où elle fait partie du monument élevé à Pierre Cartellier par scs élèves.
 
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