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Gazette des beaux-arts: la doyenne des revues d'art — 3. Pér. 3.1890

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Nr. 6
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Fourcaud, Louis de: François Rude, 7
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https://doi.org/10.11588/diglit.24447#0555

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FRANÇOIS RUDE.

511

sens fort et réjoui. Louis Dietsch l’intéresse en lui dévoilant les
émotions cachées dans la musique, surtout dans la musique sainte,
et, parfois, en lui jouant ses œuvres sur le piano où Mme Rude
s’essaye, à l’occasion, tant bien que mal. A ce groupe d’amis
s’adjoint, en 1838 *, Joseph Jacotot lui-même, revenant se fixer à
Paris pour la propagation de sa méthode et y élisant domicile, tout
justement, rue d’Enfer. Ce pédagogue aux façons visionnaires,
extraordinairement savant, possédé du démon de la mnémotechnie,
ne se peut heurter à aucune étude qu’il n’y veuille, immédiatement,
appliquer son système : il prétend l’adapter même à l’enseignement
du dessin et de la musique. Sa conversation fourmille, d’ailleurs,
d’aperçus curieux et d’anecdotes à retenir. Un nom, entre tous,
revient constamment sur ses lèvres : le nom de Gaspard Monge, le
grand Monge, un Bourguignon comme Rude et comme lui, et dont
il a été le collègue à l’Ecole polytechnique. Rude ne saurait entendre
exalter un homme sans s’efforcer de pénétrer dans le secret de son
génie. Et Jacotot d’évoquer le puissant mathématicien créant la
géométrie analytique, soumettant l’espace au géomètre, développant
des théories devant ses élèves, avec ces gestes imprévus, fuyants,
imitant l’évolution des corps qui lui étaient particuliers. Le sculpteur
a pu l’entrevoir, autrefois; il le voit apparaître, désormais, avec une
netteté si tranchante, qu’il pourra, un jour, modeler sa statue comme
d’après le vif. Au cours d’une de ces causeries, s’il faut en croire une
légende d’atelier, Jacotot aurait fait jaillir des idées pratiques du
grand calculateur, un corollaire précieux pour la sculpture. Les
mesures prises par à peu près égarent souvent l’artiste : il y aurait
tout avantage à procéder scientifiquement. A l’aide du compas et du
fil à plomb, on peut fixer avec certitude les proportions des figures,
leurs mouvements, leurs plans divers et la main du statuaire sera
d'autant plus libre qu’il se sentira plus assuré des données maté-
rielles de son travail. Ce principe de mensuration rigoureuse,
dont Rude s’est fait une loi et qui a été, plus tard, la base de son
enseignement, lui viendrait donc, indirectement, de Gaspard
Monge. Ainsi, dans la nature, les semences jetées au vent tom-
bent où le hasard les pousse et fructifient quand on s’y attend le
moins.

I. Je rectifie ici, d’après les correspondances que j’ai dans les mains, une
erreur en laquelle j’ëlais précédemment tombé. Jacotot a bien quitté la Belgique
en 1850, mais il a passé huit ans à Valenciennes avant d’arriver ù Paris, où il est
mort en 1810.
 
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