Universitätsbibliothek HeidelbergUniversitätsbibliothek Heidelberg
Metadaten

Gazette des beaux-arts: la doyenne des revues d'art — 3. Pér. 5.1891

DOI issue:
Nr. 1
DOI article:
Hymans, Henri: Pierre Breughel le Vieux, 3
DOI Page / Citation link:
https://doi.org/10.11588/diglit.24449#0038
Overview
Facsimile
0.5
1 cm
facsimile
Scroll
OCR fulltext
PIE R RE B II E U G11E L LE VIEUX.

31

étroitement à la tradition, d’une époque surtout où l’art flamand,
pénétré encore des influences du moyen âge, n’abandonne la naïveté
qui est sa force et sa poésie que pour perdre, au contact des formules
italiennes, la plus précieuse de ses facultés natives.

Le Musée de Stuttgart possède une œuvre très proche, du moins
par la conception générale, de celle que nous venons de décrire : une
Entrée du Christ à Jérusalem. Par malheur cette page a été si complète-
ment défigurée par des retouches qu’elle en est devenue méconnais-
sable. On ne peut plus la signaler que comme une ruine. Elle a dû
être exquise, d’un beau style et d’un puissant intérêt.

Il n’en reste aujourd’hui intactes que des parties du paysage,
qui est fort beau. Comme dimension, le tableau n’a jamais eu l’im-
portance du Portement de la croix.

Un des mieux connus d’entre les tableaux de Breughel est le
Massacre des Innocents. Outre un original au Belvédère, puis une copie
textuelle à Bruxelles et une variante à Hampton Court, on en voit
une dernière répétition chez M. Victor Le Roy, à Bruxelles. L’exem-
plaire de Vienne réclame seul des droits à l’authenticité. Encore
M. Woermann ne se prononce-t-il qu’avec réserve en faveur de
celle-ci. Le millésime, en partie coupé par le cadre, ne pourrait se
rapporter qu’à Breughel d’Enfer.

Van Mander, pour sa part, ne se contente pas de faire figurer le
Massacre des Innocents parmi les Breughel authentiques ; il lui consacre
un passage de son poème de la Peinture, honneur peu prodigué aux
œuvres flamandes.

Si l’exécution n’a pas toute la finesse que nous admirons ailleurs
chez le maître, il faut avouer que la composition est émouvante.

Bethléem — un village flamand, cela va de soi —, presque ense-
veli sous la neige, est investi par une troupe d’hommes d’armes. Ils
sont précédés d’un héraut chargé de proclamer l’édit d’Hérode,
ordonnant le massacre des derniers nés d’Israël. Une foule consternée
se précipite au-devant du funeste porte-parole pour implorer grâce.
L’ordre du souverain n’en sera pas moins exécuté dans toute son
horreur. Tandis qu’un gros de cavaliers, ayant à sa tête le grand
prévôt, rigide soldat à barbe blanche, faisant songer au duc d’Albe,
barre la place, quelques hommes descendus de cheval ont commencé
l’œuvre de destruction. Elle suit son cours avec une férocité con-
forme en tout au récit des scènes de meurtre qui, au moyen âge,
accompagnaient la prise de possession d’une localité par la troupe

ennemie.
 
Annotationen