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Gazette des beaux-arts: la doyenne des revues d'art — 3. Pér. 11.1894

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Nr. 2
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Hymans, Henri: Correspondance de Belgique: la vente Leys; la maison hanséatique d'Anvers; le musée de Bruxelles; lettres de Rubens
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https://doi.org/10.11588/diglit.24664#0180
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CORRESPONDANCE DE BELGIQUE.

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du Nouvel An en Flandre. Quantité d’autres œuvres avaient déjà donné un
grand relief à son nom à l'heure où apparurent ces pages fameuses. Il me suffira
de citer le Bourgmestre Six chez Rembrandt, supérieurement traduit en lithogra-
phie par Mouilleron.

Mais bien que l’artiste ait, en des manières successives, fourni la preuve de son
esprit curieux des choses d’autrefois avant de s’identifier merveilleusement avec le
xvie siècle, ce que sa vente a procuré l’occasion de connaître a donné quelque
mécompte à ceux qui y étaient venus avec l’espoir de trouver dans l’intimité des
études une personnalité égale, sinon supérieure, à celle des travaux accomplis.

Leys était tout, hormis un virtuose du pinceau, et, précisément à rebours d’un bon
nombre de ses confrères, donnait à ses œuvres parachevées la plus haute puissance
de réalisation dont il fût capable. En réalité, ses peintures valaient par l’expres-
sion, conséquence normale d’une donnée, par le caractère général qui en dictait
le choix. A ce compte, on s’explique assez que les portefeuilles du maître fussent
pauvres en études proprement dites, que surtout ces études eussent une valeur
plutôt subjective. Façades du vieil Anvers, intérieurs sans personnages, éléments
pittoresques que l’artiste adaptait ensuite aux compositions dont plusieurs devin-
rent célèbres.

Aussi était-il visible qu'au moment où, sous le pinceau du maître, naissaient
ces études, elles avaient leur destination précise et étaient conçues en consé-
quence. Henri de Brackeleer, le neveu de Leys et son élève, en qui s’était révélé
de bonne heure un tempérament extraordinairement proche de celui de son maître,
eut plus d’une fois pour mission d’aller recueillir pour lui le cadre de quelqu’une
des scènes attachantes qu’il avait rêvées et s’en tira merveilleusement. C’est ainsi
qu’une vue magistrale de la chambre de Luther, à WiLtemberg, a trouvé acquéreur
à la somme relativement considérable de six mille francs. (On a lu, dans la Chro-
nique des Arts du 30 décembre 1893, le prix d’adjudication des principales œuvres.)

Où, par exemple, la vente a révélé à la foule un Leys connu seulement de quelques
intimes, c’est dans divers portraits, celui du maître d’abord, ceux des membres
de sa famille ensuite. L’intérêt d’histoire y primait décidément tout autre. L’effigie
de Leys, en buste et de grandeur naturelle, avec cette inscription : Alon portrait à
51 ans, avait sa place marquée dans toutes les galeries qui se sont donné pour
âche de recueillir les portraits des grands artistes par eux-mêmes. Le Musée d’An-
vers auquel, en somme, il revenait de plein droit, n’est parvenu à se le faire
adjuger qu’au prix de 25,000 francs. Le pendant, le portrait de la femme du
peintre, n’a atteint que 600 francs! Mais, je le répète, en dehors de leur haute
valeur documentaire, ces images n’étaient pas des œuvres d’avant-plan. Au moment
où elles voyaient le jour, du reste, le portrait n’était pas, comme il l’a été depuis,
tenu pour le résumé, la plus haute expression des connaissances techniques d’un
peintre et, sous le pinceau de Leys, il n’y avait là qu’une interprétation dont le
grand caractère ne rachète pas à nos yeux l’absence de saveur et de vie.

Mais le point culminant de l’intérêt de la vente Leys était la fresque fameuse dont
l'artiste décora sa salle à manger, à la hauteur des frises. Avec ses personnages
un peu moins grands que nature, par sa conception, comme par son exécution,
c’était l’œuvre capitale de son pinceau. Certaines parties de cette fresque ont été
magistralement gravées par Bracquemond. Les lecteurs de la Gazette en connais-
sent de longue date le motif.
 
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