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Gazette des beaux-arts: la doyenne des revues d'art — 3. Per. 19.1898

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Nr. 2
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Renan, Ary: Théodore Chassériau et les peintures du Palais de la Cour des Comptes
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https://doi.org/10.11588/diglit.24683#0114

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THÉODORE CHASSÉRIAU

103

Une frise de Guerriers en grisaille, vus à mi-corps, soulignait
la Guerre, comme une frise de Vendangeurs soulignait la Paix voisine.
Ni l’une ni l'autre n’ont trop souffert du temps; et quel esprit,
quelle facile improvisation dans ces bordures animées !

Un panneau nous est arrivé dans un état de bonne conservation
singulière, grâce aux soins que M. A. Chassériau a pu prendre pour
le préserver des intempéries. L'Ordre et la Force, ces deux austères
figures virile et féminine, sont peut-être d’un galbe inférieur à tout
ce que nous venons de signaler, et on pourrait regretter que le
mieux conservé de tous ces fragments soit celui où la personnalité
de Chassériau fait à peu près défaut. Deux grandes esquisses libres
en grisaille nous restent justement pour le saluer une dernière fois
dans son don de grandeur immédiate. C’est, dans deux places sacri-
fiées du bas de l’escalier, ici un Guerrier détachant des chevaux liés
à des branches d’arbres, svelte et modelé comme un stuc antique ; là,
réunies dans un panneau, trois figures réfléchies que notre illustration
a dû séparer : Le Silence, La Méditation, L'Étude, la première debout ,
ses compagnes abandonnées sur un sol fleuri, tout à leur rêve. Si
l’on veut considérer la date, je doute qu’on trouve dans l’école de
peinture de l’époque trois créations empreintes d’un recueillement
aussi finement nuancé, aussi affranchies du poncif académique et
aussi suggestives à nos modernes esprits.

Quand on étudiera philosophiquement l’histoire de la peinture
murale en France, le milieu du xixe siècle paraîtra une époque
d’indigence et de vulgarité. Sauf Delacroix, qui agita toujours de
grands desseins et des images épiques, les peintres étaient alors
pauvres d’idées autant que de formes ; l’art officiel étouffait les
lloraisons spontanées et l’idéalisme supérieur qui vivifia notre esthé-
thique germait à peine en quelques âmes. On devra, croyons-nous,
tirer Chassériau de l’oubli pour trouver le premier poète qui, d’une
aurore caressante, ait éclairé les horizons nouveaux. Et, ce jour-là,
les humbles épaves sauvées en janvier 1898 des ruines du Palais de
la Cour des Comptes prendront rang parmi ces reliques de Fart que
les profanations ont encore anoblies.

A R y RENAN
 
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