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Gazette des beaux-arts: la doyenne des revues d'art — 3. Pér. 20.1898

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Nr. 6
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Michel, Émile: L' exposition Rembrandt à Amsterdam, [2]
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https://doi.org/10.11588/diglit.24684#0514

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GAZETTE DES BEAUX-ARTS

ments de son œuvre à l’aspect de l’ensemble qu’il obtient ce presti-
gieux eiïet de clair-obscur qui, plus encore que tous les autres
mérites de cet ouvrage, lui a valu, avec une réputation très légi-
time, le titre, assurément contestable, de chef-d’œuvre de Rem-
brandt. Dans les Syndics, en revanche, il convient de saluer un vrai
chef-d’œuvre, et non seulement du maître, mais de l’art tout en-
tier. Ici, plus d’incohérences, plus d’incertitudes. Avec une donnée
plus modeste, sans autres colorations que le blanc et le noir des
costumes, le rouge d’un tapis et le brun des boiseries, sans artifice
apparent dans l’arrangement des ligures pas plus que dans la répar-
tition de la lumière, l’artiste, tout en répondant aux convenances
intimes de son sujet, atteint la perfection. A une ressemblance indi-
viduelle irrécusable, il joint l’expression du caractère moral de
chacun des personnages, et, en face de ces cinq drapiers groupés
comme au hasard autour d’une table, on songe involontairement à
toutes les vertus qui ont fait la force de ce petit pays, à la dignité,
au courage opiniâtre d’une nation qui, n’occupant sur la carte qu’une
place minime, a su conquérir deux fois, sur la mer et sur l’Espagnol,
le sol qu’elle possède, et donner au monde l’exemple d’une grandeur
vraiment héroïque. Placée en belle lumière à l’Exposition d’Amster-
dam, la toile des Syndics apparaît supérieure encore à l’image
radieuse que chacun de nous a pu en conserver dans son souvenir.
On chercherait en vain à formuler sur elle quelque critique ; un
examen prolongé ne fait qu’accroître l’admiration. Loin de dégénérer
en virtuosité, le talent de l’artiste a su réunir et mettre au service
de l’expression bien des qualités qui s’excluent d’ordinaire ; avec
un merveilleux accord, elles concourent ici à la beauté de l’œuvre
et à son éloquente signification.

C’est aux environs de l’année 1661, date des Syndics, que Rem-
brandt a produit ses œuvres les mieux équilibrées et les plus accom-
plies. Toujours respectueux de la nature et en pleine possession de
de toutes les ressources de son art, il excelle à rendre, avec leur vie
et leur caractère propres, les scènes comme les types les plus
variés. Ici, c’est une de ces figures vénérables de vieilles qu’il
affectionna toujours, la Vieille à la cape (vers 1655, n° 93) avec ses
yeux baissés, absorbée par sa lecture, et, à deux pas de là, vous
êtes attiré par le joli visage d’un enfant, dans lequel on a cru long-
temps, bien à tort, reconnaître le portrait de Guillaume III, un bam-
bin au regard candide, à la bouche entr’ouverte, aux joues ver-
meilles (vers 1655, n° 95) ; un peu plus loin, c’est le Dr Tholincx, ce
 
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