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Gazette des beaux-arts: la doyenne des revues d'art — 3. Pér. 21.1899

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Nr. 3
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Rodrigues, Eugène: Un dessin de jeunesse d'Albert Dürer pour la "Sainte famille au Papillon"
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https://doi.org/10.11588/diglit.24685#0235

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GAZETTE DES BEAUX-ARTS

à peu près de même façon que sur la gravure. En revanche, saint
Joseph, au lieu de dormir, s’appuie sur un bâton, en regardant
Jésus. Ce croquis est moins poussé et moins complet que le nôtre.
La combinaison des deux a fourni au maîlre la composition défini-
tive qu’il a gravée.

Ces études préalables, si serrées et si variées, font tomber, une
fois de plus, la légende accréditée par Thausing (traduction de
M. Gruyer, p. loo), suivant laquelle Dürer se serait borné à copier,
dans la Sainte Famille au papillon, une gravure de Wolgemut.
Il se peut que M. W. Y. Ottley ait observé justement quelques
analogies avec une gravure du British Muséum, où le W avait été
gratté et remplacé par le monogramme de Martin Schœn, et sur
laquelle, au lieu d’une sauterelle ou papillon, on voyait un lézard.
Nous-même avons relevé, dans une pièce de Martin Schœn : La
Vierge assise sur un siège de gazon (Bartsch, 30), un banc de même
genre que celui qui figure dans le dessin qui nous occupe. Mais il n’en
reste pas moins certain que si Dürer n’a pu échapper au souvenir des
prédécesseurs dont l’œuvre l’avait impressionné, il a bien créé lui-
même, par un dessin personnel, la composition qu’il avait résolu de
reproduire sur le métal. Cette première constatation est d’une impor-
tance considérable, au point de vue de l’étude des débuts d’Albert
Dürer.

Une autre remarque non moins intéressante, c’est le progrès
énorme manifesté dans une partie de ce dessin sur ceux qui l’ont
précédé. Certes, quelques négligences impriment à l’Enfant une
allure un peu grimaçante, mais les mains des deux principaux per-
sonnages sont traitées avec une application magistrale.

Qu’une influence flamande ait affiné d’une certaine minauderie
le fuselage des doigts de la Vierge élevant l’œillet dont elle cherche
à distraire l’Enfant divin, nous ne le nions pas; mais l’élégance
incisive de la forme n’emprunte rien à autrui. Une distinction
supérieure parc la délicatesse du mouvement des phalanges, et la
pointe de coquetterie humaine se perd dans l’élévation du style.
Par un contraste savant, la main laborieuse du charpentier, soute-
nant sa tête lasse, rehausse encore la noblesse de celle de Marie.
Les callosités noueuses, marques des rudes besognes, la rugosité des
haies incessants, s’expriment par des traits méticuleusement justes
et larges malgré leur minutie. Jamais Dürer, dans des proportions
aussi réduites, ne poussera plus loin la recherche du caractère
d’un membre. Chacune de ces mains scelle son personnage, l’une,
 
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