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Gazette des beaux-arts: la doyenne des revues d'art — 3. Pér. 21.1899

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Nr. 6
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Desjardins, Paul: Les salons de 1899, 2, Peinture
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https://doi.org/10.11588/diglit.24685#0474

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432

GAZETTE DES BEAUX-ARTS

suggère la vie misérable. Le mérite rare de M. Cazin est qu’il n’a
nul parti pris dans la vision, nulle convention, nulle manière propre;
son choix des harmonies de couleurs est à chaque fois nouveau ; il
discerne les moindres nuances et il les rend sans les fausser, par
touches fondues et fraîches, avec toujours quelque imprévu. Il peint
comme Fromentin écrit, uniment, exquisement, sans idée de se faire
valoir L

Je n’oserais dire qu’il a fait école ; cela serait contradictoire, son
art n’étant point dans les procédés. Mais il est très vrai qu’il a
orienté la sensibilité de beaucoup de jeunes gens. J’ai déjà nommé
MM. Meslé et Griveau ; ils ont bien exprimé la langueur « du chien
et loup » dans les rues de village. Il faut ajouter M. de Moncourt
[Les Commères, L’Heure du salut), dont le tact n’est pas moins sûr ;
des quinconces au chevet d’une église, une place bordée déniaisons
de plâtre, aux boutiques badigeonnées, cela peut être encore harmo-
nieux ; et les chétives figures de trotte-menu qui circulent dans ce
décor trivial, d’autres s’en peuvent moquer, mais ce sont des cœurs
simples, et la paix est sur eux. Le soir surtout, le soir indulgent,
qui abaisse le ciel, s’harmonise avec ces vies étriquées, et alors
tout est bien.

Le soir gagne aussi les coteaux et les pâtis qui s’imbibent
d’humidité : M. Bouché, M. Baudouin, M. Cailliot peignent cette heure
solennelle. On entend le cricri vespéral bruire dans l’herbe. Et dans la
forêt, M. Chevalier nous allonge une voûte toute droite, coupant les
deux masses noires des arbres où la nuit s’accumule ; nous avons
l’impression d’être loin, d’ctre seuls, et cependant, au-dessus de nos
têtes, un pan de la coupole céleste montre ses astres connus et rassu-
rants. Cette toile fait partie d’une exposition où l’artiste a rendu des
aspects divers de la nature et l’on reconnaît d’autant mieux que rien
ne l’inspire comme

La descente sacrée et sombre de la nuit.

Au reste, j’avais noté même affinité chez les autres jeunes
artistes que j’ai nommés : quand ils reviennent aux impressions de
plein jour, une partie de leur sensibilité les quitte.

M. Jules Breton, dont la maîtrise est dès longtemps établie, s’est
inquiété aussi de donner place dans son œuvre de peintre rustique à
cette émotion de l’ombre, que les contemporains ressentent. Il a

1. Une salle à part est consacrée à une exposition de dessins de M. J.-G. Cazin.
Nous en reparlerons.
 
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