Gazette des beaux-arts: la doyenne des revues d'art (3. Pér. 34.1905)

UN PORTRAIT INÉDIT DE LA TOUR1

orsque, en 1837, Sainte-Beuve
vint à Lausanne faire son cours
sur Port-Royal, il s’enquit avec
curiosité de Mme de Charrière,
l’amie de Benjamin Constant,
l’autour de Caliste, morte en 1805 à
Colombier, près de Neuchâtel. Parmi
les Vaudois d’alors, plusieurspersonnes
étaient en mesure de le bien rensei-
gner. C’était le vieux jurisconsulte
Clavel de Brenles, âgé de soixante-
seize ans, un des derniers témoins de l’époque où le célèbre médecin
Tissot attirait des hôtes de tous pays sur ce beau rivage mis à la
mode par les descriptions de Rousseau et le séjour de Voltaire;
c’étaient M. et Mrae Juste Olivier, qui pouvaient l’instruire mieux
que personne des choses littéraires de leur pays ; c’était Eusèbe-Henri
Gaullieur, qui, par sa mère, amie intime de Mn,e de Charrière, avait
hérité de tous les papiers de celle-ci.

Rentré à Paris, Sainte-Beuve ne tarda pas à publier son charmant
« portrait » de Mme de Charrière, inséré dans la Revue des Deux
Mondes du 15 mars 1839. Puis, le 15 avril 1844, paraissait dans le
même recueil l’article Benjamin Constant et Mmc de Charrière, d’après
des lettres inédites dont Gaullieur possédait les originaux. L’année
suivante, Sainte-Beuve publiait chez Labitte une nouvelle édition
de Caliste ou Lettres écrites de Lausanne, avec une réimpression de
ses articles de la Revue.

1. Cet article est un fragment d’un ouvrage actuellement sous presse : Ume de
Charrière et ses amis.