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Gazette des beaux-arts: la doyenne des revues d'art — 3. Pér. 35.1906

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https://doi.org/10.11588/diglit.24817#0373

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GAZETTE DES BEAUX-ARTS

saute et de la plus vaste tradition, le gothique. Elle tombe, et avec elle tombe la
tradition, et la personnalité s’empare de la première place. Elle se volatilise dans
le plan, qui atteignit, enfin, dans notre art moderne et tout abstrait, sa plus haute
signification. » De ce développement nous pouvons suivre les étapes : la première
est l'àge des mosaïques, où « le plan n’existe pas encore pour la main de l’artiste;
il relève de l’ouvrier; seul le contour transmet la formule et la formule est ano-
nyme, elle n’est pas l’œuvre d’un individu, c’est la tradition qui la délivre». Le se-
cond et décisif moment fut le passage de la mosaïque à la fresque : « par là l’ar-
tiste devient lui-même décorateur : il se charge de l’exécution de ses idées, et
entre ses mains l’idée se transforma notablement ». C’est le moment de Giotto et
des fresques de la Madonna dell’ Arena, que M. Meier-Graefe considère comme
la « première en date des galeries de tableaux ». Puis, c’est la lutte séculaire
entre le Nord et le Midi, jusqu’à ce que la Renaissance triomphe du gothique : le
style de la Renaissance devient alors « le style européen ». « La lutte victorieuse
du plan contre la ligne se poursuit et s’accentue de plus en plus dans la peinture
nouvelle. Les Vénitiens, Rubens, Rembrandt, Velâzquez, en sont les glorieux
héros. Au xixesiècle cette tendance est poussée jusqu’à ses conséquences extrêmes
et le résultat en est indubitablement la plus essentielle conquête de notre art. »

Quels furent au xixe siècle les hommes qui, en assurant cette conquête,
créaient en quelque sorte l’art moderne pour le léguer à leurs successeurs plus
heureux? D’abord, et avant tous, Delacroix : « Cette force puissante était néces-
saire », dit M. Meier-Graefe, « pour abattre le classicisme qui menaçait de se spé-
cialiser dans le dessin. La peinture avait besoin de l’élan que Delacroix lui donna
pour parvenir jusqu’en ce siècle »; puisDaumier, dont l’action, tout en ayant l’air
de la contredire, complète celle de Delacroix; et c’est ici qu’il faut placer l’art
synthétique de Millet, dérivé en grande partie de Daumier et absolument étranger
au réalisme postérieur de la peinture française. L’influence de Millet n’en fut pas
moins considérable; il ne fonda pas d’école, mais contribua pour ainsi dire à
éveiller certaines personnalités un peu frustes, mais très fortes : Segautini, van
Gogh et Constantin Meunier. On ne saurait être assez reconnaissant à M. Meier-
Graefe de cette filiation, ni surtout des très belles pages qu’il a consacrées au
grand et étrange artiste que fut Vincent van Gogh.

Toutefois il ne s’agit là que d’un courant secondaire, et c’est ailleurs que
M. Meier-Graefe cherchera la direction véritable de l’art moderne. C'est dans les
œuvres de ces artistes qu’on a appelés « impressionnistes », en réunissant sous
une identique et vague formule les tempéraments les plus opposés, et qu’il préfère
avec raison désigner par le nom de « génération de 1870 ». La seconde partie de
son ouvrage est consacrée à ceux qu’il considère comme « les quatre colonnes de la
peinture moderne », c’est-à-dire Manet, Cézanne, Degas et Renoir. Delacroix et
Goya, tels sont les précurseurs directs de Manet et de ses contemporains : tous,
du moins à leurs débuts, subirent très fortement l’influence espagnole : « l'im-
portation de l’art espagnol », dit M. Meier-Graefe, « fut pour les arListes de 1870
quelque chose de semblable à ce qu’avait été pour ceux de 1830 l’introduction de
l’art hollandais. » Mais c’était chez eux instinct et non théorie; l’Espagne leur fut
alors ce que devint ensuite la vie contemporaine : un prétexte à peinture. Les
tableaux les plus caractéristiques de Manet ne sont-ils pas d’ailleurs antérieurs
au voyage d’Espagne?Etlanouveauté profonde, essentielle de son art, ne dépend de
 
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