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Gazette des beaux-arts: la doyenne des revues d'art — 3. Pér. 35.1906

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Nr. 5
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Jamot, Paul: Les salons de 1906, 1, La peinture à la Société nationale des Beaux-Arts
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https://doi.org/10.11588/diglit.24817#0391

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366

GAZETTE DES BEAUX-ARTS

production de M. Charles Guérin, dont les études sur nature
prouvent un sens très large et très juste du modelé. Je préfère in-
finiment sa face Cézanne à son côté Constantin Guys. Cependant la
Dame au boa, visage dur et fardé, qui est exposée ici avec une
Nature morte dont les mérites sérieux ne m’échappent pas, ne m’em-
pêche pas de regretter les deux charmantes et vivantes études de
jeunes filles que nous avons vues aux Indépendants.

La Société Nationale se devait à elle-même et devait à la mémoire
de son plus illustre fondateur d’accueillir le talent de celui qui est,
incontestablement et sans le moindre soupçon d’imitation, l’héritier
de Pu vis de Chavannes. Si le vieux, maître pouvait voir dans la
même salle l’immense et honorable Orphée de M. Auburtin, qui res-
semble à du Chavannes presque autant qu’une tapisserie au carton
original, et les Baigneuses, la Calypso, la Nausicaa, Y Heureux Verger
de M. Maurice Denis, il n’hésiterait pas, je crois, se désintéresserait
de l’un et sourirait aux autres. Je pense, en effet, que les dernières
résistances tomberont devant ces toiles charmantes. Nous y trouvons
un Denis qui a conservé la grâce d’imagination prime-sautière et de
jeunesse, l’invention des lignes et des mouvements, les dons de colo-
riste à la fois brillant et fin que nous avons goûtés dans ses premières
œuvres et qui s’est dépouillé des quelques gaucheries ou enfantillages,
d’ailleurs voulus, dont s’effrayèrent longtemps les sages, trop sages.

Ici, dans l’ombre chaude d’une grotte de rochers, près de la mer
étincelante et du sable brûlant, Nausicaa et ses compagnes sont
réunies après le bain et nous montrent leurs jeunes corps nus ou à
demi vêtus dans dès attitudes de vérité naïve et gracieuse; et, si
l’une d’entre elles, assise sur une grosse pierre, a un corset et semble
mettre ses bas, si une autre, en longue chemise, a sur la tête un
amusant petit chapeau qui n’est d’aucune époque, ces fantaisies que
je ne conseille à personne d’imiter, nous sont contées avec tant tle
naturel, elles sont si harmonieusement fondues avec le reste
qu’elles n’altèrent en rien l’impression d’idylle antique, mais
semblent seulement la rapprocher de nous, en prolongeant jusqu’à
nous la jeunesse du Monde et de l’Histoire. Ailleurs, c’est le paysage
lumineux, aérien, vivant, — bruyères, violettes et roches de por-
phyre dominant la mer bleue, — qui fait le lien entre nous et la
Fable, ce« figures qui sont à la fois très lointaines et de tous les
temps : Ulysse et Calypso. Dans Y Heureux Verger, dans les Bai-
gneuses, ce n’est plus un mythe qui a séduit le poète, c’est une
scène familière qui pourrait être de la réalité contemporaine; — ou
 
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