Universitätsbibliothek HeidelbergUniversitätsbibliothek Heidelberg
Metadaten

Gazette des beaux-arts: la doyenne des revues d'art — 3. Pér. 35.1906

DOI Heft:
Nr. 6
DOI Artikel:
Leprieur, Paul: La "Vénus au miroir" de Velazquez
DOI Seite / Zitierlink: 
https://doi.org/10.11588/diglit.24817#0492

DWork-Logo
Überblick
loading ...
Faksimile
0.5
1 cm
facsimile
Vollansicht
OCR-Volltext
462

GAZETTE DES BEAUX-ARTS

Godoy, prince de la Paix1. Ce dernier n’en profita pas longtemps,
d’ailleurs. A la suite de la confiscation et de la vente de ses biens,
la peinture fut acquise par M. Wallis, agent et représentant de
Buchanan, un des grands marchands de tableaux de l’époque, et
transportée en Angleterre, qu’elle ne devait plus désormais quitter.
W. Buchanan, dans son précieux livre sur les œuvres d’art impor-
tées ou vendues en Grande-Bretagne (Memoirs of Painting)2, dressant
la « liste des peintures des diverses écoles provenant des palais
royaux d’Espagne, notamment de PEscurial, du palais du roi à
Madrid et du palais du prince de la Paix (octobre 1813) », cite,
comme ayant appartenu successivement au duc d’Albe et au prince
de la Paix, la Vénus et Cupidon de Velâzquez (n°6), en même temps
qu’une célèbre Nymphe endormie de Titien (« The fanions Sleeping
Nymph of Titian », n° 5), ayant même origine et qui en était le
pendant. On voit facilement par là combien l’œuvre avait gardé de
renom. Les deux tableaux unis (« The pair ») sont estimés en-
semble 4 000 guinées, plus de 100 000 francs, somme considérable
pour l’époque; et il est dit en note que « le Velâzquez a été vendu
en Angleterre ».

C’est alors, en effet, que — sur les conseils du peintre sir Thomas
Lawrence, dit-on — la Vénus au miroir fut acquise par un amateur,
M. Morritt, à un prix notablement inférieur à l’estimation de Bucha-
nan, à savoir 500 livres (12 500 francs) : ce qui ne semble pas prouver
qu’elle ait été de vente facile en Angleterre. La pudeur britannique
s’en était sans doute alarmée. Par un curieux revirement, ce prix est
aujourd'hui presque centuplé. Une demi-obscurité et un certain
mystère l’enveloppent, dès lors, dans la lointaine collection de la
province anglaise où elle est entrée et où elle devait rester jusqu’à
ce jour, c’est-à-dire pendant près d’un siècle. A la gloire d’autrefois
succède un temps d’oubli. L’Exposition de Manchester, où elle figura
en 1857, parmi les trésors d’art amoncelés et venus de tous les coins
de l’Angleterre, ramène un moment l’attention sur elle et la fait
sortir de l’ombre, bien qu’avec un certain dédain on l’y eût reléguée
en des hauteurs tout à fait sacrifiées. Seuls quelques esprits clair-
voyants, précurseurs de l’opinion, comme Waagen et surtout Thoré-

1. Frédéric Quilliet, dans un catalogue manuscrit des tableaux du Prince de
la Paix, dressé le l01’ janvier 1808, et conservé aux Archives nationales de Madrid,
mentionne ainsi le tableau : « Vénus nue se mire, belle esquisse ». Cf. Beruete,
loc. cit., p. 11.

2. London, R. Ackermann, 1824, 2 vol. in-8. La mention est au tome II, p. 243,
au cours du chapitre intitulé « M1' Buchanan’s Importation from Spain ».
 
Annotationen