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Gazette des beaux-arts: la doyenne des revues d'art — 3. Pér. 35.1906

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Nr. 6
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Jamot, Paul: Les salons de 1906, 2, La peinture à la Société des Artistes Français
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https://doi.org/10.11588/diglit.24817#0518

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484

GAZETTE DES BEAUX-ARTS

la facture et les effets de couleur sont empruntés à M. Brangwyn,
c’est la personnalité, c’est l’émotion, Mais il faut, avouons-le, une
étonnante virtuosité pour fondre avec une pareille verve Benozzo
Gozzoli et M. Brangwyn. M. Hoffbauer hésite évidemment entre des
voies différentes. Veut-il être un peintre réaliste et raffiné de la vie
moderne ou un somptueux évocateur des temps révolus? Il semble
qu’il ne le sache pas lui-même. Mais il est assez jeune pour que
nous lui fassions crédit.

Quinet et Michelet reprenant possession de leurs cours en 1848 :
M. André Brouillet s’attaque à une époque infiniment plus rappro-
chée de nous, et l’on doit reconnaître dans son grand tableau un
effort pour vivifier une reconstitution historique exacte, ou préten-
due telle, par l’étude des types individuels, l’intérêt de la composi-
tion et l’ingénieuse répartition de la lumière. Mais, dans de tels
sujets, où le vrai forcément nous échappe, c’est cette chimère de
l’exactitude historique qui est le principal écueil de l’artiste. Car il
aura beau faire, jamais il ne pourra nous convaincre que les choses
se sont réellement passées telles qu’il nous les montre. Il fallait, au
contraire, renoncer de parti pris à toute précision dans les détails ;
il fallait, par des moyens analogues à ceux que Carrière a employés
dans son Théâtre de Belleville, tâcher de rendre les mouvements vio-
lents et confus d’une foule anonyme, soulevée par l’enthousiasme,
dans la clarté atténuée d’une salle close. C’est cela, et non pas une
réunion de portraits, que nous aurions vu nous-mêmes, si nous
avions pris part à une scène semblable : c’est cela qui était le véri-
table et magnifique sujet.

A défaut de Carrière, le beau tableau de M. Jules Adler, Au Soupe
des pauvres, nous enseigne comment un artiste ému par son sujet
peut réaliser à nos yeux, dans sa vérité profonde, une foule hu-
maine animée d’un sentiment unique. Le soir tombe sur une rue de
Paris que rien ne précise : une file compacte d’hommes et de femmes
haillonneux et dociles, maintenue sans peine par un sergent de ville
dont nous voyons seulement le dos, se presse contre un mur, atten-
dant patiemment la pitance promise. Avec d’heureuses simplifica-
tions qui ne laissent subsister que l’essentiel dans les physionomies
et dans les gestes, avec un parti pris de lumière qui, dans une tona-
lité générale assourdie, donne une rare puissance dramatique à des
notes isolées rouges ou vertes, M. Adler a trouvé le rythme simple
et expressif par lequel ces individus sont unis au point de former
comme un seul être. Et cette synthèse d’une humanité anonyme qui
 
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