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Gazette des beaux-arts: la doyenne des revues d'art — 3. Pér. 35.1906

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Nr. 6
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Guillot, Gaétan: Un dessous de l'atelier de Rigaud
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https://doi.org/10.11588/diglit.24817#0537

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GAZETTE DES BEAUX-ARTS

moindre différence. Au premier coup d’œil, il est impossible d’ccliap-
per à la tentation de conclure que les gravures du xviic siècle ont été
exécutées d’après le portrait déposé à Caen.

Mais un examen plus attentif révèle que la physionomie de ce
dernier diffère essentiellement de celle du grand seigneur dont Ede-
linck a voulu reproduire la ressemblance.

Les traits ne sont pas les mêmes. Villeroy a le nez droit et
charnu à son extrémité inférieure. Plus tard, sous l’influence de
l’âge, — l’iconographie du gouverneur de Louis XIV nous le fait
constater, — ce nez s’alourdira, et se changera en un gros nez,
empâté et disgracieux. Les yeux, Villeroy les avait ronds et à lleur
de tête, dépourvus de toute expression. C’est même le caractère
distinctif du visage. Les lèvres sont minces et pincées. La complexion
est celle d’un brun au teint coloré.

L’original du portrait de Caen est, au contraire, un blond, tout
l’indique. Il a les yeux gris, le teint clair, les lèvres charnues comme
il convient pour être aimable, mais sans aucun excès qui puisse les
faire qualifier de lourdeur. Le nez est long et droit, d’un beau dessin.
Le globe de l’œil s’enveloppe harmonieusement sous une paupière
de jolie proportion qui avive le regard.

La psychologie, telle qu’on peut la dégager des deux effigies,
dénonce deux individus de caractère opposé. Le Villeroy des gra-
vures est hautain et doit être ambitieux. Ses lèvres serrées contre
les dents indiquent un naturel personnel et fermé. Même dia-
gnostic à tirer de l’étude du regard, avec, en plus, une indication
de je ne sais quelle médiocrité intellectuelle chez le maréchal de
France.

L’inconnu de Caen, au contraire, séduit par son aspect ouvert
et bienveillant, sa joyeuse et accueillante physionomie d’homme
âgé bien conservé. Si le nez était plus busqué et le teint plus fleuri,
on pourrait penser au maréchal de Noailles.

Mais la figure de celui-ci est bien connue, et ce n’est assurément
pas lui qui a posé pour le portrait caennais.

Ajoutons que le bâton de commandement est dépourvu de fleurs
de lys, ce qui exclut l’idée d’un maréchal de France; l’âge ne cor-
respond pas du tout avec les dates que comporte Je curriculum
vitæ du duc de Villeroy.

Le tableau de Caen est de Rigaud, tout porte à le croire. La
facture assurée et consciencieuse, l’aspect général sont du grand
portraitiste, mais le modèle reste à trouver. Ce n’est ni le duc de
 
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