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Le Grelot: journal illustré, politique et satirique — 6.1876

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https://doi.org/10.11588/diglit.6811#0102
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LI GRELOT

LA SEMAINE

LA QUESTION D'ORIENT.

Une chambrée. Breguet, sergent au 250e de ligne,
lit majestueusement un journal, pendant que le
classique fusilier Pilou nettoie mélaneolique-
menl différentes buffleteries.

breguet, interrompant sa lecture.
Pitou !

pitou.

Sergent?

bkeguet.

Eh bien, et ces buffleteries, voyons?

pitou.

Voilà, sergent, voilà.

breguet.

Voilà, voilà I... vous dites toujours : Voilà t
et je ne remarque pas que ce qui constitua une
des plus belles parties du métier militaire ,
c'est-à-dire le nettoyage des buffleteries,
avance bien vite !

pitou, timide.

Je vas vous dire, sergent...

breguet, protecteur.
Dites, fusilier Pitou, dites!...

p1too.

Je suis comme qui dirait tout chose depuis
quelques jours, sergent.

breguet.

Le printemps, jeune homme... ou bien...
est-ce que vous ne trouverreriez pas l'ordi-
naire de la compagnie suffisant pour...

pitou.

Ah! faites excuse, sergent...

breguet, sévère.
On dit escuse, petit... du verbe escuser, es-
cusez-moi donc... que nous escuse sassions...

pitou.

Ah! pardon, sergent?...

breguet.

Il n'y a pas d'offense, petit... tout le monde
n'a pas été à même de recevoir de Vinduca-
tion... Je dis inducation... du verbe induquer...
j'induque, tainduques, \\induque...

pitou.

Ça suffit, sergent... Je ne l'oublierai pas...
Mais, pour revenir à ce que j'avais l'honneur
de vous communiquer, c'n'est pas tout ça qui
me chiffonne.

breguet.

Qu'est-ce donc alors, fusilier Pitou?

ïitou , baissant les yeux.
Il faut vous dire, sergent... que... j'ai...
une... bonne...

breguet.

Ohl c'est particulier!!... comme mon capi-
taine, alors!...

pitou, rougissant.
Une bonne... amie.

breguet.

Ah! ahl

pitou, vivement.
Oh! mais une petite... une toute petite, ser-
gent...

breguet.

La taille n'y fait rien, jeune homme !... En-
fin, n'importe... allez... Le devoir des supé-
rieurs est de regarder quelquefois d'un œil
indulgent les faiblesses de leurs subordon-
nés... surtout quand c'est Cupidon qui... Al-
lez, Pitou, allez !...

pitou.

Eh bien, sergent, ma bonne amie entend
depuis quelques jours sa maltresse qui dit à
son mari : Tenez, monsieur, vous êtes tou-
jours à me parler de votre question d'Orient
quand je vous demande de m'acheter une
robe; c'est insuppoitable^à la fini... hz.que.s-
tion d'Orient/... la question d'Orient/... Si en-
core je savais ce que c'est!... mais c'est que
je n'en sais rien... et vous ?

— Moi non plus, répond le mari, mais ça
ne fait rien... j'en parle comme tout le
monde... et puis ça permet de se donner un
petit air profondément malin... et... — Ma
robe!... monsieur, ma robe! —Jamais, ma-
dame !..; la question d'Orient s'y oppose I...
{Ici deux gi/fies. Pif !... pant... reçues par mon-
sieur, naturellement.)

Ma bonne-amie ne crut pas devoir en en-
tendre davantage, mais elle est femme, ser-
gent...

breguet.
Je l'espère pour vous, petit.

pitou.

Elle est curieuse, et m'a fait promettre hier
que je lui expliquerais ce soir cette fameuse
question...

breguet.

Dont vous ne savez pas le premier mot,

hein?... allons, avouez-le... avouez-le... il
n'y a pas d'offense, petit.

pitou, courbant la tête. -
Je l'avoue, sergent.

breguet.

Et vous avez compté sur moi pour vous
i l'expliquer, pas vrai?

pitou.

Si c'était un effet de votre bonté, sergent.
breguet.

J'y obtempère volontiers. Et moyennant un
joli petit verre de fine, ce soir à la soupe...
pitou, avec élan.
Vous en aurez deux, sergent,., je sais ce
qu'on doit aux supérieurs.

breguet.

Alors ouïssez, petit, ouïssez... du verbe
ouïr... j'ouïs, tu ouïs, il ouït...

pitou, se frappant le front.

C'est gravé là, sergent... {se flanquant un
coup de poing dans la poitrine), et là.

breguet.

Alors, attention... et fixel... Figurez-vous,
| petit, que vous auriez comme qui dirait un !
oncle à héritage, et que vous seriez deux cou-
sins qui guigneraient ledit héritage. L'onde,
allant de mal en pis, vous, )e cousin anglais,
vous vous dites: Sapristi! pourvu que le cou-
sin russe n'attrape pas le magot !... De l'autre
côté, le cousin rus;-e murmure à part lui :
Fichtre!... si l'oncle allait trépasser en lui
laissant son quibwl... Comprenez-vous?

pitou.

Parfaitement.

breguet.

Alors, pendant que le vieux tousse et cra-
che, le cousin John Bull montre les poings
au cousin Kosakoff en lui faisant comprendre
que si, par hasard, le vieux passait l'arme à
gauche aujourd'hui pour demain, il se dispo-
serait, lui, John Bull, à lui flanquer uns de
ces trépignéesl... Y êteS-Vous.

pitou.

Je vous crois !

breguet.

Pendant ce temps-là, la famille des deux
cousins, que toutes ces histoires embêtent
prodigieusement, marronne en a part : Ah ça
mais, ça ne finira donc jamais!... qu'ils se
cognent donc une bonne fois et que ça
finisse!... Vous saisissez?

pitou.

Je saisis.

breguet.

Eh bien, voilà cinquante ans que ça dure...
mais je crois que cette fois il y aura, comme
on dit, du vrai tabac...

pitou.

Ah! vous pensez que...

breguet.

Ça m'en a tout l'air, entre nous...

pitou.

Eh bien, et le vieux, sergent?

breguet.

Le vieux?... il fume sa pipe toute la jour-
née, boit sa demi-tasse et va voir les demoi-
selles... mais il aura beau faire, je ne donne-
rais pas cent sous de sa défroque. Voilà, fusi-
lier, ce que c'est que la question d'Orient...
Quand vous aurez expliqué ça à votre bonne-
amie, si elle n'est pas contente!...

pitou, se jetant dans les bras du sergent.

Vous n'êtes pas un sergent, tenez !... vous
êtes un père!...

breguet.

Je le présuppose... du verbe présupposer...
je présuppose, tu présupposes... il présuppose.

NICOLAS FLAMMÈCHE.

Le Groupe du Prince Napoléon

11 faut avouer que l'expression :

« Être reçu comme uh chien dans un jeu
de quilles, »

N'a jamais pu être appliqué plus justement
à personne qu'à ce malheureux prince dont
l'embompoint causerait, en Chine, des envies
aux mandarins les plus décorés de boutons
d'émeraude.

Les bonapartistes disent :

« C'est un traître. »

Les républicains disent :

« 11 a touché trop de millions pour ne pas
aimer l'empire. »

De sorte que les uns et les autres se le
renvoient comme un volant.

Dans cette situation, que l'aire î

Quelle va être l'attitude du prince Napoléon!

Je me le demande !

N'étant d'aucun groupe parlementaire,
comment pourra-t-il agir, et mener d'une
façon efticace le mandat d s Corses !

Ce problême est difficile à résoudre

Il y a cependant une solution :
En effet, le prince n'est pas un homme,
c'est un monde 1
Tantôt partisan de la République,
Tantôt pensionné de l'empereur,
Tantôt conservateur,
Tantôt libéral.

Il y a en lui plusieurs personnages qui ont
chacun leur rôle, qui parlent tantôt dans un
sens, tantôt dans un autre, — de sorte qu'il
joue à lui tout seul une comédie à laque! e
une demi-douzaine d'acteurs ne suffiraient
pas.

Eh bien ! c'est justement ce qu'il fallait en
présence de Tanimadversion que lui ont
témoignée les diverses réunions parlemen-
taires,

Car il est évident qu'il peut former un
groupe à lui tout seul.

De plus, comme il a un journal, il serait
bien aimable de nous faire connaître les déli-
bérations de ce groupe, et de nous donner des
comptes rendus de ses séances :

Par exempie, quand prochainement on
déposera une demande de poursuites contre
les hommes du Deux Décembre, il serait
curieux de savoir ce qui se passe dans le
groupe Napoléon, et quelle attitude il se déci-
dera à prendre :

Il faut poursuivre ces misérables, dira le
Napoléon républicain — Non du tout, respec-
tons cette cassette à laquelle nous devons nos
beefstenks, répondra le Napoléon bonapartis-
te.— Mais, répondra le premier, vous devez
cependant bien reconnaître que le Deux Dé-
cembre a été un crime! — Sans doute, répli-
quera le second, mais quelle recette ! voyons,
ayez un peu d'indulgence, car enfin, vous-
même...— Moi, monsieur, qu'est-ce à dire,
s'écriera l'autre...

Ma foi, je crois que les séances de ce groupe
composé d'un seul homme seraient bien inté-
ressantes.

ZED.

FEUILLES AU VEUT

Vendredi, 26 mai. — La Fontaine l'a dit il y
a longtemps :

Dieu prodigue ses biens
A ceux qui font vœu d'être siens.

Mais il paraît qu'il n'y a pas que Dieu,
Et que le ministre des cultes s'en charge
comme il faut, en ce qui 1<î regarde.

La discussion du budget de son départe-
ment vient de révéler, en effet, des choses cu-
rieuses,

Et qui, dans un pays libre, et où le mandat
de député n'est pas une simple formalité, se-
raient immédiatement soumises aux tribu-
naux.

*

Vcici, en effet, ce qui se passe dans l'Eure :
Un certain nombre de paroisses qui n'ont
pas de cures, — dans ce déparlement comme
dans bien d'autres, — sont desservies par des
prêtres séculiers qui viennent y officier,

Et qui, en échange de leurs petits services,
reçoivent des émoluments assez considéra-
bles,— le ministère ayant eu la précaution de
se faire adjuger à cet effet de respectables
crédits.

Ces desservants touchent des appointe-
ments à peu près triples de ceux qui sont at-
tribués aux instituteurs, en échange df- la
messe dont ils gratifient Je public une fois par
semaine.

Mais les arrangements ont été pris ainsi,
— et il n'y a rien à dire.

Du moment qu'ils les remplissent, il faut
payer les desservants, — c'est juste.

* *

Seulement, il paraît que dans l'Eure, les
choses ne vont pas ainsi ;

Et des députés de ce département sont ve-
nus, déclarer à la commission du budget des
cultes que les desservants de l'Eure ne tou-
chent rien du tout des cent mille francs qui
leur sont attribués par le budget.

*

Voici qui va bien,

Et on ne s'étonne pins que les cercles ca-
tholiques s'organisent avec tant d'activité et
fassent preuve de tant de ressources !

Avec l'énorme budget affecté aux oints, —
les Sociétés de la Sainte-Enfance et de la Pro-
pagation de la foi, — les revenus colossaux
des biens des communautés, qui s'accroissent
chaque jour par des captations de testaments
dont la Gazette des tribunaux ne raconte que,
les plus flagrantes; — avec les quêtes, les
dons, les mille et un tours de bâton,

Il est évident qu'on doit jouir d'une cer-
taine puissance,

Et que l'argent, —'ce nerf de la guerr», —
ne doit pas l'aire défaut.

| C'est là ce qui permet cette propagande
j scandaleuse et effrénée. — ces nuées de bro-
| chures stupides qui abêtissent l'âme du peu'
; pie, —ces envois multipliés de missionnaires
dans les campagnes, — ces prêches accomp3"
i gnés de distributions dans les casernes depe'
; tits livres de M. de Ségur et autres littéra-
] teurs de bénitier.


• *

Seulement, les contribuables peuvent tro«'
\ ver étrange qu'on dispose de leurs fonds pouf
subventionner de semblables pratiques,

Et qu'on paye des impôts sur tout ce qu'o"
peut rêver pour la plus grande joie de la gen1
cagoie.

Cent mille francs ne sont pas une petite
affaire;

Et, si l'on jette en prison un individu q»*
vole un pain chez un boulanger,

Je me demande la peine qu'on pent bief?
infliger à un particulier, quel qu'il soit, qul
se fait donner cent mille francs pour des ser-
vices qu'il ne rend pas.

Si l'on confiait à un entrepreneur une
somme de cette importance pour faire faire
des réparations à un monument public, ei
qu'il se bornât à les dépenser avec df s dan-
seuses de l'Opéra, ou à faire des ricochets
dans la Seine,

Je doute qu'on s'empressât de lui en con-
fier cent mille autres et de le proposer pour
la croix ;

*

* *

Samedi, 27 mai. — On est bien content 3
Carpentras,

Et on n'est pas moins joyeux à Brive-1»'
Gaillarde.

Non sans cause!

En effet, le sous-préfet de Carpentras., q«e
les habitants du pays ne pouvaient plus souf-
frir, vient d'être remplacé;

Et le sous-préfet de Brive-la-Gaillarde, qO'
avait tellement fait adorer son administration
qu'il n'eût pas osé sortir dans les rues, un*
lois la nuit tombée, de peur qu'on ne lui vi-
dât des pots de chambre sur la tête- _■

sous-préfet de Brive-la-Gaillarde vient, lu'
aussi, d'être enlevé à ses administrés.

0 bonheur!

0 joie !

Le sous-préfet de Brive-la-Gaillarde ira 3
Carpentras,

Et le sous-préfet de Carpentras ira *
Brivë*la,-Gai!larde;!j

Heureux hommes I

Felices nimium!...

Voilà les joyeux effets de cette administra-
tion que toute l'Europe nous envie:

Eh bien! là, entre nous, si (die nous l'en'
vie, il faut qu'elle ne soit pas fièie !

* *

Dimanche, 28 mai. — Le petit père Veuille'
n'est pas content.

Les affaires des ignorantins ne battent que
d'une aile.

M. Paul Bert vient de déposer une proposi-
tion demandant que,ceux-là seuls,puissent en'
seigner,qui savent quelque chose.

Et il est probable que, dans quelque temps<
quand on demandera aux gens qui voudroD1
se faire maître d'école :

— Mais, vous-même, savez-vous lire?
Ils seront obligés de répondre.

*

* *

C'est que depuis longtemps cela ne se pas-
sait pas ainsi.

Quand on disait à un de ces aimables frère5
dont nous avons trop fréquemment des nou-
velles par la Cour d'assises :

— Vous voulez vous consacrer à l'enseigne'
ment?... Mais que savez-vous!

Il avait le droit de vous montrer son froc,
Et de vous répondre :

— Voilà mon diplômel

En dépit du proverbe, l'habit faisait ls
moine.

a Savez-vous, monsieur, di-ait Sganarelle 3
Don Juan, après avoir endossé une robe de
médecin, que cet habit met en considération»
que je suis salué des gens que je rencontre'
et que l'on me vient consulter ainsi qu'un ha'
bile homme? »

En matière d'instruction publique, il en 3
été de même jusqu'à ce jour.

Des garçons qui n'avaient aucune science»
qui n'avaient fait aucune étude préparatoire»
et qui n'avaient souvent d'autre vocation qu6
celle que leur donnait la haine de l'état mi'i'
taire, endossaient la robe de bure,

Et par cela seul se trouvaient autorisés 3
enseigner!

Le froc les faisait savants.

Quoi d'étonnant à. cela!

* *

Aux siècles passés, quand un évêque goui"
mand voulait se payer la fantaisie de manger
sans péché du gibier un vendredi,

Il se faisait apporter un faisan, un lièvre o°
un perdreau,
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