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Le Journal d'Abou Naddara = Abū Naẓẓāra = The Man with the Glasses = garīdat abī naẓẓāra = The Journal of the Man with the Glasses = Journal Oriental Illustré — Paris, 1897

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Issue 1 (10.01.1897)
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https://doi.org/10.11588/diglit.56670#0003
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et clairvoyant ; il ne négligera rien qui puisse
contribuer à la prospérité et à la grandeur de
son Empire.
Le Français : Renseigne-nous sur lui et sur
ce qu’il a fait pendant ses vingt années de
règne. Nous connaissons ta Ipyauté et nous
croirons tout ce que tu nous diras.
L’Ottoman : Sa tâche est immense et il fau-
drait un volume pour la décrire. Songez qu’il a
trouvé l’Empire épuisé par une guerre terrible
qui avait ruiné ses finances, désorganisé son
armée et dévasté ses plus riches territoires.
Notre Sultan a reconstitué l’armée et la flotte,
rempli les coffres de l’Etat, repris le paiement
de la Dette, tout en diminuant les charges
énormes qui pesaient sur les populations. Il a
développé l’agriculture paj* la création dçs
Caisses agricoles, institution magifique qu’au-
cun Etat de l’Europe ne possède encore à ce

point ; il a établi des écoles d’agriculture à Hal-
Kalé, à Andrinople, à Salonique, dans toutes
les provinces. Il a donné un essor considérable
à l’industrie, en introduisant dans le pays des
manufactures de produits qui autrefois venaient
de l’étranger : lainages, soieries, bougies, al-
lumettes, tanneries, etc. Les quais de Constan-
tinople ont été construits: les ports de Bey-
routh, Smyrne, Salonique ont été améliorés ou
transformés Un magnifique réseau de voies
ferrées sillonne les contrées les plus impor-
tantes; telles sont les lignes de Haïdar-Pa-
cha à Angoora, de Cassaba à Kara-Hissar^
Eski-Elékir etKoniah, de Mondania à Brousse,
de Beyrouth à Damas, de Jaffa à Jérusalem,
de Constantinople à Salonique, de Salonique
à Monastir, etc.
En même temps, l’instruction publique a été
organisée sur tout le territoire : des écoles ruch-

dié et idadie donnent l’enseignmeent supérieur,
et l’éducation des filles a reçu une extension
toute nouvelle. De grands établissements scien-
tifiques, un institut antirabique, des labora-
toires de chimie, de microbiologie, de séricicul-
ture ont été créés et on y a appelé les spécialis-
tes les plus éminents de l’Europe. Il n’est pas
une œuvre de bienfaisance, à quelque culte
qu’elle appartienne, qui n’ait reçu des dons
généreux ae Sa Majesté, et notre Souverain
étend ses libéralités à toutes les religions, à
toutes les races, ainsi qu’on a pu le voir par la
fondation de ce magnifique Asile des pauvres,
une des plus grandes pensées de son règne.
Le Français et le Russe : Nous sommes
ravis de tout ce que tu viens de nous dire et
nous ne manquerons pas de le répéter à nos
compatriotes» Longue vie à ton glorieux
Sultan! Abou Napdara.

NOTRE VINGT-ET- UNIÈME ANNÉE
.Notre journal entre dans la troisième décade de son existence.
Fondé en 1877, il ne cessa durant cinq aimées consécutives de pro-
phétiser l’invasion britannique, ce qui valut l’exil à notre directeur, le
cheikh Abou Naddara.
Depuis 1882, date fatale, le Cheikh, « Pierre l’Ermite nilotique »,
comme nos confrères parisiens l’ont surnommé, ne se lasse pas de
plaider ici la sainte cause de sa patrie ravagée, selon son expression,
par les sauterelles rouges. Ainsi qu’on l’a vu l’année dernière, le
Cheikh est arrivé à faire quatre fois par mois des conférences ou des dis-
cours ; c’est un labeur immense pour un homme qui, depuis quarante
années est sur la brèche, et dont la vie a été si mouvementée. Ce qui
le soutient, c’est sa foi en Dieu, qui le sauva du poison, du poignard et
du revolver de ses implacables ennemis; sans cette foi inébranlable et
sans son amour ardent pour sa patrie, Abou Naddara aurait depuis
longtemps succombé; il y a pourtant denx choses qui l’encouragent;
d’abord, il voit sa devise favorite, cause de son exil, adoptée aujour-
d’hui par tous ses compatriotes : « l’Egypte aux Egyptiens », sous la
souveraineté de S. M. I. le Sultan et non sous colle de la reine Victoria.
En outre, les journaux français, sans distinction de couleur ou d’opi-
nion , le défendent contre les attaques des feuilles britanniques et de
celles inspirées par l’or anglais.
Nos lecteurs d’Orient et d’Occident voient que le Cheikh n’obéit â
aucune idée d’opinion systématique; l’énergie et la clairvoyance de
notre vaillant khédive Abbas Pacha, son dévouement à notre Auguste
Souverain et Calife, sont l’objet des hommages et des éloges d’Abou
Naddara. Nous sommes heureux de voir la presse égyptienne la
bonne presse, celle qui a échappé à l’oppression des intrigues britan-
niques — dire courageusement la vérité aux envahisseurs de la Vallée
du Nil. Les Anglais se vengent de ces légitimes réclamations en
condamnant les journalistes égyptiens à de ruineuses amendes et à un
emprisonnement inique; mais ces persécutions ne peuvent fermer la
bouche des journalistes patriotes; qu’ils comptent sur nous comme
nous comptons sur eux.
Quant à notre feuille, elle est la seule qui jouisse des honneurs de
l’interdiction en Egypte, ce qui ne l’empêche pas de passer et de circuler
dans toute la Vallée du Nil et du Soudan. C’est le fruit défendu! nous
dira-t-on. Soit! l’essentiel c’est qu’il soit savouré là-bas; de chaque
numéro de notre journal, plus de trois mille exemplaires pénètrent en
Egypte, sous le nez de la police anglaise, par des procédés qu’il est
inutile de divulguer.
Puisse notre vingt-et-unième année être d’un bon augure pour Abou
Naddara. Puisse-t-il y voir le couronnement de tous ses vœux et
l’affranchissement de sa patrie. Amen.
Hadjy El H’scèn.
DISCOURS ET INTERVIEW D’ABOU NADDARA
Le Cheikh a été aussi actif le mois dernier que le mois précédent.
Il a assisté à deux banquets, à celui que la Société des Africains a donné
en l’honneur de l’intrépide explorateur Hourst et ses compagnons, et
à celui de la Presse périodique. Au premier. Abou Naddara a présenté
ses hommages à S. E. M. Lebon, ministre des Colonies, et le remercia
au nom de ses amis d’Orient, de ce que la France fait pour la civili-
sation des peuples d’Afrique et d’Asie qu’elle protège. Il a remercié
aussi M. François Deloncle de tout ce qu’il fait en faveur de l’Egypte
opprimée. Quant au banquet de la Presse périodique, présidé par notre
excellent confrère et ami M. Mon voisin, nous allons donner la parole .
à notre vénéré maître J.-J. Roche, directeur des journaux d’arrondis-
sements, qui en fit un compte rendu succinct et éloquent dans son
numéro du 24 décembre dernier ; il dit : T â
« Lundi dernier a eu lieu au café du Centre, le dîner du Syndicat de la
Presse républicaine de Paris et de la banlieue. \ V
« Après l’allocution du président, le cheikh Abou Naddara a pris la parole
et bu à la France, l’amie de l’Egypte, et à la presse qui n’a jamais abandonné
la grande victime de l’Angleterre.
« Répondant à notre confrère Gaston Morin qui lui demandait ce qu’il
pensait de la déclaration d’abstention de l’Egypte a notre Exposition de 1900,
le Cheikh a répondu que ses compatriotes seront nombreux à Paris en 1900
et son pays largement représenté malgré les entraves des sauterelles rouges
qui ravagent les bords du Nil.
» Avant de se séparer, les assistants ont exprimé le vœu qu’un Comité
d’initiative, ayant à sa tête notre excellent ami Abou Naddara, soit constitué
à Paris pour favoriser la participation de l’Egypte à l’Exposition de 1900. »
Et maintenant voici son interview.
On lit dans le Matin du 25 décembre 1896 :
ABOU NADDARA ET. M. GRENIER
Ün rédacteur du Gaulois est allé demander au cheikh Abou Naddara ce qu’il
pensait de l’élection de M. Grenier.

— Son arrivée à la Chambre des députés aura, je crois, un grand reten-
tissement, non seulement en Algérie, mais dans tous les pays musulmans
où la France, je peux le dire, compte de réelles sympathies, et qu’on appelle
Addawla-el-Habiba, la.puissance amie. •>
Les « croyants » seront enchantés d’apprendre que parmi les représentants
de la France a il en est un qui s’est converti sincèrement à leur religion et
qui défendra à la tribune leurs droits et leurs intérêts moraux.
Vous me demandez maintenant ce que je pense de la partie de son pro-
gramme politique qui réclame pour les Arabes de l’Algérie la nationalisation
française. C’est là un sujet très délicat. A mon avis, les Arabes algériens
mériteraient la grande naturalisation.
Ce sont de vrais Français, puisque beaucoup d’entre eux ont versé leur
sang pour la France et qu’ils ont combattu côte à côte avec les soldats fran-
çais. Seulement, il faudrait trouver un terrain d’entente afin que cette natio-
nalisation n’apportât pas une entrave à leurs coutumes, à leur^ mœurs.
Il suffirait d’imiter çn cela les Anglais, qui ont laissé toute leur autonomie
aux Indiens sous leur domination...
Inutile de dire- que la presse parisienne et départementale a reproduit
dans ses journaux accrédités tout ce qui concerne Abou Naddara, dont
l’amour pour la France est universellement connu. La Réd.
UNE LETTRE DE M. L’ABBÉ LANUSSE
Aumônier de l’Ecole de Sainl-Cyr.
Un journal qu’il ne nous convient pas de nommer, à cru devoir con-
sacrer doux de ses numéros quotidiens à nous prodiguer les plus
insolentes attaqués et les plus venimeuses calomnies. Nous n’avons
aucune intention de répondre à ces misérables élucubrations, tissu
dfinvraisemblance, de basse méchanceté et de mauvais goût.
Mais, en présence de ces haineuses platitudes, il est consolant et
instructif de publier la lettre suivante que nous venons de recevoir
d’un homme de cœur, qui est aussi un homme de bien, un grand pa-
triote et une des illustrations du clergé'français.
Une telle lettre, venant d’un tel homme, est la meilleure réponse
qu’on puisse faire aux injures des sectaires et des envieux.
Saint-Cyr, le 29 novembre 1896.
Cher Monsieur Abou Naddara,
Voilà huit jours aujourd’hui et j’avais l’honneur de vous presser la main.
Mais aussk vous nous avez parlé de notre chère France avec tant de cœur,
avec l’expression d’une amitié si loyale! (1) Quelle attention à suivre vos
paroles si brûlantes ! Vous l’avez vu : on était suspendu à vos lèvres. Dans
mon admiration pour votre langage si applaudi, je vous ai embrassé aux
applaudissements encore de toute l’assistance.
Vous aimez la France, ma chère France adorée. Vous faites bien. Merci !
Oui, aimez-la. D’elle parlez toujours ainsi.
C’est le cœur de Dieu qui bat au sein de l’humanité !
Encore une fois, merci !
Vous avez réjoui tous vos auditeurs. Vous les avez rendus heureux. Vous
avez l’âme française. Votre cœur bat de nos battements.
Je vous désire toutes les bénédictions du Ciel pour vous et pour votre
* patrie.
Daignez agréer, avec l’expression de mes respectueux sentiments, l’honneur
que j’eprouve de vous tendre une loyale poignée de main.
E. Lanusse,
Aumônier de l’école de Saint-Cyr
Nous exprimerons notre profonde reconnaissance à réminent
Abbé, en donnant son intéressante biographie dans notre pro-
chain numéro. A. N.

(1) Ce fut à l’amphithéâtre de la Sorbonne, à la fête de la Société des
Sauveteurs du Dernier Adieu»
T '



Le Cheikh Abou Naddara souhaite une année heureuse et prospère à tous ses frères Français.
 
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