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Le Journal d'Abou Naddara = Abū Naẓẓāra = The Man with the Glasses = garīdat abī naẓẓāra = The Journal of the Man with the Glasses = Journal Oriental Illustré — Paris, 1898

DOI issue:
Issue 3 (25.03.1898)
DOI Page / Citation link:
https://doi.org/10.11588/diglit.56671#0012
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-Vingt-deuxième Année
FONDATEUR
Directeur et Rédacteur en Chef
J. SANDA ABOÜ NADDARA
6, Rne Geoffroy - Marie, PARIS

|Iaddar;i
Toute communication et demande d'abonnement doivent être adressées au Directeur du Journal

N°3 25 Mars 1868.
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Avec la revue Attawadod
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LES ANGLAIS FORTIFIENT LE CANAL DE SUEZ
Le Russe. — Bon Fellah, tu nous as priés de venir et nous sommes
accourus à ton appel ; mais je dois te prévenir que, pour le moment,
nous ne pouvons guère nous occuper de tes protestations contre les
envahisseurs Anglais. Nous avons de grosses difficultés avec ces mêmes
Anglais en Extrême-Orient, dans la Chine et aux frontières de l’Inde ;
c’est là que doivent porter nos efforts. Mais sois tranquille, en combat-
tant John Bull dans ces pays, nous travaillons du même coup à ton
indépendance.
Le Français. — De même, nous, en résistant aux prétentions de
l’Anglais dans la vallée du Niger. Il faut qu’il batte en retraite sur tous
les points où il s’est installé contre le droit des gens et c’est ainsi qu’il
sera amené à évacuer l’Egypte.
Le Fellah. — Merci de vos bonnes paroles, nobles amis. Mais ce n’est
pas de moi, c’est de vous qu’il s’agit aujourd’hui. Si je vous ai convoqués
ici, à Port-Sai’d, en présence de John Bull, c’est pour vous signaler le
grand danger que son audace vous prépare.
Le Russe. — De quoi s’agit-il donc ?
Le Fellah. — Vous savez que d’après la convention du 29 octo-
bre 189:, les grandes puissances se sont engagées à ne porter aucune
atteinte’au libre passage du canal, en temps de guerre comme en temps
de paix...
L’Allemand. — Parfaitement.
Le Fellah. — La convention porte même que les puissances “ récla-
meront la suppression de tout ouvrage ou la dispersion de tout rassem-
blement qui, sur l’une ou l’autre rive du canal, pourrait avoir pour but
ou pour effet de porter atteinte à la liberté et à l’entière sécurité de la
navigation. ”
L’Italien. — Je me rappelle cet article, et le paragraphe suivant ajoute
que “ l’érection de fortifications permanentes élevées contrairement à
ces dispositions demeure interdite.
Le Fellah. — Eh bien, chers amis, regardez donc un peu de ce
côté-ci.
Le Russe. — C’est Port-Saïd, l’entrée du canal.
Le Fellah. — Que voyez-vous ?
L’Allemand. — Je vois un mur.
John Bull. — Parbleu ! c’est un mur pour empêcher les eaux de la
mer d’envahir l’abattoir.
Le Fellah. — Mais regardez ce mur, comme il est construit.
L’Allemand. — Le fait est qu’il ressemble terriblement à un mur de
batterie.
John Bull. — Vous avez la berlue, c’est une digue, ce n’est pas
un fort. , , ...
Le Fellah. — C’est une digue avec des canons derrière : voici les
talus pour abriter les pièces.
Paris. Imp. Lsfbbvbb, 5 et 7, rae Claude-Vellefaux. Le Gerant : G. LEFEBVRE.

John Bull. — Ce Fellah divague.
Le Fellah. — Et là, en arrière du mur, qu’est-ce que cette cons-
truction ?
John Bull. — Ce bâtiment, c’est un dépôt de wisky.
L’Allemand. — Cela a plutôt l’air d’une caserne.
Le Fellah. — En effet, c’est une caserne pour l’artillerie.
L’Italien. — Mais alors, la convention est violée.
Le Français. — On se moque de nous.
Le Fellah. — Ce n’est pas tout : vous savez que la Compagnie
anglaise Allen Aider Son vient de racheter pour la misérable somme de
i5o,ooo livres sterling, la superbe flotte Kédiviale...
Le Russe. —En effet...
Le Fellah. — Plus le dock de Suez — plus le droit de bâtir un dock
à Alexandrie.
Le Français. — Nous avons appris ce tour de passe-passe.
Le Fellah. — Eh bien! John Bull a décidé de construire à Port-Saïd
le dock qui devait être installé à Alexandrie ; ce dock comprendra un
arsenal, un entrepôt de munitions, un port pour navires de guerre.
Pour cela, l’amirauté anglaise a acheté d’immenses terrains à l’entrée
du canal.
Le Russe. — Cette audace dépasse tout ce qu’on pouvait attendre !
Le Fellah. — Et comme l’Angleterre possède déjà un dock à Suez,
qu’elle va transformer en arsenal...
Le Français. — Eùe est maîtresse du canal...
L’Allemand. — Militairement !
John Bull. — N’écoutez donc pas ce drôle! Si je fortifie Port-Saïd et
Suez, c’est pour assurer la sécurité du canal.
Le Fellah. — C’est ainsi que tu as occupé la vallée du Nil, sous pré-
texte d’assurer la sécurité de l’Egypte. Tu voulais seulement rétablir
l’ordre dans notre pays. Maintenant tu as mis la main sur nos finances,
ainsi que tu le prouves en portant les clefs de notre trésor : tu as
accaparé nos terres, comme le démontrent ces actes de propriété, ou
plutôt de confiscation renfermés dans le sac que tu charries sur ton
dos. Voilà pourquoi tu refuses de quitter l’Egypte.
John Bull. — Jamais je n’abandonnerai la vallée du Nil. Je dois y
rester pour gérer mes immeubles...
Le Français. — Les immeubles que tu t’es appropriés illégalement !
John Bull. — Pour surveiller les grandes compagnies que j’ai
formées...
Le Russe. — Pour dépouiller le Fellah et tarir les sources de la
richesse publique.
John Bull. — Pour soutenir mes enfants qui se battent au Soudan
pour le rendre à l’Egypte.
L’Allemand. — Ce sont les Egyptiens que tu envoies au Soudan,
pour conquérir ces contrées où l’Angleterre veut s’installer.
Le Feliah. — C’est pour cela que John Bull recommence ses intri-
gues en Turquie contre notre glorieux souverain, S. M. 1. le Sultan. Il
T. S. V. P.
 
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