Vingt-troisième Année
FONDATEUR
Directeur et Rédacteur en Chef
J. SANÜA ABOD NADDARA
6, Rue Geoffroy - Marie, PARIS
Witrnal Ohm |laddara
Toute communication et demande d’abonnement doivent être adressées au Directeur du Journal
N° 9. — 25 Octobre 1899
ABONNEMENTS S
Avec la revue AMawadod
et suppléments.... i an. 26' »
Abonnement simple, i an. 15 »
| LA MORT DE MUNIR PACHA |
Le chagrin abat mon courage et la fermeté d’âme le relève; mes larmes, tour
à tour obéissantes et rebelles, cèdent au combat de ces deux affections
contraires. Abou’taybb-el-Motbnbbby.
Comment ne pleurerais-je pas cet illustre personnage, cet homme de
bien qui m’honorait d’une amitié si sincère ? N’est-ce pas lui, qui me fit
trouver grâce aux yeux de son Augustre Maître ? Dans les deux longues
audiences privées que S. M. I. le Sultan a daigné m’accorder en 1891 et
1897, ce ne furent pas mes humbles paroles qui m’attirèrent la haute
bienveillance du Souverain magnanime et généreux, mais ce fut la
traduction, ou pour mieux dire la version turque que ce Grand Maître
des Cérémonies et premier Drogman du Divan Impérial leur a donnée.
Oui, mon regretté Munir Pacha possédait toutes les finesses, toute la
beauté, toute l’élégance de la langue turque si douce et si expressive et
maniait le français avec un savoir et une habileté extraordinaires. C’est â
sa profonde connaissance de ces deux langues qu’il devait sa haute
situation à la Cour Impériale, et s’il fut toujours aimé, estimé et apprécié
par l’Auguste Calife de l’Islam, c’est à sa constante fidélité et à son
dévouement sincère qu’il devait ces faveurs Souveraines.
Revenez, revenez à mon esprit accablé par la douleur, ô souvenirs
consolateurs, et vous, mes larmes, coulez à flots pour soulager mon
cœur affligé et mon âme en deuil.
Je l’ai vu, pour la dernière fois, hélas ! le i3 juillet, le jour de mon
départ de Constantinople.
« C’est à votre intention, Cheikh, me dit -il en me serrant affectuesement
la main, que j’ai quitté aujourd’hui mon lit de souffrance et suis venu
au Palais. J’ai voulu vous voir avant votre départ, et peut-être pour la
dernière fois, car je suis plus malade qu’on ne le croit. »
Ces paroles m’avaient tellement ému que,pour me consoler, il ajouta :
« J’ai appris avec plaisir que vous avez été l’objet de la haute solli-
citude de Sa Majesté et que vous partez content. Notre Souverain vous
aime. Continuez donc à Lui être fidèle et dévoué. Adieu, Cheikh. »
Ah! ce furent les derniers accents que j’ai entendus de sa bouche bénie,
de cette bouche qui ne proférait que la vérité.
Il est donc mort, cet homme doué de vertus sublimes !
Non I Munir Pacha n’est pas mort. Il vit éternellement dans le cœur
de ses admirateurs sans nombre et son âme pure et sainte prie, au
séjour des Elus, pour la grandeur et le triomphe de S. M. I. le Sultan
et pour la prospérité de l’Empire Ottoman. Abou Naddara.
LA GUERRE CRIMINELLE DES ANGLAIS CONTRE LES VALEUREUX BOÉRS
John Bull. — Goddem ! Que faites-vous là,
les mains tendues et les yeux levés au ciel ?
Pour qui priez-vous?
Le Boër. — Pas pour vous qui les oppri-
mez; mais pour moi qui souffre comme eux.
Le Fellah. — Nous invoquons la protection
divine sur celui qui la mérite.
John Bull. — Ils prient donc pour moi,
car c’est toi, Boër, qui me déclare la guerre
en envahissant mon territoire.
Le Soudanais. — Pardon, Sidi Bull, le fils
du Transvaal t’a offert de régler le différend
qui vous divise par un arbitrage; mais toi,
voulant la guerre, tu as refusé avec hauteur.
L’Indien. — Les Boërs ont poussé la pa-
tience jusqu’aux dernières limites et au
détriment de leur intérêt et de leur sécurité.
Ils ont laissé le temps à ton gouvernement
de traîner en longueur d’hypocrites négocia-
tions et d’expédier, en attendant, des renforts.
Le Boër. — Merci, mes amis, je suis tou-
ché de vos sympathies pour moi.
John Bull (furieux). — C’est ainsi que vous
montrez votre fidélité envers moi, votre
Maître. Laissez-moi conquérir le Transvaal.
Le Fellah (l'interrompant). — Dont les
PMNS.IMf*. G. LEFEBVRE, 5 A 7. RUE CLAUDE VELLEFAUX,
mines d’or te tentent, et puis tu te vengeras
de nous.
Le Soudanais. — Mais les Boërs, il y a
vingt-deux ans, ont triomphé des troupes bri-
tanniques en trois rencontres consécutives.
John Bull. — Alors, je n’avais ni les
balles dum-düm, ni les mitrailleuses.
L’Indien. — Le bras de Dieu est plus puis-
sant que tes dum-dum et tes bombes bourrées
de dynamite. D’ailleurs les Boërs sont déci-
dés à résister jusqu’au dernier homme.
Le Boër (solennellement). — Nos deux
Républiques sont déterminées à ce que si
elles doivent tomber sous le choc de l’Angle-
terre, ce résultat soit atteint à un prix qui
ébranle le monde. Jamais l’humanité n’aura
rien vu de semblable.
Le Fellah. — Vive le Boër ! A bas John
Bull!
Le Boër. — Hélas ! Nous ne pourrons pas
lutter contre la Grande-Bretagne, cent fois
plus riche que nous en hommes et mille fois
en livres sterling. Mais notre défaite sera
couronnée de gloire, tandis que leur victoire
sera couverte de honte.
John Bull (épouvante). — Qu’entends-je ?
Le canon gronde.
Le Gérant, G. Lbfbbvrb.
Le Soudanais. — Ce sont les Boërs qui
viennent de faire sauter un train blindé con-
tenant armes et munitions.
L’Indien. — Ça commence mal pour nos
maîtres. Puissent-ils finir de même ?
John Bull (hors de lui). — Goddem ! Laissez
moi voler au secours des miens.
Le Boër (lui barrant le chemin). — Il ne faut
pas déranger nos enfants. Qu’ils se battent
en paix. Je te propose une partie de boxe. En
garde ! (Ils s’attaquent furieusement).
Le Fellah. — Bravo ! Boër. Tu te bats aussi
valeureusement que tes enfants. Tu as trouvé
ton homme, ô John Bull. Tes enfants aussi
reçoivent des coups formidables.
John Bull (criant). — Mon pauvre nez !
Mes dents malheureuses !
Le Boër. — Vous ne nous vaincrez pas si
facilement. Nous vendrons chèrement notre
vie. Notre écraseinent vous coûtera des mil-
liers de guerriers et des millions de guinées.
Le Fellah, le Soudanais et l’Indien.
Seigneur, Maître de l’Univers,
Accorde une grande victoire
A nos chers amis les Boërs
Et couvre leurs drapeaux de gloire !
Abou Naddara.
t. s. v. p.
FONDATEUR
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J. SANÜA ABOD NADDARA
6, Rue Geoffroy - Marie, PARIS
Witrnal Ohm |laddara
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ABONNEMENTS S
Avec la revue AMawadod
et suppléments.... i an. 26' »
Abonnement simple, i an. 15 »
| LA MORT DE MUNIR PACHA |
Le chagrin abat mon courage et la fermeté d’âme le relève; mes larmes, tour
à tour obéissantes et rebelles, cèdent au combat de ces deux affections
contraires. Abou’taybb-el-Motbnbbby.
Comment ne pleurerais-je pas cet illustre personnage, cet homme de
bien qui m’honorait d’une amitié si sincère ? N’est-ce pas lui, qui me fit
trouver grâce aux yeux de son Augustre Maître ? Dans les deux longues
audiences privées que S. M. I. le Sultan a daigné m’accorder en 1891 et
1897, ce ne furent pas mes humbles paroles qui m’attirèrent la haute
bienveillance du Souverain magnanime et généreux, mais ce fut la
traduction, ou pour mieux dire la version turque que ce Grand Maître
des Cérémonies et premier Drogman du Divan Impérial leur a donnée.
Oui, mon regretté Munir Pacha possédait toutes les finesses, toute la
beauté, toute l’élégance de la langue turque si douce et si expressive et
maniait le français avec un savoir et une habileté extraordinaires. C’est â
sa profonde connaissance de ces deux langues qu’il devait sa haute
situation à la Cour Impériale, et s’il fut toujours aimé, estimé et apprécié
par l’Auguste Calife de l’Islam, c’est à sa constante fidélité et à son
dévouement sincère qu’il devait ces faveurs Souveraines.
Revenez, revenez à mon esprit accablé par la douleur, ô souvenirs
consolateurs, et vous, mes larmes, coulez à flots pour soulager mon
cœur affligé et mon âme en deuil.
Je l’ai vu, pour la dernière fois, hélas ! le i3 juillet, le jour de mon
départ de Constantinople.
« C’est à votre intention, Cheikh, me dit -il en me serrant affectuesement
la main, que j’ai quitté aujourd’hui mon lit de souffrance et suis venu
au Palais. J’ai voulu vous voir avant votre départ, et peut-être pour la
dernière fois, car je suis plus malade qu’on ne le croit. »
Ces paroles m’avaient tellement ému que,pour me consoler, il ajouta :
« J’ai appris avec plaisir que vous avez été l’objet de la haute solli-
citude de Sa Majesté et que vous partez content. Notre Souverain vous
aime. Continuez donc à Lui être fidèle et dévoué. Adieu, Cheikh. »
Ah! ce furent les derniers accents que j’ai entendus de sa bouche bénie,
de cette bouche qui ne proférait que la vérité.
Il est donc mort, cet homme doué de vertus sublimes !
Non I Munir Pacha n’est pas mort. Il vit éternellement dans le cœur
de ses admirateurs sans nombre et son âme pure et sainte prie, au
séjour des Elus, pour la grandeur et le triomphe de S. M. I. le Sultan
et pour la prospérité de l’Empire Ottoman. Abou Naddara.
LA GUERRE CRIMINELLE DES ANGLAIS CONTRE LES VALEUREUX BOÉRS
John Bull. — Goddem ! Que faites-vous là,
les mains tendues et les yeux levés au ciel ?
Pour qui priez-vous?
Le Boër. — Pas pour vous qui les oppri-
mez; mais pour moi qui souffre comme eux.
Le Fellah. — Nous invoquons la protection
divine sur celui qui la mérite.
John Bull. — Ils prient donc pour moi,
car c’est toi, Boër, qui me déclare la guerre
en envahissant mon territoire.
Le Soudanais. — Pardon, Sidi Bull, le fils
du Transvaal t’a offert de régler le différend
qui vous divise par un arbitrage; mais toi,
voulant la guerre, tu as refusé avec hauteur.
L’Indien. — Les Boërs ont poussé la pa-
tience jusqu’aux dernières limites et au
détriment de leur intérêt et de leur sécurité.
Ils ont laissé le temps à ton gouvernement
de traîner en longueur d’hypocrites négocia-
tions et d’expédier, en attendant, des renforts.
Le Boër. — Merci, mes amis, je suis tou-
ché de vos sympathies pour moi.
John Bull (furieux). — C’est ainsi que vous
montrez votre fidélité envers moi, votre
Maître. Laissez-moi conquérir le Transvaal.
Le Fellah (l'interrompant). — Dont les
PMNS.IMf*. G. LEFEBVRE, 5 A 7. RUE CLAUDE VELLEFAUX,
mines d’or te tentent, et puis tu te vengeras
de nous.
Le Soudanais. — Mais les Boërs, il y a
vingt-deux ans, ont triomphé des troupes bri-
tanniques en trois rencontres consécutives.
John Bull. — Alors, je n’avais ni les
balles dum-düm, ni les mitrailleuses.
L’Indien. — Le bras de Dieu est plus puis-
sant que tes dum-dum et tes bombes bourrées
de dynamite. D’ailleurs les Boërs sont déci-
dés à résister jusqu’au dernier homme.
Le Boër (solennellement). — Nos deux
Républiques sont déterminées à ce que si
elles doivent tomber sous le choc de l’Angle-
terre, ce résultat soit atteint à un prix qui
ébranle le monde. Jamais l’humanité n’aura
rien vu de semblable.
Le Fellah. — Vive le Boër ! A bas John
Bull!
Le Boër. — Hélas ! Nous ne pourrons pas
lutter contre la Grande-Bretagne, cent fois
plus riche que nous en hommes et mille fois
en livres sterling. Mais notre défaite sera
couronnée de gloire, tandis que leur victoire
sera couverte de honte.
John Bull (épouvante). — Qu’entends-je ?
Le canon gronde.
Le Gérant, G. Lbfbbvrb.
Le Soudanais. — Ce sont les Boërs qui
viennent de faire sauter un train blindé con-
tenant armes et munitions.
L’Indien. — Ça commence mal pour nos
maîtres. Puissent-ils finir de même ?
John Bull (hors de lui). — Goddem ! Laissez
moi voler au secours des miens.
Le Boër (lui barrant le chemin). — Il ne faut
pas déranger nos enfants. Qu’ils se battent
en paix. Je te propose une partie de boxe. En
garde ! (Ils s’attaquent furieusement).
Le Fellah. — Bravo ! Boër. Tu te bats aussi
valeureusement que tes enfants. Tu as trouvé
ton homme, ô John Bull. Tes enfants aussi
reçoivent des coups formidables.
John Bull (criant). — Mon pauvre nez !
Mes dents malheureuses !
Le Boër. — Vous ne nous vaincrez pas si
facilement. Nous vendrons chèrement notre
vie. Notre écraseinent vous coûtera des mil-
liers de guerriers et des millions de guinées.
Le Fellah, le Soudanais et l’Indien.
Seigneur, Maître de l’Univers,
Accorde une grande victoire
A nos chers amis les Boërs
Et couvre leurs drapeaux de gloire !
Abou Naddara.
t. s. v. p.