Hisloire des Turcs,
i$yû tiroit vers le çap de Maille, Se ils craignoient que ce fust pour aller sur le chemin de Dont
r-~~-~ Iean.
S'estant doneques leué vn vent de Sirocqui leur estoit fauorable, ils se rendirent
*^ v * dans trois iours à Zante,où n'ayans trouué Do m Iean,comme ils esperoient, ains vn nou*
l'armé ucau commandement de îuy de paiîer à Cephalonie , il fallut laisfer là les gros vaisTcaux,
clncsiiene ce qui n'estoit pas sans grand danger : car Occhiali estoitfort prés de là , mais debonne
sç retire sâs fortune pour eux,il n'en eutaucune connoisTance : encorey en auoit-il des principaux de
ïienfâixe. Ayâtm£e Espagnole, qui disoient, qu'estanttrop difficile de les secourir , il falloit mander
qu'on les bruslast ; mais le General Foscaren fit bien mieux : car il enuoya le Prouidadeuc
Qrnrin auecques vingt-cinq galères pour les tirer hors de danger,&: les conduire, comme
il fit, sains Rentiers à l'armée, qui fut contrainte de partir de Cephalonie, pour venir à
Corfou, où Dom Iean estoit arnué le neufiesmeiour d'Aoust auec cinquante-cinq ga-
lères , tren te-trois nauires Se quinze mille hommes de pied, où il se plaignit aucunement
aux Généraux, de ce que sans auoir aucun resped, comme il disoit, à sa grandeur , on
J'auoit contraint d'attendre longuement à Corfou sans rien saire, Se cependant le bruit
estoit tout public en rarmée,qu'il estoit venu seulement pour vne certaine apparence i Se
non en intention ny charge d'exécuter chose aucune: Se de fait, ces soupçon's croilToient
deiouren iour, chacun voyant qu'après tant de dilayemens, on remetteit encore à se re-
soudre, quandle Duc deS elle seroitarriué auecques les galères d Espagne : mais comme
on eut respondu à Dom Iean que leurs forces estoientpîus que suifisàntes: car toutes en-
semble faisoient Ienombredecenc quatre-vingts quatorze galères Subtiles êc hmà ga»
leaces,dont les deux estoientau Duc de Florence,&: les six aux Vénitiens, outre ce qua-
rante-cinq nauires, à sçauoir trente Espagnoîes Se quinze Vénitiennes, ils vinrent aux
GomeniiTeSjOÙ on rangea le tout en ordonnance, comme sion eiist esté picstdcliurer le
combat,
Les trois Généraux estoient au milieu anec soixante-deux galères,le Marquis de sainte
Croix conduisoit la pointe droite , le Prouidadeur Superance la. gauche , à chacune cin»
tcurordre, quante-deux galeres-.Pierre Iustinian Général de Malteestoirà l'anant-garde auec iixga-
leacesjïean deCardone &Nicolas Donatàl'arriére-gardeauec vingt deux galeres-Dom.
Rodrigue de Mendozze & Atirian Bragadin commandoient aux nauires, en intention
ncantmoins de les mener ? Zante Se les y laisser, plustost pour le port des viures & muni-
tions,que pour seruir à la guerre. Enfin cette armée partit de Paxa l'vnziesme de Septem-
bre,sans auoir resolu iusques alors quelle voye ils deuoient tenir, ains de prendre le party
que les aduis qu'ils auroient de l'armée Turquesqueîeur pourroientconseilîer , laquelle
n'estoit pas pour lors en trop bon équipage : car elle auoit esté contrainte desediuiser Se
cle se retirer,vne partie à Modon Se l'autre à Nauarrin,ayant grande faute d nommes,plu-
iîeurss'en estans enfuis,& pîusieurs estoientmorts de mesaiserear on disoit que lanecessit©
qu'ils auoient de toutes choses, les fa isoit tenir là comme en vn lieu asîeuré, iusques à ce
qu'il leur fust venu du renfort, auec intention encore, à ce qu'on disoit, de se retirer à
Constantinople,& aller hyuerner dans le destroit,selon leur couftume,pensans auoir allez
fait de s'estre presentez par deux fois à l'armée Chrestienneprests à combatre, au moins
en apparence < cette retraite ne pouuant diminuer leur réputation , puis qu'elle se faisoit
lors qu'il ne falloir plus craindre que ceux de la Ligue fissent quelque entreprise de gran-
de importance.
les îon- Cela réjouit fort toute l'armée desConfedercz,esperans à cette fois qu'ils estoient tous
peschg^ref. assemblez,qu'ils auroient raison de leurs ennemis auparâuant leur retraite. Pour ce faire
fet ae l ar- les Capitaines disoien t qu'on deuoit marcher tout à l'heure, Se se tirans hors de l'Isse de
stienn? e" Zante pour n'estre découuerts en aucun lieu,allersoudainseietter dans l'Isse deSapien-
ce,qui estvn écueil entre Nauarrin& Modon,Se leur clorrele pastage, à ce qu'ils nepeus-
sent se secourir l'vn l'autre : mais le bon-heur de ce succez dependoit delà diligence ,
qu'on ne connoifloit point en cette armée,si bien qu'ils furent si lentemêt sur le chemin,
qu'ils n'arriuerent qu'à Prodaue, au lieu qu'ils deuoient estre à la pointe du iour à Sapien-
ce,où ils furent découuerts par les Turcs du chasteau de Nauarrinjesquels par ce moyea
eurent tout loisir de s'en aller entoure seureté à Modon ,à la veuë de l'armée Chrestien-
îie,qui n'en estoit qu'à trois milles loin, laquelleles voyant ainsi sortir, pensoit qu'ils vou-
lussent leur liurerla bataille, de sorte qu'ils mirent aussi-tost leurs bataillons en ordon-
nance ; mais les Turcs n'en auoient nulle enuie : car ils connoissbient allez leur foiblcile^
ains au contraire ilsse retiroienten toute seurité sous la sauue-garde de laforteresîe de
Modon,