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Musée Royal; Laurent, Henri [Editor]
Le musée royal ou recueil de gravures: d'après les plus beaux tableaux, statues et bas-reliefs de la collection royale avec description des sujets, notices littéraires et discours sur les arts : dédié au Roi (tome 2nd) — Paris: de l'imprimerie de F. Didot, 1818

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https://doi.org/10.11588/diglit.53413#0175
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PORTRAIT DE DEUX JEUNES GENS.

« Quand nous faisons peindre et portraire après le vif quelques biaux
« visages, et qui ont fort bonne grâce, si d’adventure il s’y treuve quelque
« imperfection et quelque chose de laid, nous ne voulons pas ny qu’on
« la laisse du tout, ny qu’on s estudie aussi trop à la représenter, pource
< que l’un rendroit la portraiture difforme, et l’autre dissemblable (i). »
Les anciens soignoient la beauté jusque dans le portrait; nous l’avons
presque entièrement réduit à la ressemblance, et si, dans les portraits de
femmes, la peinture s’étudie à dissimuler ce qui pourroit diminuer la
grâce, c’est plutôt une politesse de l’artiste qu’une règle de l’art. Le
peintre de portrait a donc de nos jours un problème de moins à résoudre;
car les petites imperfections naturelles qu’il doit écarter de sonimitation,
comme les taches de la peau, une maigreur trop décharnée, sont des
choses qui, dans la nature même, peuvent être adoucies par une lu-
mière ménagée avec soin, et ninfluent pas assez sur la ressemblance
pour que l’œil puisse jamais regretter qu’on les lui ait épargnées.
Il reste cependant encore au peintre de portrait d assez grandes diffi-
cultés inhérentes au genre. Sans parler de celles que lui suscitent les
innombrables caprices auxquels l’assujettissent ses modèles; sans parler
de ces prétentions si ordinairement en désaccord avec le caractère de la
figure, et qu’il faut, en les satisfaisant, savoir réduire cependant à l’har-
monie que demande la peinture; de ces flatteries que sollicite si souvent
la vanité, si fart ne les exige plus; le genre du portrait présente un in-
convénient que n’a pas toujours surmonté, ni même cherché à vaincre,
le talent des plus habiles artistes, et qui tient à la situation indolente de
cette figure placée là, devant vous, sans autre but, sans autre occupation
que celle de se faire peindre; il faut cependant lui donner une âme, une
âme active, animée de ce mouvement qui, comme dit Montaigne, est la
vie et la grâce. De là tant d’expressions sans aucun rapport avec la si-
tuation actuelle du personnage, tant de vivacités sans objet, de sourires
qui ne s’adressent à rien qu’au pinceau du peintre. Presque tous les por-
traits de la fin du quinzième siècle et du commencement du seizième
offrent une singulière affectation de fermeté et de fixité dans le regard;
la tête est haute, et l’œil tourné de côté, comme dans l’intention défaire
baisser les yeux à quelque insolent. Les anciens, au contraire, évitoient

(i) Plutarque, trad. d’Amyot, tome V, p. 7 et 8, 1801.
 
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