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La Lune — 3.1867

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https://doi.org/10.11588/diglit.6786#0118

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ERNEST PICARD

M. Ernest Picard est né à Paris.

C'est le département de la Seine qui l'a envoyé au Corpa lé-
gislatif.

Il a aujourd'hui quarante-quatre ans.

L'attitude spirituellement militante qu'il a prise jadis, dè3 son
début, dans le groupe des cinq, et qu'il conserve avec une vtrvo
infatigable à l'heure qu'il est, au milieu des dix-sept, fait de ca
jeune député, qui s'est révélé si brillamment, une deïplua origi-
nales et des plus sympathiques physionomies do la Gauche à la
Chambre.

*
* *

Au physique, le voici :

La main gauche dans la poche du pantalon, relevant l'épaule,
développant sur sa vaste poitrins son grand gilet où brille la
belle chaîne d'or de sa montre, jouant avec le couteau à papier
de sa main droite, Ernest Picard se tient négligemmant sur son
banc, souriant et causant avec ses collègues pendant quo les ora-
teurs de la majorité suent sang et eau à 1? tribune.

Peu attentif, en apparence, à ces discours qui sa suivent et se
ressemblent, mais l'oreille parfaitement ouverte néanmoins, il
se rengorge légèrement dans son faux col abondant, enfonçant
un peu entre ses épaules solides sa tête large et blanche, au re-
gard très-caustique et d'une rare finasse, — ornée do favoris
noirs très-soignés et de cheveux qui frisent sur le front.

* *

Au moral, M. Picard, audacieux, adroit, habile, malicieux, mais
seul et point violent, mo fait assez l'effet de David combattant
contre Goliath.

Il ne vainc pas Goliath. Il le fait rire — un peu jaune par-
foi f, mais il le désarme un instant. Et David profite de ce mo-
ment d'abandon pour lui jeter en plein visage toute une bonne
frondée de petits cailloux, très-tranchants, qui ne tuent pas le
gros colosse noir, mais qui lui tirent le sang par gouttes.

Les petits ruisseaux font le3 grandes rivières.

Ce spectacle de la rusa imperturbable et polie, trouvant les !
défauts de la cuirasse, de la force ahurie et amusée, est le plus
vif plaisir de l'assemblée- Tous les partis sont joyeux.

Les rétrogrades ou les stationnaires s'amusent de cette escrime
perfectionnée, et les progressifs se disent : cent mille coups d'ai-
guilles valent bien des bombes,

*

* *

En couvrant ainsi d'esprit et de courtoisie, comme d'une gaîne
ciselée, la lame aiguë de l'opposition que d'autres font flamboyer
dans l'excès de leur zèle, M. Picard sait aa conserver toujours
l'oreille de la présidence.

Il est, dans la gauche, le député qu'on a la moins rappelé à
l'ordre dans les discussions irritantes. On l'écoute volontiers jus-
qu'au bout. Il ne casse pas les vitres, il les coupa avec sa pa-
role fine, un diamant monté. En outre il sait Être bref. Il ne fa-
tigue pa3. C'est énorme ! — D'excellentes raisons exposées lon-
guement et lentement ne noîit jamais écoutées. Il faut le mot
qui frappe l'oreille et la flatte par sa concision originale. Le bou-
let d'un canon q"i fait long feu no vaut pas une balle do pistolet
de salon.

M. Picard, d'ailleurs, ne s'occupe que par occasion des ques-
tions extérieures, à moins qu'elles ne se rattachent indirectement
au rôlo qu'il a pris à tache de remplir. Il laisse, avec respect,
les travaux effrayants aux maîtres en l'art de parler haut et fort.



M. Picard est roi dans le métier de batteur d'estrade politique.
11 entre dans les labyrinthes administratifs ou financiers et —
mirabile dictu '. — il en sort. L'administration, la finance, voilà
les deux lots du député railleur. Les vices de conformation de
ces deux machines compliquées ne lui échappent jamais. Il les
saisit, sans que personne s'en doute. 11 les montre délicatement,
entre le pouce et l'index, avec cette grâce maligne, avec ces
plaisantes observations inattendues, qui ont fait sa réputation.

M. Haussmann, en particulier, est le superbe bat sur lequel,
avec une souplesse inouïe et une désinvolture charmante, M. Pi-
card, en torero inimitable, plante incessamment des nuées de ban-
derillas enflammées. Ce qui est gênant.

*

* *

Mais cette notice biographique doit rester complètement litté-
raire; je me hâte, pour ne pas mordre en plein fruit défendu,
de la terminer en disant que M. Picard, avocat, docteur en droit,
n'a pas moins de succès au barreau qu'à la tribune, et qu'il
n'y a pas seulement en son talent souple ce que ses bons con-
frères affectent — après Hamlet — d'y trouver de temps en
temps, c'est-à-dire : « dos mots! des mots! des mots! »

Eknkst d'Hervilly.

LE TRAIN DES... MARIS

La train des... maris, c'est, pendant la saison des bains, le
train que prennent le samedi soir, à Paris, les époux fidèles qui
vont passer la journée dominicale près de leurs fidèles épouses,
Néréides de la Manche éparpillées dans les petits ports de la côte
normande.

Le train de retour du lundi matin, porte également ce nom. j
Les employés de la compagnie de l'Ouest les désignent tous les j
deux d'une façon beaucoup plus énergique. Nous substituons |

pudiquement au mot de Paul de Kock une timide ligne de points
de suspension.

Sans plus de préambule, prenons notre sujet à deux mains.

Il est six heures et demie, Vexpress pour Trouville va s'élancer
sur la rail. Entrons dans le wagon 647, si vou3 le voûtes ta i,
ot mettons-nous dans ce coin, en face justement d'un monsieur
d'âge mûr en veston déjeune homme.— Pendant qu'il remplace
son petit chapeau gris par un léger bonnet de voyage, remarquons
ses cheveux ras, poivre et sel, sa. face grasse, rougeade. Il a le
cou court et duveté, l'oreille fraîche, la lèvre écarlate et humide.
Bon, Ce monsieur a dû voir jouer souvent la pièce : Ce qui plait
aux Dames.

Chacun a fini de caser son sac de nuit et sa couverture dans la
fllet.^On donne du jeu à la boucîo du pantalon. On s'assure si le
bulletin de bagage et le ticket sont en lieu de sûreté. Bien. Tout
est prêt. Voilà le monsieur du coin qui s'agence dans son trou.
Le train part. Pst! on est à Asnières déjà. Adieu, Paris. A après-
demain les affaires sérieuses !

Nous qui avons, comme Jéhovah, le pouvoir de « sonder les
reins et les cœtm », nous allons vous faire connaître les secret*
les plus intimes, les plus cachés dans les replis de l'âme de notre
vis-à-vis, pendant son voyage, aller et retour.

Voici ce que penso le gros monsieur à la tête joyeuse ot sen-
suelle :

Après Paris

« Je n'ai rien oublié? Non : les livres, l'ananas, les bottines,
« les trois cols? Bon. Tout le post-scriptum de la lettre de ma
« femme est emballé. — Ma Lucie sera contente de moi. — Pau-
« vre femme, elle m'a écrit une lettre charmante; et dire que...
« Oh! c'est qu'Amanda est bien jolie aussi. — Enfin, ne pensons
« plus à Amanda. Je vais voir ma femme. Si je relisais sa lettre?
« Non, tout à l'heure; quand j'aurai pris le café à Mantes.

Aprè« Mente». T h. 30 m.

« Détestable café. Excellent cigare. Amanda m'a dit qu'elle
« resterait toute la journée chez elle. Hum? Il y a des courses.—
« Enfin! — La lettre do Lucie est vraiment adorable. — Elle
« s'ennuie à Trouville; elle attend le dimanche avec impatience;
« pauvre petite chatte ! Elle a fait une petite promenade avec
« M. Basibus, un charmant garçon, hum? — Nous le verrons,
t ce Basibual

Après Evreux, « la. :s4t.

(i Tiens, je dormais. — Hé? mais je me sens un petit creux;
« j'ai dîné à cinq heures. — Mauvaise Bourse aujourd'hui. Je
« digère mal. — Et Amanda qui n'est pas venue m'accompagner
« à la gare.—Or çà, Lucie m'attendra ce soir, j'espère? Elle
« fait préparer quelque chose. — Chère Lucie. Elle est pleina
« d'attention. Tous les samedis, un petit souper lin près du lit,
« C'est charmant! Ils ont untrùs-bon bordeaux aa Bras d'Or.

Aprùs I.iftieux, lOh. HT.

« Moi, j'aime ça. Un petit voyage, ça vous change. C'est singu-
« lier, Lucie a des toilettes d'une gaité folle le samedi soir ! je
a me rappelle que la dernière fois... Ah ! elle se porte bien, ma
« femme.

« L'air de la mer est excellent. — L'eau de nier donne une
« fraîcheur à la peau, une douceur! Et puis tous ces crustacés ça
« vous met un l'eu dans le corps, je ne mangerai pas de crevettes,
« demain. Non, décidément. — Ah! que c'est bête de penser à
« celn. — Je bâille, j'ai une faim, comme' je vais m'en donner
« tout à l'heure. Et ma petite Lucie qui sera là, sur sen séant,
« dans son lit, à me regarder manger. Je la voie d'ici, l'épaule
« sortant de la dentelle, et me disant, les mains croisées sur ses
« genoux : « mange, mon bon petit ogre. » Fichtre.

« Ah! c'est qu'elle a une jolie épaule, ma femme. — Amanda ?

«_Non, Amanda n'a pas une épaule comme cela. C'est plus...

« c'est moins.,, enfin... ce n'est pas cela.

Après S»omt-rïivè<jue. 11 11, it

a Encore une demi-heure. Dieu ! que j'ai faim. Ce wagon vous
« secoue d'une façon atroce. Il me semble qu'il y a un siècle que
« je n'ai vu Lucie, Plus le train me rapproche, plus elle me
« semble s'éloigner. Belle petite Lueie ! Ah! je suis un monstre!
« vrai. Je na mérite pas son plus petit baiser. Son petit baiser?
« Sacriati ! encore un arrêt. Nous n'arriverons jamais, »

* «

On arrive à Trouville. On s'enfourne dans les omnibus. En
route. La nuit se termine. Le soleil se lève pour éclairer les
bonnets de coton eles femmes du pays. Le dimanche se passe,
Lundi arrive. Il faut repartir. Adieux déchirants ! Le3 maris
reprennent leur train. Les dames pensent à leur toilette du soir.
Les messieurs Basibus vont prendre leur revanche. Betournons
dans notre wagon. La mari de Lucie s'est replacé dans son coin.
Il sommeille. Il vient de déjeuner.

RETOUR

Avant Pont-l'Eïcque, une heure après midi

« Lucie! — Je le jure, je te resterai fidèle. Décidément l'air de
« la mer est exquis. Je suis un peu fatigué ; puis le sable de la
« plage est éreintant, ma parole 1 — Chère Lucie, comme on
« l'admirait ! Ce M. Basibus est un imbécile, un gandin. — Lui?
« Allons donc ! je n'ai pas peur. Si je fumais en rêvant à Lucie ?

Avant I.l/ieux. «

« Jolie campagne, bien cultivée, plantureuse..., comme la ser-
<c vante de l'hôtel, du reste. — Que fait Lucie ? Elle s'habille
« peut-être. Pauvre Lili, ella a pleuré ce matin. Et moi donc ; un
« ruisseau I — J'avais l'air de demander un cadeau comme

« Amanda. Tiens ! c'est vrai, Amanda, je l'avais oubliée. Bile
« vient m'attendre à la gare, je crois ? — Au fait, j'ai sa lettïe
« sur moi. Voyons. Non, ça c'est la lettre de Lucie, cher ango
« — Ah ! voici le barbouillage d'Amacia.

&<suui« i.*m«3ffi, 8î la» «Mi

« Belle cathédrale I — Amanda est belle également, mais pas
« si dure. Sera-t-elle à la gare ? — Tant pis, je dîne sans elle 1 —
« Les voyages, ça creuse. L'estomac demande quelque chose. —
« Hum? — On est mal assis sur cette moleskine Qu'aura fait la
« Bourse, aujourd'hui ? Et Amanda ? — Bile aura été à Vincennea,
« hier, j'en suis sûr. Oh ! si elle a manqué à ses devoirs de se-
« conde épouse, je... — Ah! bien oui, allez donc vous tacher,
« elle mettra ses jolis bras autour de mon faux-col et me dira
« On est donc méchant n'aujourd'hui. »

« Et puis elle me parlera de Lucie. — J'aurai l'air de lui faire
« une scène de la part de ma femme...,

Avant Mantes, A, li. SO.

« Mantes la jolie ! enfin nous arrivons, voilà le joli clocher._

o J'ai le ventre vide, sacre bleu ! Pourvu qu'Amanda ne me fasse
« pas attendra. Je lui flanque un savon. Et puis j'ai une soif. Je
« me sens en feu dans l'intérieur. Décidément je ne mangerai plus
« de crevettes! FumonB.

Avant Paris, h. 3© m.

« Ah ! voua les fortifications. Splcndide œuvre d'art. — Quel
« joli petit dîner chez Beaurain je vais faire faire à Amanda et à
« Bibi. Bjih ! pour une fois, je lui offre tout ce qu'elle voudra. —
« Dieu, si elle m'entendait ! — Ah ! c'est qu'Amanda, c'est du
« salpêtre dans la coupe de l'existence. Est-ce que Lucie chausse
« du 33, allons donc! est-ce que?... jamais, jamais, jamais. Il
« n'y a qu'Amanda. Ange ! Nous aurons du homard !

Parlai!

Le Cousin Jacquks.

BOURDES DÉPARTEMENTALES

J'éprouve ici ie besoin do déclarer solennellement que l'Echo de l'Indre
vient d'entrer dans sa iiO8 année, autrement on pourrait croire que cette
intéressante feuille a été créée exprès à seule fin de me fournir de la ma-
tière pour cette petite revue départementale.

Récemment j'y ai trouvé un coup de foudre, dont nous conserverons
longtemps la mémoire. Je viens d'y cueillir aujourd'hui une autre perle,
si toutefois l'expression peut s'appliquer à co produit qu'on extrait géné-
ralement des huîtres.

Je ne sais pas trop ce qui s'oHt pusse au concours agricole de la loca-
lité, mais tout le inonde n'a pas été content, puisqu'il y a eu des réclama-
tions et des rectifications; en voici une qui vaut son pesant d'or : J'ai vou-
lu la faire imprimer avec des lettres de ce vil métal, en pleine Lune, mais
notre directeur est d'un raide sur les frais extraordinaires, on n'a pas
idée de ça !

Voici toujours la lettre; j'ai respecté lo texte comme une sœur.

Des Ribattes, le ... 1867.

Monsieur le directeur,
Il y a huit jours, dans l'ignorance complète où nous étions, ma
fille et moi (je l'affirme sur l'honneur), de la composition du
jury, supposé masculin, nous luttions pour l'honneur du principe
que je maintiens ici, contre l'hérésie présumée de ce jury, qui
semblait avoir méconnu ou dénié le mérite de la culture indus-
trielle exposée; il n'était pas possible alors, dans cette pensée
non fondée, je le reconnais, de lui accorder le bénéfice de l'im-
munité. — C'est dans son abstention que sont les sévices de la
fatalité.

Aujourd'hui que lo voile de l'anonyme est tombé, que je con-
nais le tribunal d'honneur qui a prononcé, qu'enfin l'exposition
de ma fille a été citée et jugée à la barre des grâces, de l'amabi-
lité et de la beauté réunies, mon opinion est tempérée par l'in-
dulgence légitimement acquise à des dames logiquement étran-
gères à cette appréciation ; elles doivent être courtoisement et
équitablement absoutes de toute erreur ou omission.

En conséquence, je déclara ici, en toute sincérité, que je suis
infiniment sensible aux bonnes intentions de ce gracieux et bien-
veillant aréopage.

Charles M.....jeune.

Soyons juste ; l'Echo ajoute :

Nous laissons à ce dernier, comme à sa fille, toute la respon-
sabilité de cette rétractation.

Ah ! brigadier, vous avez raison !

*
* *

Autre Echo, celui de l'Oise. Si M. La Palisse n'était p*u mort,... non-
seulement il vivrait encore, mais on mettrait positivement sur son compte
l'importante découverte dudit Echo, qui commence ainsi sa colonne de

iiùis-divers :

Chaque histoire se termine toujours par un dénoùment.

Est-ce assez profond, mon Dieu 1

* *

Depuis l'ouverture de l'Exposition, l'hospitalité parisienne a atteint des
prix fabuleux; l'hospitalité écossaise n'est plus qu'un mythe. Il était temps
qu'on en trouvât une autre. C'est le Courrier du Pas-de-Calais qui nous
fait ce cadeau à propos du concours agricole de Guines.

Pendant qu'on palpait les vaches, qu'on admirait les cochons et
qu'on faisait courir les chevaux, un arc de triomphe en feuillage,
couronné d'innombrables drapeaux et oriflammes , abritait nos
principaux visiteurs et permettait aux commissaires de la le te,
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