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56 EXPLICATION DES PLANCHES.

Toutes les parties de l'édifice sont assez bien conservées pour causer au voyageur une illusion
complète. Le silence et la solitude qui régnent dans un lieu tant de fois fréquenté par une nom-
breuse et bruyante multitude, l'étonnent encore plus au premier abord, que s'il voyait tous les
sièges remplis, et l'artisan de Mycènes s'avancer sur le proscenium en s'écriant :

« O ville antique d'Argos! ô flots de l'Inachus! »

Puis bientôt, Electre de son côté :

« O nuit sombre, mère des astres d'or (i)! »

Cette illusion cesse bientôt. Mais on peut la ramener,et la fixer, pour ainsi dire, en prenant
place sur les gradins si bien conservés, derrière la balustrade qui séparait les chevaliers du reste
du peuple; et là, il faut s'oublier soi-même, s'absorber dans la lecture d'un des chefs-d'œuvre
des anciens. Une pareille situation est peut-être la seule où l'on puisse sentir ces grands génies
dramatiques; et de même leur lecture fait seule comprendre l'édifice scénique. Etrange
situation que celle d'un fils des barbares, membre d'une civilisation née d'hier, faisant retentir
de nouveau, sur un théâtre qui date de dix-huit siècles, des vers vieux eux-mêmes de deux mille
trois cents années!

Devant le théâtre, sur le pavé, qui est encore entier et qui est formé de morceaux de marbres
de couleurs variées, on lit cette inscription en lettres onciales de bronze, d'une assez mauvaise
forme :

M . OGVLATIVS . M . F. VERVS . IIVIR . PRO . LVDIS. (2)

C'est-à-dire « Marcus Oculatius Verus, fils de Marcus, duumvir, a été chargé des jeux.» C'était
ce duumvir, chargé des jeux, qui indiquait aux locarii (3), ou plutôt aux designatores (4), la place
qu'ils devaient assigner à chacun : il enjoignait même à ces derniers de chasser ceux qui
usurpaient la place d'autrui.

(1) Euripide, Electre, v. 1 et v. 54-

On jouait alors, dans toute l'Italie, des ouvrages grecs, surtout pour la tragédie : faute de meilleures preuves, une découverte
de Pompéi le démontrerait, selon nous. En déblayant les théâtres, immédiatement après les premières fouilles, on trouva deux
cachets d'entrée : ils étaient d'os, taillé en forme de disque. L'un portait cette inscription : XI HMIKYKAIA IA (le nombre onze répété
en lettres grecques); l'autre celle-ci : XII AICXYAOY m (le nombre douze répété). On a fait remarquer que le premier cachet indiquait
une place dans un des rangs voisins de l'orchestre, selon l'Onomasticon dePollux; et que, par conséquent, il n'était point probable
que le second portât le nom de l'auteur de la tragédie représentée. On a ajouté que, dès les premiers temps de l'empire romain, les
tragédies d'Eschyle étaient négligées, même dans Athènes. En conséquence, on a cherché à faire du mot inscrit sur le deuxième
cachet le nom d'une classe de sièges, comme est le mot TCPG>TdS<A<x qu'où lit dans Aristophane (Acharn. a"5). Nous avouons qu'aucune
de ces objections ne peut nous empêcher de lire sur ce cachet le nom du poète Eschyle au génitif, tandis que le mot hémicycles
est au nominatif pluriel, sur l'autre. Mais ne serait-il pas possible que le théâtre eût été décoré des statues ou des bustes des auteurs
dramatiques les plus célèbres, ainsi que cela s'est pratiqué plusieurs fois chez les modernes, et que l'on eût appelé sièges d'Eschyle
ceux qui étaient voisins de l'image de ce poète? — Quoi qu'il en soit de cette conjecture, l'inscription prouve toujours que le grec
était la langue du théâtre de Pompéi, et qu'on devait y jouer des pièces grecques, soit d'Eschyle , soit de ses successeurs.

(2) Cette inscription a été endommagée en 1820, dit Mazois, par les soldats autrichiens.

(3) .Les locarii étaient des gens qui venaient occuper les places dès l'ouverture du théâtre, pour céder ensuite chaque place,
moyennant une rétribution, mais a ceux-là seulement qui avaient le droit de siéger au rang dont cette place faisait partie. C'est un
genre de commerce qui se retrouve à Pans et dans nos autres grandes villes. Martial (V, 24), appelle divitiœ locariorum, la
richesse des locarii, un certain gladiateur, nommé Hermès, qui attirait beaucoup de monde à l'amphithéâtre.

(4) Les designatores, ou mieux dis signatures, étaient des employés du théâtre qui conduisaient chaque spectateur au rang qui
lui était dû. On voit en quoi ils différaient des locarii. Plaute, dans le prologue de son Pœnulus, v. 19, les engage à ne point
passer devant l'acteur qui est en scène. Il y avait à Rome un dissignator Cœsaris qui conduisait à leur place les amis et les
affranchis de l'empereur. Inscript. Gruter. 601, 1.
 
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