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Galerie Moos (Genf); Hodler, Ferdinand [Ill.]
Exposition Ferdinand Hodler: 11 mai-30 juin 1918 — Genève: Galerie Moos, 1918

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https://doi.org/10.11588/diglit.72882#0020
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— 12 —

Il fut, il faut en convenir, secondé dans son ascension aride par
une force de volonté, une santé physique et une clairvoyance
extraordinaire, qui ne sont pas données à tous. Epris de beauté
dès sa tendre enfance, le désir d'en devenir un jour l'interprète
se fixa en son âme à un âge où la plupart des enfants ne pensent
encore qu'à se divertir et dont l'avenir est le dernier des soucis.
Il faut l'entendre, maintenant encore, parler en amoureux des
visions de beauté qu'il eut étant enfant, de Berne sa ville natale;
il faut l'entendre raconter en enthousiaste la beauté d'un orage
que d'un œil enivré il suivit du haut d'un hêtre, un jour qu'avec
d'autres enfants pauvres sa mère l'avait envoyé ramasser du bois
mort dans la forêt de Muri. Il faut le voir s'extasier au souvenir
de ce que fut pour lui, à l'âge de quatorze ou quinze ans, la révé-
lation des beautés des Alpes bernoises, alors que tous les jours,
parcourant la route de Steffisburg à Thoune, où il était en ap-
prentissage, il avait devant lui le Stockhorn et le lac avec les
cimes neigeuses des Hautes Alpes à l'arrière-plan. C'était — pour
citer ses propres paroles — une ivresse continuelle, un vrai délire !
Il brûlait de s'ériger en prophète de toute cette beauté qui
l'envahissait et il sentait qu'il en avait la force et le pouvoir.
Et il se fit peintre. Pour lui, se faire peintre, c'était se faire
homme à un âge, je l'ai dit, où chez la plupart des jeunes gens la
vocation future commence à peine à se dessiner. Son tempéra-
ment, toujours en ébullition, et sa robuste volonté héritée de te-
naces paysans bernois firent de lui un autodidacte, et l'on est
étonné de le voir s'affirmer en maître à une époque où il avait
encore tout, ou presque tout, à apprendre de ce qui constitue le
métier. Il savait ce qu'il voulait aussi bien que ce qu'il valait et,
à dix-sept ans, relevant le défi d'un de ses camarades de pension
qui le harcelait de plaisanteries mordantes, il répond fièrement:
« Vous serez encore un imbécile de régent de village lorsque,
moi, je serai un grand peintre ! »
Rien ne lui chaut, ni la misère qui le harcèle, ni lïncompré-
 
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