Institut Archéologique <Paris> / Section Française [Hrsg.]: Nouvelles annales (1.1836)

DE CYBÈLE. 251

que nous allons tâcher de faire, et dont, je dois l'avouer, l'au-
dace ne pourra être excusée, que si les résultats qu'elle amène
portent ce caractère d'évidence qui triomphe des scrupules du
scepticisme le plus rebelle.

IX. Les phénomènes dont j'aborde ici l'examen se rappor-
tent nécessairement à la reproduction des êtres; car dans tous
les mythes qui nous font "voir une vierge rebelle et ennemie du
mariage, paraît aussi un personnage auquel est dévolu le rôle
actif de la génération, et le résultat, plus ou moins déguisé de
ces récits, est toujours d'amener la naissance d'un être autour
duquel se groupent toutes les idées de la rénovation et du ra-
jeunissement de la nature. Par la répugnance que la vierge
éprouve pour son époux, par les traces de violence et souvent
de mort que porte le récit, on reconnaît que la pensée qui a
dicté ces symboles a constamment associé à la reproduction
des êtres les phénomènes de leur destruction, qu'elle a fait dé-
pendre ces deux ordres de faits l'un de l'autre, qu'elle n'a pu
comprendre la mort sans la vie, ni la vie sans la mort. Ces pro-
blèmes, dans lesquels notre propre existence, nos espérances,
nos douleurs et nos joies se trouvent si étroitement enclavées,
ont demandé impérieusement à l'esprit de l'homme une ré-
ponse, une solution: et, selon la marche naturelle des choses,
la solution qu'on cherche aujourd'hui dans la science , l'huma-
nité naissante l'a d'abord demandée à la religion. On a tremblé
devant ce qu'on ne pouvait comprendre, et on a adoré ce qui
faisait trembler. Il ne sera donc pas hors de propos, si nous vou-
lons lier entre elles les idées confusément entassées dans les
récits mythologiques et les cérémonies religieuses qui nous oc-
cupent, de parcourir rapidement ces harmonies de la mort et
de la vie, ces alternatives de destruction et de renouvellement
qui, nous n'en doutons pas , sont la base de toutes les religions
antiques.

Pour étudier ces idées avec méthode, on peut d'abord les
considérer à part de toute tentative d'explication scientifique,
puis en faire l'application à la physique grossière qui, pendant
si long-temps a suffi aux spéculations de l'esprit humain.