Institut Archéologique <Paris> / Section Française [Hrsg.]: Nouvelles annales (1.1836)

308 XVII. MONNAIES INCUSES

duisait à la caverne paré comme une victime, quand Eury-
batus, fils d'Euphémus et descendu du fleuve Axius, touché
de la beauté du jeune Alcyonée, prit sa place, entra dans la ca-
verne, arracha de son asile le monstre détesté, l'amena au
jour, et le força de se précipiter sur les rochers de Crissa : une
source parut au lieu même où Sybaris avait péri; et les Lo-
criens qui se joignirent aux fondateurs de Sybaris, donnèrent
ce nom au fleuve et à la ville nouvelle (1).

Les Achéens voulant compléter l'image de leur patrie et
avoir un fleuve Crathis comme il s'en trouvait un près d'/Egas
et d'/Egira (2), choisirent le principal cours d'eau de la val-
lée ; ce fleuve impétueux a conservé sa dénomination antique.
Il est, sans doute, représenté sous la forme d'un taureau sur
\es médailles incuses de Svbaris frappées long-temps après
l'arrivée des colons achéens; on le voit figuré de même sur
les monnaies de Thurium, où le nom Ooupioç convient à son
attitude violente; les poissons placés fréquemment au-des-
sous ne laissent pas de doute sur le sens de cette figure sym-
bolique. J'ai montré autre part comment elle exprimait aussi
le Bacchus OEnotrien, infernal, producteur de toutes les eaux
que la terre épanche de son sein (3). Une fable étrange, con-

(l) Antonin. Libéral, (ransform, cong. , c. 8. Il est curieux d'observer que la
même fable sous une forme peu différente accompagne l'établissement des Locriens à
Temesa, La colonie locrienne à Sybaris est attestée par ce passage du mythographe
et par Solin , c. 8. Celui-ci raconte que les Locriens de Sybaris prétendaient y avoir
été conduits par Sagaris, flls d'Ajax. A Temesa, le hé: os vainqueur du monstre est
un athlète , fds du fleuve Ccêcinus, comme ici Eurybatus descend du fleuve Axius ;
à Temesa , le mauvais génie va se jeter dans la mer; à Crissa, une source naît au
lieu même où Lamia vient d'expirer.

(£) Strab., lib. iv, c. 7 , § 4. Herodot., lib. i, c. 143. Pausan., lib. vu , c. 23.

(3) Annali dell' inst. , t. V, p. 14 , 15. Les poissons sur les médailles de Thurium
peuvent être encore ceux de la rivière Lysias où ils étaient très nombreux et remar-
quables par leur couleur noire ; /E!ian. , De Nat. anim., lib. x, c. 58. J'ignore le
nom moderne du Lysias, il était certainement dans le pays de .Sybaris, puisque, selon
^Elien. c'était une rivière du domaine des Thuriens, et selon Athénée, lib. xn, c. 17,
es jeunes Sybarites allaient passer les jours d'été dans les grottes des nymphes
Lysiades. Il se jetait probablement dans le Crathis comme la plupart des torrents
voisins.