Perrot, Georges; Chipiez, Charles: Histoire de l'art dans l'antiquité: Egypte, Assyrie, Perse, Asie Mineure, Grèce, Étrurie, Rome (Band 3): Phénice - Cypre (Paris, 1885)

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LA PHÉNIGIE ET SES DÉPENDANCES.

saute enceinte qui entourait l'île d'Arad, on est frappé de ce môme
mélange ; les assises construites se soudent de la même manière au
rocher; celui-ci, jusqu'à une hauteur de trois et quatre mètres, faisait
au mur comme une sorte de plinthe massive et ininterrompue (fig. 7);
il en est de môme dans ce qui reste à Sidondes murs phéniciens (fig. 41).
Le fossé s'obtenait, comme à Marath la cour du temple , aux dépens
du roc; c'est ce que l'on peut voir, par exemple, à Semar-Gebeil, où
un château du moyen âge a profité des travaux gigantesques qui avaient
été entrepris autrefois pour mettre à l'abri d'un coup de main une
vieille forteresse giblitel. Enfin, à Ruad et partout ailleurs, on trouve
des cuves de pressoir, des citernes, des silos, qui ont été exécutés,

41. — Fragment des murs de Sidon. Renan, Mission, pl. 68.

par le môme procédé, dans la roche tendre, dont les parois ont été
revêtues ensuite d'un enduit2.

Un texte curieux d'un ancien historien prouve que, dans l'antiquité
même, ces habitudes des Phéniciens avaient été remarquées : « Quand
les Phéniciens commencèrent à s'établir en nombre sur ces rivages
rocheux où les attirait la richesse de la pourpre, ils s'y bâtirent des
maisons et les entourèrent de fossés ; au cours de ce travail où ils tail-
laient le roc, ils firent les murs de leurs villes avec les pierres qu'ils
enlevaient ainsi, et de cette manière ils mirent à l'abri leurs ports
protégés par des jetées3. »

On ne se décidait donc à bâtir qu'à la dernière extrémité, quand on
ne pouvait plus s'adresser au roc, quand celui-ci se dérobait au ciseau;

1. Renan, Mission, p. 244 et pl. XXXVII.

2. kl., ïbid., p. 40 el pl. III.

3. Claudius Iolaiis, cité par Etienne de Byzance, s. v. Awpa. Cette façon de tirer le mur
de son fossé se remarque, dit M. Renan, à Ruad, à Torlose, à Ancfc et à Semar-Gebeil.