Perrot, Georges; Chipiez, Charles: Histoire de l'art dans l'antiquité: Egypte, Assyrie, Perse, Asie Mineure, Grèce, Étrurie, Rome (Band 3): Phénice - Cypre (Paris, 1885)

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LA PHÉNIGIE ET SES DÉPENDANCES.

On a d'autres exemples de lettres phéniciennes isolées inscrites ainsi
sur de menus objets, lettres auxquelles il convient d'attribuer cette
même valeur de numérotage industriel1.

Si la Mésopotamie, la Syrie, Cypre et les îles grecques offrent
ainsi nombre d'ivoires plus ou moins ornés où l'on croit reconnaître
des produits de l'industrie phénicienne, ces ouvrages semblent avoir
élé particulièrement recherchés en Occident, ou ils avaient le carac-
lère d'objets de grand luxe; c'est là, c'est dans les nécropoles du
Lalium et de l'Étrurie que l'on a trouvé les plus belles sculptures
orientales sur ivoire. Peut-être aurons-nous l'occasion d'en décrire et
d'en reproduire quelques-unes lorsque nous ferons l'inventaire du
mobilier de ces tombes et que nous chercherons quelle influence ont
pu exercer sur le premier développement des Italiotes et des Etrusques
les modèles que ces peuples ont tirés de l'Orient; pour le moment,
nous nous contenterons d'offrir un seul échantillon de ces plaques
d'ivoire, décorées de nombreuses figures, qui se rencontrent souvent
dans les plus anciennes et dans les plus riches des sépultures de
l'Italie centrale. S'il n'est pas toujours aisé de savoir quelles étaient
au juste la forme et la nature du meuble dont ces morceaux ont fait
partie, tout au moins y retrouve-t-on, à peu près partout, le même
style, qui rappelle beaucoup celui des images gravées sur les coupes
de métal; c'est la même prédominance des motifs égyptiens, c'est le
même dessin coulant, assez correct, mais sans originalité ni vigueur;
c'est la même banalité de thèmes purement conventionnels. Voici par
exemple un morceau, d'une belle conservation et d'un travail soigné,
qui appartient au fameux Trésor de Frénésie (fig. 623)2. Sur une
barque, copiée de celles que représentent par centaines les peintures
de Memphis et de Thèbes, trois personnages adorent une divinité
devant laquelle sont dressés un autel et une table d'offrande ; à l'avant
ej h l'arrière, des bateliers qui manient de longues rames. Types,
costumes, attitudes, tout est emprunté à l'Egypte3.

1. Glermont-Ganneau, Notes d'archéologie orientale, VIII (Revue Critique, 1881, I.
pp. 12-13). Nous rappellerons à ce propos les lettres gravées sur les pierres du mur
phénicien d'Eryx (fig. 34 et 35).

2. Des découvertes du même genre avaient été déjà faites, dix ans avant les célèbres
fouilles de 1876, dans la nécropole de Préneste (On the discovery of sepulchral remains at
Veii and Prœneste, by padre Raphaële Garrucci; communicated and translated by W. M.
Wylie, etc., dans YArchœologia, t. XLI). Les ivoires recueillis à ce moment dans deux
tombes prénestines sont décrits pp. 202 et 204, et figurés pl. V, fig. 1 et 2, et pl. VIII,
fig. 1, 2, 3. Il y a là des lions couchants, des lions passants et des lions ailés.

3. HELBrc Cenni sopra Varie fenicia, p. 249 (Annali, 1876).