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Perrot, Georges; Chipiez, Charles
Histoire de l'art dans l'antiquité: Egypte, Assyrie, Perse, Asie Mineure, Grèce, Étrurie, Rome (Band 3): Phénice - Cypre — Paris, 1885

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https://doi.org/10.11588/diglit.11735#0904

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894 LA PEÉNICIE ET SES DÉPENDANCES.

Phéniciens n'ont pas inventé la monnaie parce qu'ils pouvaient s'en
passer, et ils ont inventé l'alphabet, parce que l'alphabet leur était
nécessaire pour établir leurs comptes, que la complication des écritures
égyptienne et assyrienne aurait inévitablement embrouillés. Ainsi
s'explique ce que l'on pourrait appeler d'abord une interversion des
rôles. L'alphabet est l'œuvre et le cadeau d'un peuple de marchands
qui n'a pas laissé une seule page immortelle, qui n'a guère écrit que
comme le font les teneurs de livres; c'est au contraire un peuple de
poètes et d'artistes, les Grecs, qui ont lancé dans le monde les pre-
mières espèces monnayées, cette authentique et mobile représentation
de la valeur sans laquelle il nous semble aujourd'hui que tout com-
merce un peu développé soit presque impossible.

Les Phéniciens n'eussent-ils fait à la civilisation d'autre présent
que l'alphabet, cet apport suffirait encore à leur gloire. Ils n'en ont,
pour ce qui les concerne, tiré qu'un parti très restreint; mais ils l'ont
transmis à tous les peuples avec lesquels ils commerçaient; l'alphabet
a été pour eux un article d'exportation. Sur tout ce qu'ils fournissaient
à leurs clients de Grèce et d'Italie, ils ont cru toujours prélever une
grosse commission; ils se sont applaudis d'avoir su duper tous ces
peuples enfants qu'ils avaient mis dans leur dépendance; or il se
trouve, en fin de compte, que le bénéfice a été pour ceux qui bien des
fois se sont crus trompés et ont pensé perdre au marché. Ces trafiquants
faisaient payer les choses plus cher qu'elles ne valaient ; mais lorsque,
tout fiers du succès de leurs ruses, ils remettaient à la voile, ils n'en
laissaient pas moins derrière eux, comme compensation de leurs gains
exagérés et de leurs violences, cet alphabet à l'aide duquel les Grecs
créeront la philosophie, l'histoire et la science; ils laissaient des figu-
rines de bronze, d'ivoire, de terre émaillée ou de pierre, des vases
d'argile ou de métal, peints ou ciselés, qui suggéraient l'idée de certains
types divins, qui éveillaient le goût de l'art et le sentiment de la forme
chez ce peuple dont les sculpteurs s'appelleront Phidias et Praxitèle; à
toutes les industries naissantes auxquelles on s'essayait au sein de ces
tribus, ils laissaient des matières à mettre en œuvre, des modèles à
imiter et des outils qui devaient faciliter la tâche. Le plus difficile,
pour les apprentis qui auraient l'ambition de copier ces modèles, ce
serait de retrouver les procédés par lesquels avaient été exécutés ces
meubles, ces armes, ces bijoux et ces instruments de toute sorte. On
tentait d'y réussir par la patience et le tâtonnement; mais il arrivait
aussi que l'on profilât de quelque leçon professionnelle involontaire-
 
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