ARCHÏTECTURE DE LA MAISON
PLANCHE LVI.
Les Planches précedentes renferroent
des emblêmes propres aux lieux particuliers
auxquels elles servent d ornemens : Celle-ci
contient une instrudtion generale pour tous
les hommes ; Aussi est-elle placée dans un
lieu ouvert à toute sorte de gens. C’est la
Frife qui est au destus du Portail de la Sale
des Bourgeois du côté du grand Escalier. Elle
représente tout le Cours de la vie humaine
lous l’emblême des quatre saisons. L’Espacede
tems que chacun a à paster lur la terre, est
figuré par le sablier que lon voit au milieu.
Ensuite les difterens âges de la vie sont mar-
quez par les diffe'rens Rameaux qui compo-
sent la Frise. Le premier, qui n’a que des
sseurs , marque le printems de la vie, c’est-à-
dire la Jeuneste, qui n’a rien que de brillant
8c de beau ; mais qui paste aussi vîte qu’une
fleur, & sur laquelle on ne doit pas compter
beaucoup. Lesecond, qui est chargé d’Epics,
ü gros & si pleins qu’ils sont tous penchez
vers laterre, représente l’Eté de la vie,c’est-
à-dire lage viril, dans lequell’homme a tou-
te la vigueur nécessaire pour travaister à un
solide établistement. Le troisieme, qui est
tout couvert de raisins 8c d’autres fruits, mar-
que i’Automne de notre âge, c’est-à-dire, le
tems de la vie où les forces commencent à di-
minuer, où ii faut avoir fait provision de tout
ce qui est nécessaire pour paster le reste de
ses jours heureusèment, si son ne veut être
miserable dans la vieiileste. C’est dans cette
arriere-saison de la vie, s’il est permis de par-
ler ainsi , que l’on doit jouïr du fruit de ses tra-
vaux, sous peine de n’avoir jamais aucun re-
pos dans la suite. Enfin le quatrieme rameau
sec & sans feuilles, 8c qui paroît coupé, re-
présente fort bien la vieillesfe-, cet hiverdela
vie humaine, durant lequel il n’y a plus ni
feuilles ni fruits, ni seve qui puisse en produi-
re de nouveaux , tellement qu’il n’y a plus
que la mort à attendre.
PLANCHE LVII.
Cette Planche, qui est sur la porte de la
Chambre des Assûrances, est le véritable
iÿmbole des Assûreurs. C’est Arion, excel-
lent joueur de Lyre , natif de Methymne
dans l’Ile de Lesbos , & qui étoit si asturé de
l’effet prodigieux de l’harmonie de cet instru-
ment, qu’il ne craignoit aucun danger. Voi-
ci ce qu’on raconte de son Histoite, s’il est
vrai que c’en soit une, & non pas une Fabie,
comme on doit plûtôt le présumer. Premie-
rcment il demeura long-tems à la Cour de
Periandre, Roi de Corinthe ; puis il pastà en
Italie & en Sicile, où il gagna de grandes
lommes d’argent. II retourna ensuite à Co-
rinthe r 8c comme il en revenoit, il fut jetté
dans îa Mer, par les Matelots du Vaistearà
qui le portoit, qui en vouloient à les Riches
ses. Mais un Daufin , charmé de l’harmo-
nie de sa I.yre 8c de sa voix, se rencontra là
fort à propos pour le recevoir, & le porta
sur son dos jusqu’au Cap de Tenare. La Fa-
ble ajoûte qu’il étoit si assûré au milieu des
Flots, qu’il ne cessa pas un moment dejouër
de son Instrument, sansdoute, pour engager
le Daufin à ne pas le renverser dans la Mer.
Mais il y a lieu de s’étonner, que cet Ani-
mal, si Amateur de la Symphonie, ait pu se
relbudre à se defaire de son Musicien, en le
portant à terre, comme il fit. L’aplication.
de cette Fable à ceuxquon appelleAJfûreurs
dans le Ne'goce, n’est pas tout-à-fait sans
fondement. Semblables à Arion ces gens-Ià
sont intrepides pour ainsi dire au milieu des
Flots, par la hardiesse qu’ils ont de se rendre
garants des Marchandises qui arrivent par
Mer, 8c d’oser braver le hazard de la tempê-
te’& du naufrage. Comme Arion,ils gagnent
aussi la plûpart beaucoup de bien,& s’il vient
un coup qui les renverse, comme lui, dans la
Mer ; un autre coup, c’est-à-dire quelque au-
tre Vaisseau qui arrive heureusement les de-
dommage de la perte qu’ils ont faite, comme le
Daufin sauva la vie au fabuleux Arion.
PLANCHE LVIII.
Cette autre Fable n’a pas plus de fonde-*
ment que la premiere, mais ellesortdumoins
à nous instruire des funestes effets de la mau-
vaise conduite 8c de la trop grande présomp-
tion. On y voit la Chute d’Icare, conduit
au milieu des airs par son PereDedale, qui
ne put lui sauver la vie, par toute la force de
son Art. Voici ce que les Poëtes nous en ra-
content. Dedale eftoit un ouvrier d’Athenes,
fort ingenieux, qui inventa plusieurs Instru-
mens de Mathé'matiques , 8c fit même des
Statuës mouvantes. Son nom en devint si cé-
lebre, que craignant d’être obscurci, par le
Genie d’un de sos Neveux, qui avoit aussi
beaucoup d’habileté, il le jetta par une fenê-
tre, & s’enfuit en Candie avec lon Fils Icare.
Ce fut-là qu’il bâtit cet ingenieux Labyrinthe
dont les Poètes ont tant parle, 8c où il fut
lui-même renfermé , parce qu’Icare servoit
Pasiphaé dans ses amours. ToutefoisDedale
so sauva par Mer si fubtilement avec son Fils,
qu’on crat qu’il s’étoit envolé, 8c qu’il s’étoic
apliqué des aîles. La Fable ajoûte qu’Icare
n’ayant pas bien suivi ses ordres, 8c s’étant
trop élevé, la chaleur du Soleil fondit la ci-
re de ses aîles, en sorte qu’il tomba dans Ia
Mer. Tel est le sujet de ce Tableau, oùl’on
voit ce preTomptueux mortel précipité du mi-
lieu des airs, pour le punir de son extravagan-
te témerité. Cette peinture est placée sor la
porte de la Chambre de Desolation, 8c re-
présente fort biçn k miforable état de certai-
I ' nes
PLANCHE LVI.
Les Planches précedentes renferroent
des emblêmes propres aux lieux particuliers
auxquels elles servent d ornemens : Celle-ci
contient une instrudtion generale pour tous
les hommes ; Aussi est-elle placée dans un
lieu ouvert à toute sorte de gens. C’est la
Frife qui est au destus du Portail de la Sale
des Bourgeois du côté du grand Escalier. Elle
représente tout le Cours de la vie humaine
lous l’emblême des quatre saisons. L’Espacede
tems que chacun a à paster lur la terre, est
figuré par le sablier que lon voit au milieu.
Ensuite les difterens âges de la vie sont mar-
quez par les diffe'rens Rameaux qui compo-
sent la Frise. Le premier, qui n’a que des
sseurs , marque le printems de la vie, c’est-à-
dire la Jeuneste, qui n’a rien que de brillant
8c de beau ; mais qui paste aussi vîte qu’une
fleur, & sur laquelle on ne doit pas compter
beaucoup. Lesecond, qui est chargé d’Epics,
ü gros & si pleins qu’ils sont tous penchez
vers laterre, représente l’Eté de la vie,c’est-
à-dire lage viril, dans lequell’homme a tou-
te la vigueur nécessaire pour travaister à un
solide établistement. Le troisieme, qui est
tout couvert de raisins 8c d’autres fruits, mar-
que i’Automne de notre âge, c’est-à-dire, le
tems de la vie où les forces commencent à di-
minuer, où ii faut avoir fait provision de tout
ce qui est nécessaire pour paster le reste de
ses jours heureusèment, si son ne veut être
miserable dans la vieiileste. C’est dans cette
arriere-saison de la vie, s’il est permis de par-
ler ainsi , que l’on doit jouïr du fruit de ses tra-
vaux, sous peine de n’avoir jamais aucun re-
pos dans la suite. Enfin le quatrieme rameau
sec & sans feuilles, 8c qui paroît coupé, re-
présente fort bien la vieillesfe-, cet hiverdela
vie humaine, durant lequel il n’y a plus ni
feuilles ni fruits, ni seve qui puisse en produi-
re de nouveaux , tellement qu’il n’y a plus
que la mort à attendre.
PLANCHE LVII.
Cette Planche, qui est sur la porte de la
Chambre des Assûrances, est le véritable
iÿmbole des Assûreurs. C’est Arion, excel-
lent joueur de Lyre , natif de Methymne
dans l’Ile de Lesbos , & qui étoit si asturé de
l’effet prodigieux de l’harmonie de cet instru-
ment, qu’il ne craignoit aucun danger. Voi-
ci ce qu’on raconte de son Histoite, s’il est
vrai que c’en soit une, & non pas une Fabie,
comme on doit plûtôt le présumer. Premie-
rcment il demeura long-tems à la Cour de
Periandre, Roi de Corinthe ; puis il pastà en
Italie & en Sicile, où il gagna de grandes
lommes d’argent. II retourna ensuite à Co-
rinthe r 8c comme il en revenoit, il fut jetté
dans îa Mer, par les Matelots du Vaistearà
qui le portoit, qui en vouloient à les Riches
ses. Mais un Daufin , charmé de l’harmo-
nie de sa I.yre 8c de sa voix, se rencontra là
fort à propos pour le recevoir, & le porta
sur son dos jusqu’au Cap de Tenare. La Fa-
ble ajoûte qu’il étoit si assûré au milieu des
Flots, qu’il ne cessa pas un moment dejouër
de son Instrument, sansdoute, pour engager
le Daufin à ne pas le renverser dans la Mer.
Mais il y a lieu de s’étonner, que cet Ani-
mal, si Amateur de la Symphonie, ait pu se
relbudre à se defaire de son Musicien, en le
portant à terre, comme il fit. L’aplication.
de cette Fable à ceuxquon appelleAJfûreurs
dans le Ne'goce, n’est pas tout-à-fait sans
fondement. Semblables à Arion ces gens-Ià
sont intrepides pour ainsi dire au milieu des
Flots, par la hardiesse qu’ils ont de se rendre
garants des Marchandises qui arrivent par
Mer, 8c d’oser braver le hazard de la tempê-
te’& du naufrage. Comme Arion,ils gagnent
aussi la plûpart beaucoup de bien,& s’il vient
un coup qui les renverse, comme lui, dans la
Mer ; un autre coup, c’est-à-dire quelque au-
tre Vaisseau qui arrive heureusement les de-
dommage de la perte qu’ils ont faite, comme le
Daufin sauva la vie au fabuleux Arion.
PLANCHE LVIII.
Cette autre Fable n’a pas plus de fonde-*
ment que la premiere, mais ellesortdumoins
à nous instruire des funestes effets de la mau-
vaise conduite 8c de la trop grande présomp-
tion. On y voit la Chute d’Icare, conduit
au milieu des airs par son PereDedale, qui
ne put lui sauver la vie, par toute la force de
son Art. Voici ce que les Poëtes nous en ra-
content. Dedale eftoit un ouvrier d’Athenes,
fort ingenieux, qui inventa plusieurs Instru-
mens de Mathé'matiques , 8c fit même des
Statuës mouvantes. Son nom en devint si cé-
lebre, que craignant d’être obscurci, par le
Genie d’un de sos Neveux, qui avoit aussi
beaucoup d’habileté, il le jetta par une fenê-
tre, & s’enfuit en Candie avec lon Fils Icare.
Ce fut-là qu’il bâtit cet ingenieux Labyrinthe
dont les Poètes ont tant parle, 8c où il fut
lui-même renfermé , parce qu’Icare servoit
Pasiphaé dans ses amours. ToutefoisDedale
so sauva par Mer si fubtilement avec son Fils,
qu’on crat qu’il s’étoit envolé, 8c qu’il s’étoic
apliqué des aîles. La Fable ajoûte qu’Icare
n’ayant pas bien suivi ses ordres, 8c s’étant
trop élevé, la chaleur du Soleil fondit la ci-
re de ses aîles, en sorte qu’il tomba dans Ia
Mer. Tel est le sujet de ce Tableau, oùl’on
voit ce preTomptueux mortel précipité du mi-
lieu des airs, pour le punir de son extravagan-
te témerité. Cette peinture est placée sor la
porte de la Chambre de Desolation, 8c re-
présente fort biçn k miforable état de certai-
I ' nes