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Revue archéologique — 7.1863

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Boissier, Gaston: Atticus éditeur de Cicéron
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https://doi.org/10.11588/diglit.22427#0104

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96 REVUE ARCHÉOLOGIQUE.

voyait son livre à Atticus. « J'ai revu avec beaucoup de soin mon
ouvrage, lui écrit-il au sujet clu De oratore, je l'ai gardé longtemps
sous mes yeux, vous pouvez le faire copier (1). » Remarquons ces
derniers mots, describas licet; il ressemblent tout à fait à ce que nous
appelons aujourd'hui le bon à tirer.

Atticus mettait alors ses esclaves à l'œuvre, et il ne faudrait pas
croire qu'il ne leur fît transcrire qu'une seule copie de l'ouvrage et
qu'il les fît travailler pour lui seul; Cicéron dit textuellement et plus
d'une fois le contraire. A propos d'une faute qui s'était glissée clans
YOrator, où il attribuait au poëte Eupolis des vers qui sont d'Aristo-
phane, il écrit à Atticus : « Vous me ferez plaisir si vos copistes
mettent le nom d'Aristophane au lieu de celui d'Eupolis, non-seule-
ment sur votre exemplaire, mais sur celui des autres (2). » 11 s'exprime
delà même façon quand il veut rectifier une erreur qui lui était
échappée dans lepro Ligario : « Chargez Pharnace, Antée, Salvius,
d'enlever la faute de tous les exemplaires (3). » Voilà qui nous prouve
suffisamment qu'Atticus ne faisait pas seulement transcrire chez lui
les exemplaires destinés à sa bibliothèque et qu'il travaillait aussi
pour les autres. Mais est-il à supposer que ce fût simplement un
service d'ami qu'il leur rendait, et peut-on croire qu'il leur distri-
buait gratuitement ces exemplaires qu'il faisait ainsi copier? Outre
qu'une pareille générosité ne semble pas dans les habitudes d'Atti-
cus, le ton que prend Cicéron à cette occasion ne permet pas d'y
croire. « Vous donnerez mon livre à .Lucceius, lui dit-il fort sèche-
ment et d'un ton impératif (4). » — « Vous aurez soin que mon livre
soit à Athènes, et dans les autres villes de la Grèce (5). » Est-ce la
façon dont on parle aux gens, quand on leur demande de faire quel-
que cadeau? Est-il naturel de disposer ainsi de leurs biens et de leur
imposer des libéralités avec ce sans-gêne? Il est évident qu'Atticus
ne donnait pas, mais qu'il vendait les ouvrages de Cicéron, et l'on
peut même conclure du dernier texte qu'à la façon des éditeurs mo-
dernes, il avait des correspondants dans les villes importantes, ce
qui suppose un commerce fort étendu et régulièrement organisé. Il
y a, dans les lettres de Cicéron, un autre passage qui prouve plus

(1) Ad AU., IV, 13.

(2) Id., XII, 6.

(3) Id., XIII, hk. M. Gérand, dans son excellent Essai sur les livres dans Vanti-
quité (Paris, Techener, 1840), fait remarquer que les exemplaires doivent être assez
nombreux, puisque trois copistes furent employés à y effacer un seul nom.

[k) Id., IV, 11.
(5) Id., II, 1.
 
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