Recueil des notices et mémoires de la Société Archéologique de la Province de Constantine (Sér. 2,4=14.1870)

mise d'une rançon de 900 piastres le décidèrent à rendre
la liberté à la jeune personne, qui fut ramenée à Alger
avec ses domestiques. »

Nous venons de remarquer, dans le récit authentique
qui précède, que les Turcs n'obtenaient satisfaction des
Kabiles que par l'intermédiaire conciliant de leurs ma-
rabouts. Celui de Bougie, qui contribua le plus à la
délivrance de mademoiselle de Bourk et de sa suite, doit
être évidemment Sidi Amokran, qui, dès le xvie siècle,
jouissait d'une grande réputation de sainteté et dont nous
aurons bientôt longuement à nous entretenir.

En flattant l'amour-propre de ces personnages religieux
par des cadeaux et des compliments emphatiques, en leur
constituant des apanages seigneuriaux pour satisfaite en
même temps leur cupidité, les Turcs se créaient ainsi des
alliés assez fidèles, dont le concours était fort utile pour
mettre un frein à l'esprit indépendant et, en même temps,
turbulent des Kabiles.

Pendant l'une de nos dernières expéditions dans la
Kabilie orientale, en 1865, j'ai cherché avec soin à me
rendre compte de l'influence que les beys de Constantine
et les pachas d'Alger avaient pu exercer sur ces popu-
lations à demi-sauvages, à quelle époque remontait cette
influence et jusqu'où elle avait pénétré. Les Kabiles sont
tous illétrés, on peut l'affirmer sans crainte d'être con-
tredit ; mais il y a parmi eux de nombreuses familles de
marabouts avec lesquelles les Turcs durent par nécessité
entrer en relations, afin d'utiliser leur crédit pour do-
miner, si ce n'est de fait, au moins par la forme, les
masses des tribus. J'ai vu presque tous ces marabouts à
tour de rôle, dans nos camps, et j'ai obtenu communi-