AU MUSÉE GUIMET
graphe, de peintre et d’écrivain, union de talents qui n’est pas rare en Chine où chacun d’eux
était l’indice d’une culture plutôt que d’un métier. Habile dans l’art de tracer des caractères
comme dans celui de manier les formes ou les mots, le parfait lettré avait au bout de son
pinceau plusieurs moyens d’expression également valables, qu’il se plaisait souvent comme
ici à grouper en un même ouvrage.
Siu Wei dit de lui-même : « La calligraphie est le premier de mes talents, puis vient
la poésie, ensuite la prose, et en dernier la peinture. » Ce jugement n’a pas toujours été ratifié
par la postérité, qui a souvent mis en première place les œuvres peintes par cet artiste. Comme
on peut le voir sur celle que nous reproduisons, sa manière est violente et toute d’inspiration.
L’encre y joue en larges coulées, en paquets, en touches épaisses ou transparentes entre
lesquelles le blanc du papier met çà et là des nervures de lumière. D’éléments informes sort
une image vivante et solidement construite. Les feuilles déchiquetées se balancent dans
l’air et dressent un bouquet de palmes caoutchouteuses. Tout est jeté comme au hasard,
mais le hasard n’est là que la libre expression d’un don qui traduit par des touches sommaires
l’essentiel d’une forme sans s’attacher à sa figuration précise et détaillée. Pratiquée en Chine
dès les premiers Song, cette manière de peindre est désignée par un terme technique, «sie-yi»,
qui signifie «exprimer l’idée», autrement dit «évoquer non pas l’image objective d’une chose
mais son essence ».
Siu Wei fut à l’époque Ming un des meilleurs représentants du sie-yi, qui convenait
à sa nature déréglée. D’abord fonctionnaire estimé, il avait de bonne heure abandonné la
carrière administrative pour se jeter dans l’ivrognerie et le vagabondage, où sa fougue poé-
tique, libérée de toute contrainte, réussit à le sauver de la déchéance sinon de la misère.
Les collections chinoises sont riches en œuvres de lui. L’Europe en possède cinq :
trois peintures sont à Stockholm, une à Berlin, et celle-ci à Paris.
Paire de paravents du type Taga sodé (Japon, xvne siècle). Partie droite.
graphe, de peintre et d’écrivain, union de talents qui n’est pas rare en Chine où chacun d’eux
était l’indice d’une culture plutôt que d’un métier. Habile dans l’art de tracer des caractères
comme dans celui de manier les formes ou les mots, le parfait lettré avait au bout de son
pinceau plusieurs moyens d’expression également valables, qu’il se plaisait souvent comme
ici à grouper en un même ouvrage.
Siu Wei dit de lui-même : « La calligraphie est le premier de mes talents, puis vient
la poésie, ensuite la prose, et en dernier la peinture. » Ce jugement n’a pas toujours été ratifié
par la postérité, qui a souvent mis en première place les œuvres peintes par cet artiste. Comme
on peut le voir sur celle que nous reproduisons, sa manière est violente et toute d’inspiration.
L’encre y joue en larges coulées, en paquets, en touches épaisses ou transparentes entre
lesquelles le blanc du papier met çà et là des nervures de lumière. D’éléments informes sort
une image vivante et solidement construite. Les feuilles déchiquetées se balancent dans
l’air et dressent un bouquet de palmes caoutchouteuses. Tout est jeté comme au hasard,
mais le hasard n’est là que la libre expression d’un don qui traduit par des touches sommaires
l’essentiel d’une forme sans s’attacher à sa figuration précise et détaillée. Pratiquée en Chine
dès les premiers Song, cette manière de peindre est désignée par un terme technique, «sie-yi»,
qui signifie «exprimer l’idée», autrement dit «évoquer non pas l’image objective d’une chose
mais son essence ».
Siu Wei fut à l’époque Ming un des meilleurs représentants du sie-yi, qui convenait
à sa nature déréglée. D’abord fonctionnaire estimé, il avait de bonne heure abandonné la
carrière administrative pour se jeter dans l’ivrognerie et le vagabondage, où sa fougue poé-
tique, libérée de toute contrainte, réussit à le sauver de la déchéance sinon de la misère.
Les collections chinoises sont riches en œuvres de lui. L’Europe en possède cinq :
trois peintures sont à Stockholm, une à Berlin, et celle-ci à Paris.
Paire de paravents du type Taga sodé (Japon, xvne siècle). Partie droite.