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Revue des beaux-arts de France: Periodica — Nr. 7-9.1943/​1944

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Nr. 8 (Decembre 1943-Janvier 1944)
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Portrait d'artiste
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Hautecoeur, Louis: Maurice Denis
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https://doi.org/10.11588/diglit.48496#0092

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PORTRAIT D’ARTISTE

gnirent Vuillard, René Piot, Maillol, Roussel, s’in-
titulaient, dans l’enthousiasme de leur jeunesse, des
prophètes, des nabis. Méprisant le naturalisme, sou-
cieux d’idéal et de beauté, épris de musique et de
poésie, Maurice Denis, dès 1890, publia un article
où il définissait l’attitude de son groupe. L’art
propose des symboles, non pas des symboles lit-
téraires, qui sont, au vrai, des allégories, mais des
symboles plastiques; il traduit et provoque des états
d’âme au moyen des couleurs et des formes. Il doit
donc transposer et suivre l’exemple de Cézanne, et
voilà que Denis, invoquant le vieux maître d’Aix,
lui dédie bientôt un hommage que possède le Musée
d’Art moderne. Ces couleurs et ces formes qui sont
soumises à des lois, il les faut assembler en un cer-
tain ordre ; il faut composer — ce que n’ont pas
fait les naturalistes et les impressionnistes — com-
poser, c’est déjà décorer. Et ces artistes se réclament
de M. Ingres et disent leur admiration pour
Pu vis de Chavannes et, par delà le xvie siècle
académique, pour les quattrocentistes, pour l’An-
gelico et pour les maîtres du moyen âge.
Le symbolisme n’alla pas sans quelques exagérations et conduisit trop souvent à
une conception décadente de l’art et amorale de la vie. Maurice Denis sut éviter tous les
excès ; il avait pour soutiens une solide éducation classique et sa foi chrétienne. Au moment
où l’école romane abandonnait le symbolisme, Maurice Denis visitait l’Italie en compagnie
de Gide. Le symbolisme lui avait appris qu’il fallait ordonner; les maîtres de jadis lui révé-
lèrent comment il fallait composer. Du symbolisme il conserva le goût de l’émotion, de
la pensée, de la poésie. Son classicisme ne fut jamais un classicisme vide, un académisme
d’école. Ses décorations de l’hôtel Morosov à Moscou, ses Bacchanales montrent avec
quelle science et quelle jeunesse il sut traiter le vieux thème de Psyché ou les sujets favoris
de Poussin. Ce classicisme lui épargna les tâtonnements de ses cadets. S’il ne croyait pas
qu’il suffise de copier la réalité pour exécuter un tableau, il ne voulait pas qu’on procédât
par simples allusions à la nature ou même qu’on s’évadât en un monde d’abstractions.
Son art est fait d’équilibre.
Le symbolisme aimait le mystère. Ne disposait-il pas à la peinture religieuse ? Dès
ses premières œuvres, Denis avait célébré le mystère catholique : cette vierge annoncée,
combien de fois ne l’a-t-il pas représentée dans son humble maison comme sur la terrasse


Portrait de Maurice Denis et de Sérusier
(Détail de Y Dommage à Césanne).

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