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Le rire: journal humoristique — 1.1894-1895 (Nr. 1-52)

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https://doi.org/10.11588/diglit.25062#0600

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Départeme”*!, 9 fr. Étranger, 11 fr.

Six moi» : France, 5 fr.Étranger, 6 fr.

LE IRIIRIE

JOURNAL. HUMORISTIQUE ILLUSTRÉ PARAISSANT LE SAMEDI
M. Félix JUVEN, Directeur. — Partie artistique : M. Arsène ALEXANDRE

10, rue Saint-Joseph, 10
PARIS

Lesmanuscrits et dessins non
insérés ne sont pas rendus.

LA GAGE AUX SINGES

« Tiens ! Jette leur une poignée de noisettes.
Tu vas les voir courir à quatre pattes. »
Alphonse Daudet (L’Immortel).

Les.fêtes du centenaire de l’Institut ne se sont pas terminées
samedi dernier, comme l’ont annoncé les journaux par une erreur
d’information.

Après un jour de repos, elles ont recommencé lundi encore
plus brillamment par un numéro d’un genre tout nouveau et ap-
pelé au plus vif succès.

Sous la coupole du palais Mazarin, habilement transformée par
l’architecte-académicien Charles Garnier, en une spacieuse cage
pleine d’air et de lumière, a été inaugurée par M. Félix Faure,
assisté de MM. Poincaré et Roujon, l’Exposition des Académi-
ciens.

On avait jugé, en effet, que le public, ne connaissant les Immor-
tels que de réputation, et encore pas tous il s’en faut, l’occasion
était Donne pour les lui montrer pendant quelques jours. L’on sait
que personne ne peut assister aux séances de l’Académie, sinon
M. Sarcey et quelques dames auxquelles M. Pingard veut du
bien.

Quant au commun des mortels, il se brosse pour voir les Im-
mortels. La queue, les jours de séance, c’est une frime; des figu-
rants que l’Institut paie avec de vieux rapports sur les prix de
vertus et les discours de réception. Ça se revend au kilo et cela
fait d’excellents cornets.

Donc, par exception, et pendant huit jours seulement, les pas-
sants vont pouvoir entrer et visiter cette curieuse exhibition, rien
qu’en exhibant leur carte d’électeur. Les bonnes d’enfants sont
toutefois admises grâce à l’intervention de M. Alexandre Dumas,
et les militaires, les petits pioupious, sur la demande de M. Fran-
çois Coppée.

A la cérémonie d'inauguration, M. Poincaré a prononcé un de
ces discours dont il a le secret, et que le Temps, faute de place,
n’a pu encore insérer. 11 a, en résumé, fait l’éloge de la vieillesse.

On nous assure que c’est simplement un de" ses nombreux éloges
de la jeunesse qui ont déjà servi, et qu’il n’a fait que remplacer
jeunesse par vieillesse. Le temps nous a manqué pour nous en as-
surer et jusqu’à présent nous nous refusons à y croire : on sait que
M. Poincaré n’est pas à un discours près.

M. Roujon n’a pas prononcé de discours. Il s’est contenté de
passer la main sur le dos des Académiciens les plus influents et
de demander avec beaucoup d’intérêt à M. Bouguereau, de l’Aca-
démie des Beaux-Arts, si Raphaël, ce grand peintre espagnol,
dont on parle tant, était mort depuis longtemps.

Le spectacle que présente l’Exposition est des plus originaux :

Autour de la salle sont aménagés de confortables boxes, avec
des grillages seulement pour les Académiciens méchants. Les
Immortels exposés, en grande tenue ; épée, claque et habit à queue
(prenante), peuvent, de leurs boxes, s’élancer sous la coupole, où
quelques cordes, trapèzes ou balançoires sont suspendus. M. Charles
Garnier, dont l’agilité est proverbiale, donne lui-même l’exemple ;
ses grimaces et ses calipètes sont à mourir de rire.

Les dames s’arrêtent avec beaucoup d’intérêt davant les cages
de M. Paul Bourget, Alexandre Dumas, Pailleron, Sardou, etc.
Elles évitent avec des petits cris celle de M. Brunetière et celle de
M. Challemel-Lacour.

Le box de M. Pierre Loti est vide, l’éminent marin étant comme
on sait, toujours en voyage, ou trop occupé à Paris.

Un détail touchant : un tout petit épicier de Montrouge vient
tous les jours visiter M. Coppée et lui apporter des morceaux de
sucre « cassés avec mélancolie. »

Bref, cette fête des plus réussies, clôture dignement la série du
centenaire, et nous ne saurions trop engager les lecteurs à visiter
l’Exposition. L’aveugle du Pont-des-Arts, qui a été sorti spéciale-
ment des armoires, est chargé" d’indiquer gratuitement le chemin
anx personnes qui ne savent pas où est l’Institut. Excellente pré-
caution. On trouve ce fonctionnaire du dix heures du matin à
quatre heures du soir, au commencement du pont, à droite. Pour
cinquante centimes, il exécute sur sa clarinette un hymne inédit,
écrit pour la circonstance, par M. Massenet

John Falstaff.
 
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