Pierre appela par trois fois le petit poisson. Le petit poisson ne
répondit pas. Il lui fallut l'appeler une quatrième.
Alors les eaux se partagèrent et le petit poisson apparut. Il n'a-
vait pas l'air content et ses écailles étaient toutes hérissées.
Pierre, sans lui demander de ses nouvelles, l'interpella aussitôt ■
« Je voudrais... je voudrais être Président de la République. »
RENTRE, C'EST FAIT, dit le petit poisson eu plongeant.
Pierre, tout bouleversé, reprit le chemin de sa maison.
Aux portes de la ville, il remarqua qu'il y avait plus de prome-
neurs qu'à l'ordinaire. Le temps s'était éclairci et toutes les personnes
saluaient respectueusement un beau landau à huit ressorts qui venait
à sa rencontre.
Le cocher et le valet de pied avaient des cocardes tricolores au
— Un maître d'hôtel lui indiqua sa place.
fallait l'entendre causer; elle charmait les invités par des phrases
spirituelles. Ah! ce poisson faisait bien les choses.
La tête de Pierre lui tournait de plaisir.
Il reprit ses sens cependant, au milieu du repas, alors que les
domestiques installèrent à table un immense poisson couché sur
— Le cocher et le valet de chambre avaient des cocardes tricolores,
chapeau et dans la voiture, une belle dame..., sa femme, qui
lui Ht signe de prendre place à côté d'elle.
Pierre tremblant d'émotion, un peu honteux de tant de gloire,
baissa les yeux et vit alors qu'il avait des guêtres blanches. Puis un
— en immense poisson. petit morceau de verre tout rond s'accrocha à son œil.
Bref, il était Président de la République et il devait inaugurer ce
jour-là, précisément, un hospice pour les pauvres pêcheurs,
un canapé de verdure et entouré de tranches de citron En se isabelle s'était trompée; on n'est pas heureux sur un trône. Ils
servant un morceau de cette magnifique 'T'P^tfp LnM,e ouverte virent de Pres les difficultés et les ennuis de leur situation. Isabelle
sur la tête de l'animal; il vit ces yeux terme* catebo ltl!« Vu ciu'il réfléchit profondément et demanda une chose singulière à Pierre.
Le cœur de Pierre se serra et une inquiétude le saisit, voua qu u
allait manger le camarade de son bienfaiteur! Ce n était vraiment
PaQuiesait?" Isabelle avait peut-être raison, et le petit poisson lui
devait une fameuse chandelle de n'être pas là, a la place de l autre,
sur de la verdure et entouré de tranches de citron. Apres tout,
c'était lui le sauveur.
Il reprit deux fois de la carpe.
Cm
^ - Ils virent de près les ennuis de leur situation.
Commettre une indiscrétion déplus vis-à-vis du petit poisson, cela
ne pouvait gêner Pierre! aussi s'en alla-t-ii de bonne heure de son
palais présidentiel pour explorer les bords de la rivière.
— Souvent réveillé par Isabelle. Le petit poisson, cette fois, ne répondit qu'au cinquième appel du
Président Pierre.
Le ménage fut heureux quelque temps; mais la richesse, seule, — Que me veux-tu encore?
ne suffit bientôt plus à Isabelle. — Je voudrais... je voudrais régner sur le ciel et la terre; c est
Elle devint ambitieuse. ma femme qui m'envoie vous le demander.
Isabelle rêva une situation splendide pour son mari. Or, Pierre — RENTRE, C'EST FAIT,
qui avait si bien dormi sur la paille de son tonneau fut, dès lors, Pierre, dont les jambes flageolaient, se liata comme il put de rega-
souvent réveillé par Isabelle qui le suppliait d'aller encore trouver gner son cabinet de travail pour réfléchir un peu. N'était-il pas cle-
le petit poisson. venu le Bon Dieu, tout d'un coup ?
— Que lui demanderons-nous de plus? disait Pierre. A la place du palais présidentiel, il vit une sorte de grand vélo-
— Je veux que tu sois Président de la République. drome et, au milieu, le tonneau d'autrefois, le tonneau ou il vivait
— Tu es folle, lui cria-t-il.
— Pas tant que cela, répondit Isabelle. Si je n'avais pas insisté,
nous habiterions encore la petite maison aux volets verts. Il est
aussi facile à ce poisson qui io doit la vie de faire de toi un chef
d'État que de t'offrir une petite ferme ou un château.
Elle tourmenta tellement Pierre, que Pierre se décida à parler au
petit animal.
Il faisait un temps bien sombre.
— II faisait un temps bien sombre. — L'aérostat disparut dans les' nuages.
répondit pas. Il lui fallut l'appeler une quatrième.
Alors les eaux se partagèrent et le petit poisson apparut. Il n'a-
vait pas l'air content et ses écailles étaient toutes hérissées.
Pierre, sans lui demander de ses nouvelles, l'interpella aussitôt ■
« Je voudrais... je voudrais être Président de la République. »
RENTRE, C'EST FAIT, dit le petit poisson eu plongeant.
Pierre, tout bouleversé, reprit le chemin de sa maison.
Aux portes de la ville, il remarqua qu'il y avait plus de prome-
neurs qu'à l'ordinaire. Le temps s'était éclairci et toutes les personnes
saluaient respectueusement un beau landau à huit ressorts qui venait
à sa rencontre.
Le cocher et le valet de pied avaient des cocardes tricolores au
— Un maître d'hôtel lui indiqua sa place.
fallait l'entendre causer; elle charmait les invités par des phrases
spirituelles. Ah! ce poisson faisait bien les choses.
La tête de Pierre lui tournait de plaisir.
Il reprit ses sens cependant, au milieu du repas, alors que les
domestiques installèrent à table un immense poisson couché sur
— Le cocher et le valet de chambre avaient des cocardes tricolores,
chapeau et dans la voiture, une belle dame..., sa femme, qui
lui Ht signe de prendre place à côté d'elle.
Pierre tremblant d'émotion, un peu honteux de tant de gloire,
baissa les yeux et vit alors qu'il avait des guêtres blanches. Puis un
— en immense poisson. petit morceau de verre tout rond s'accrocha à son œil.
Bref, il était Président de la République et il devait inaugurer ce
jour-là, précisément, un hospice pour les pauvres pêcheurs,
un canapé de verdure et entouré de tranches de citron En se isabelle s'était trompée; on n'est pas heureux sur un trône. Ils
servant un morceau de cette magnifique 'T'P^tfp LnM,e ouverte virent de Pres les difficultés et les ennuis de leur situation. Isabelle
sur la tête de l'animal; il vit ces yeux terme* catebo ltl!« Vu ciu'il réfléchit profondément et demanda une chose singulière à Pierre.
Le cœur de Pierre se serra et une inquiétude le saisit, voua qu u
allait manger le camarade de son bienfaiteur! Ce n était vraiment
PaQuiesait?" Isabelle avait peut-être raison, et le petit poisson lui
devait une fameuse chandelle de n'être pas là, a la place de l autre,
sur de la verdure et entouré de tranches de citron. Apres tout,
c'était lui le sauveur.
Il reprit deux fois de la carpe.
Cm
^ - Ils virent de près les ennuis de leur situation.
Commettre une indiscrétion déplus vis-à-vis du petit poisson, cela
ne pouvait gêner Pierre! aussi s'en alla-t-ii de bonne heure de son
palais présidentiel pour explorer les bords de la rivière.
— Souvent réveillé par Isabelle. Le petit poisson, cette fois, ne répondit qu'au cinquième appel du
Président Pierre.
Le ménage fut heureux quelque temps; mais la richesse, seule, — Que me veux-tu encore?
ne suffit bientôt plus à Isabelle. — Je voudrais... je voudrais régner sur le ciel et la terre; c est
Elle devint ambitieuse. ma femme qui m'envoie vous le demander.
Isabelle rêva une situation splendide pour son mari. Or, Pierre — RENTRE, C'EST FAIT,
qui avait si bien dormi sur la paille de son tonneau fut, dès lors, Pierre, dont les jambes flageolaient, se liata comme il put de rega-
souvent réveillé par Isabelle qui le suppliait d'aller encore trouver gner son cabinet de travail pour réfléchir un peu. N'était-il pas cle-
le petit poisson. venu le Bon Dieu, tout d'un coup ?
— Que lui demanderons-nous de plus? disait Pierre. A la place du palais présidentiel, il vit une sorte de grand vélo-
— Je veux que tu sois Président de la République. drome et, au milieu, le tonneau d'autrefois, le tonneau ou il vivait
— Tu es folle, lui cria-t-il.
— Pas tant que cela, répondit Isabelle. Si je n'avais pas insisté,
nous habiterions encore la petite maison aux volets verts. Il est
aussi facile à ce poisson qui io doit la vie de faire de toi un chef
d'État que de t'offrir une petite ferme ou un château.
Elle tourmenta tellement Pierre, que Pierre se décida à parler au
petit animal.
Il faisait un temps bien sombre.
— II faisait un temps bien sombre. — L'aérostat disparut dans les' nuages.
Werk/Gegenstand/Objekt
Titel
Titel/Objekt
Le Pauvre Pêcheur où les tristes conséquences d’une ambition démesurée. Conte de Noël
Weitere Titel/Paralleltitel
Serientitel
Le rire: journal humoristique
Sachbegriff/Objekttyp
Inschrift/Wasserzeichen
Aufbewahrung/Standort
Aufbewahrungsort/Standort (GND)
Inv. Nr./Signatur
G 3555 Folio RES
Objektbeschreibung
Maß-/Formatangaben
Auflage/Druckzustand
Werktitel/Werkverzeichnis
Herstellung/Entstehung
Künstler/Urheber/Hersteller (GND)
Entstehungsdatum (normiert)
1897 - 1897
Entstehungsort (GND)
Auftrag
Publikation
Fund/Ausgrabung
Provenienz
Restaurierung
Sammlung Eingang
Ausstellung
Bearbeitung/Umgestaltung
Thema/Bildinhalt
Thema/Bildinhalt (GND)
Literaturangabe
Rechte am Objekt
Aufnahmen/Reproduktionen
Künstler/Urheber (GND)
Reproduktionstyp
Digitales Bild
Rechtsstatus
In Copyright (InC) / Urheberrechtsschutz
Creditline
Le rire, 4.1897-1898, No. 164 (25 Décembre 1897), S. 3
Beziehungen
Erschließung
Lizenz
CC0 1.0 Public Domain Dedication
Rechteinhaber
Universitätsbibliothek Heidelberg