Le roi Marlce, averti par l’astucieux Melot, les surprend au milieu de leurs épanchements. •
Blesse par Melot, Tristan meurt et Yseult fait la même chose que lui.'Melot est tué par Kourwenal... Kourwenal meurt à son tour. Enfin. tout 1
monde meurt. Dessin de j_ Engei^
LE DERNIER JOUR
J’eus dernièrement le triste privilège d’assister aux derniers mo-
ments que l’infortuné Emile passa au milieu de nous.
Tous les détails de cette lugubre matinée sont encore présents à
mon esprit et je ne me souviens pas d’avoir jamais éprouvé de plus
fortes émotions que ce jour-là.
A quatre heures du matin, on vint réveiller Emile qui dormait
encore profondément.
11 bondit sur son lit, promena autour de lui des yeux hagards et
demanda d’une voix épouvantée :
— Qu’est-ce qu’il y a?
— C’est pour aujourd’hui, mon pauvre garçon. Du courage!
Emile se souvint et dit simplement :
— J’en aurai.
On lui demanda s’il voulait voir sa mère.
Emile reprit un peu d’assurance et répondit :
— Non, ne la prévenez pas, cela lui ferait trop de peine.
11 but avidement un verre de rhum qu’on lui tendait, alluma une
cigarette et s’habilla.
Puis il sortit de sa chambre et on le mena dans une grande salle
où un homme, en bras de chemise, l’attendait armé de ciseaux.
Emile s’assit sur une chaise et on commença à lui couper les che-
veux. Un tic nerveux lui convulsait la face chaque fois qu’il sentait
sur sa nuque le froid des ciseaux. C’èSt qu’il ne faisait guère chaiidce
matin-Jà. O la lugubre toilette, dans ce petit jour sale qui se levait
comme à regret ! Pourquoi faut-il ce petit supplice ajouté aux autres,
hélas !
Enfin, comme tout était fini, on sortit sur la place.
Emile ne tremblait plus, il marchait vite, les yeux fixés devant
lui, et cependant quelles devaient être ses pensées, à ce pénible,
moment !
D’autres en arrivent là, poussés par leur famille indigne, ou d’eux-
mêmes, entraînés par quelque mobile, pour une femme... souvent,
parfois par désespoir, et bien souvent aussi par suite de leur mau-
vaise conduite. Mais Emile, lui, n’avait rien fait, semblait-il, n’avait
rien demandé; pourquoi donc alors devait-il, dans la fleur de l’âge,
payer comme les autres sa dette de sang à la société ? 11 n’était point
cruel, n’avait point envie de tuer son prochain, alors pourquoi?
Là-bas, les gendarmes attendaient, et plus loin, de la troupe : un
officier, des soldats baïonnette au canon, tous semblant regietteiy
dans ce matin blafard, la pénible corvée dont ils étaient chargés.
Près du trottoir, un fourgon stationnait, et, retenus par les agents,
la foule des curieux se pressait pour mieux voir.-
Devant Emile, deux montants se dressaient, tels ceux d’une porto
entre les barrières et entre eux quelque chose brillait, des uniformes
peut-être, là-bas*
Emile nous serra une dernière fois les mains puis, se détournant,
marcha résolument.
Au moment où il arrivait, un homme le saisit et le poussa brus-
quement en avant.
Emile disparut et, comme, fort heureusement, pour nous, nous ne
pouvions,pas le suivre, nous restâmes encore là un moment à-regai*
les autres ‘ bleus de la classe qui arrivaient •‘un1 à un à lu porte dm
bastion. "P * A
YV. de Pawlowski.
Blesse par Melot, Tristan meurt et Yseult fait la même chose que lui.'Melot est tué par Kourwenal... Kourwenal meurt à son tour. Enfin. tout 1
monde meurt. Dessin de j_ Engei^
LE DERNIER JOUR
J’eus dernièrement le triste privilège d’assister aux derniers mo-
ments que l’infortuné Emile passa au milieu de nous.
Tous les détails de cette lugubre matinée sont encore présents à
mon esprit et je ne me souviens pas d’avoir jamais éprouvé de plus
fortes émotions que ce jour-là.
A quatre heures du matin, on vint réveiller Emile qui dormait
encore profondément.
11 bondit sur son lit, promena autour de lui des yeux hagards et
demanda d’une voix épouvantée :
— Qu’est-ce qu’il y a?
— C’est pour aujourd’hui, mon pauvre garçon. Du courage!
Emile se souvint et dit simplement :
— J’en aurai.
On lui demanda s’il voulait voir sa mère.
Emile reprit un peu d’assurance et répondit :
— Non, ne la prévenez pas, cela lui ferait trop de peine.
11 but avidement un verre de rhum qu’on lui tendait, alluma une
cigarette et s’habilla.
Puis il sortit de sa chambre et on le mena dans une grande salle
où un homme, en bras de chemise, l’attendait armé de ciseaux.
Emile s’assit sur une chaise et on commença à lui couper les che-
veux. Un tic nerveux lui convulsait la face chaque fois qu’il sentait
sur sa nuque le froid des ciseaux. C’èSt qu’il ne faisait guère chaiidce
matin-Jà. O la lugubre toilette, dans ce petit jour sale qui se levait
comme à regret ! Pourquoi faut-il ce petit supplice ajouté aux autres,
hélas !
Enfin, comme tout était fini, on sortit sur la place.
Emile ne tremblait plus, il marchait vite, les yeux fixés devant
lui, et cependant quelles devaient être ses pensées, à ce pénible,
moment !
D’autres en arrivent là, poussés par leur famille indigne, ou d’eux-
mêmes, entraînés par quelque mobile, pour une femme... souvent,
parfois par désespoir, et bien souvent aussi par suite de leur mau-
vaise conduite. Mais Emile, lui, n’avait rien fait, semblait-il, n’avait
rien demandé; pourquoi donc alors devait-il, dans la fleur de l’âge,
payer comme les autres sa dette de sang à la société ? 11 n’était point
cruel, n’avait point envie de tuer son prochain, alors pourquoi?
Là-bas, les gendarmes attendaient, et plus loin, de la troupe : un
officier, des soldats baïonnette au canon, tous semblant regietteiy
dans ce matin blafard, la pénible corvée dont ils étaient chargés.
Près du trottoir, un fourgon stationnait, et, retenus par les agents,
la foule des curieux se pressait pour mieux voir.-
Devant Emile, deux montants se dressaient, tels ceux d’une porto
entre les barrières et entre eux quelque chose brillait, des uniformes
peut-être, là-bas*
Emile nous serra une dernière fois les mains puis, se détournant,
marcha résolument.
Au moment où il arrivait, un homme le saisit et le poussa brus-
quement en avant.
Emile disparut et, comme, fort heureusement, pour nous, nous ne
pouvions,pas le suivre, nous restâmes encore là un moment à-regai*
les autres ‘ bleus de la classe qui arrivaient •‘un1 à un à lu porte dm
bastion. "P * A
YV. de Pawlowski.
Werk/Gegenstand/Objekt
Titel
Titel/Objekt
Tristan et Yseult
Weitere Titel/Paralleltitel
Serientitel
Le rire: journal humoristique
Sachbegriff/Objekttyp
Inschrift/Wasserzeichen
Aufbewahrung/Standort
Aufbewahrungsort/Standort (GND)
Inv. Nr./Signatur
G 3555 Folio RES
Objektbeschreibung
Maß-/Formatangaben
Auflage/Druckzustand
Werktitel/Werkverzeichnis
Herstellung/Entstehung
Künstler/Urheber/Hersteller (GND)
Entstehungsdatum (normiert)
1899 - 1899
Entstehungsort (GND)
Auftrag
Publikation
Fund/Ausgrabung
Provenienz
Restaurierung
Sammlung Eingang
Ausstellung
Bearbeitung/Umgestaltung
Thema/Bildinhalt
Thema/Bildinhalt (GND)
Literaturangabe
Rechte am Objekt
Aufnahmen/Reproduktionen
Künstler/Urheber (GND)
Reproduktionstyp
Digitales Bild
Rechtsstatus
In Copyright (InC) / Urheberrechtsschutz
Creditline
Le rire, 6.1899-1900, No. 263 (18 Novembre 1899), S. 7
Beziehungen
Erschließung
Lizenz
CC0 1.0 Public Domain Dedication
Rechteinhaber
Universitätsbibliothek Heidelberg