à pied et nu-tête l’enterrement de M. Brunetière. Un vieillard bien
vêtu, d’aspect confortable, me toucha le bras.
— Ah ! monsieur, gémit-il, quel deuil pour la France ! Quelle
perte pour les lettres!... Et si vite emporté! Dire que nous déjeu-
nions ensemble avant-hier encore !... C’est bien le cas de le dire,
les bons s’en vont...
— Les mauvais restent... Si vous dites cela pour moi...
— Oh! monsieur, pouvez-vous croire? Non, sans comparaison
désobligeante, je déplorais seulement un malheur national, la mort
prématurée d’un littérateur qui...
— Que voulez-vous, c’est ainsi que finissent la plupart des alcoo-
liques.
— M. Brunetière était alcoolique?...
— Invétéré... Usé d’ailleurs par les débauches de toutes sortes.
Il se rattrapait, le gaillard, car ses débuts avaient été, en somme,
assez pénibles. Avant d’aborder la carrière littéraire, l’homme que
nous pleurons végéta longtemps dans des situations moindres.
Aide-cuisinier à bord d’un paquebot, puis chasseur dans un restau-
rant de dixième ordre...
— M. Brunetière fut chasseur dans un restaurant?...
— De dixième ordre, qu’il quitta pour entrer comme homme de
peine au service de MM. Tourgnolet-Forestiçr, d’où, par parenthèse,
il se fit flanquer à la porte à la suite d’une altercation avec l’un de
ses patrons... On l’avait habillé d’une livrée superbe que complétait
une casquette où, suivant l’usage, étaient inscrites les initiales de
la maison... Yoilà-t-il pas que ce satané galopin se formalise et
réclame son compte, sous prétexte que les lettres T. F. de son
couvre-chef le faisaient prendre partout pour un forçat évadé! Un
peu susceptible, le jeune Brunetière, hein?...
— Le fait est que...
N’ayant rien de mieux à faire ce jour-là, et pour obéir aux pres-
criptions du médecin qui m’avait recommandé l’exercice, je suivais
— Monsieur l’abbé, ma malheureuse mère est partie à l’autre bout du
monde avec un capitaine au long cours !
— Mon enfant, résignez-vous et ne considérez plus votre mère que comme
une parente éloignée. Dessin de dépaquit.
MATÉRIAUX D’HISTOIRE
L’ARMEE
Le Loufock-Guard
L’Infanterie légère de Suffoque. Le eold^cream Mustard-Guard.
Le High-Life-Lander Infantery.
vêtu, d’aspect confortable, me toucha le bras.
— Ah ! monsieur, gémit-il, quel deuil pour la France ! Quelle
perte pour les lettres!... Et si vite emporté! Dire que nous déjeu-
nions ensemble avant-hier encore !... C’est bien le cas de le dire,
les bons s’en vont...
— Les mauvais restent... Si vous dites cela pour moi...
— Oh! monsieur, pouvez-vous croire? Non, sans comparaison
désobligeante, je déplorais seulement un malheur national, la mort
prématurée d’un littérateur qui...
— Que voulez-vous, c’est ainsi que finissent la plupart des alcoo-
liques.
— M. Brunetière était alcoolique?...
— Invétéré... Usé d’ailleurs par les débauches de toutes sortes.
Il se rattrapait, le gaillard, car ses débuts avaient été, en somme,
assez pénibles. Avant d’aborder la carrière littéraire, l’homme que
nous pleurons végéta longtemps dans des situations moindres.
Aide-cuisinier à bord d’un paquebot, puis chasseur dans un restau-
rant de dixième ordre...
— M. Brunetière fut chasseur dans un restaurant?...
— De dixième ordre, qu’il quitta pour entrer comme homme de
peine au service de MM. Tourgnolet-Forestiçr, d’où, par parenthèse,
il se fit flanquer à la porte à la suite d’une altercation avec l’un de
ses patrons... On l’avait habillé d’une livrée superbe que complétait
une casquette où, suivant l’usage, étaient inscrites les initiales de
la maison... Yoilà-t-il pas que ce satané galopin se formalise et
réclame son compte, sous prétexte que les lettres T. F. de son
couvre-chef le faisaient prendre partout pour un forçat évadé! Un
peu susceptible, le jeune Brunetière, hein?...
— Le fait est que...
N’ayant rien de mieux à faire ce jour-là, et pour obéir aux pres-
criptions du médecin qui m’avait recommandé l’exercice, je suivais
— Monsieur l’abbé, ma malheureuse mère est partie à l’autre bout du
monde avec un capitaine au long cours !
— Mon enfant, résignez-vous et ne considérez plus votre mère que comme
une parente éloignée. Dessin de dépaquit.
MATÉRIAUX D’HISTOIRE
L’ARMEE
Le Loufock-Guard
L’Infanterie légère de Suffoque. Le eold^cream Mustard-Guard.
Le High-Life-Lander Infantery.