DEUXIÈME PARTIE
LE SECRET D OUTRE-TOMBE
OU « SI, SI, LE VICE EST TOUJOURS PUNI ! »
CHAPITRE PREMIER
Où le lecteur fait connaissance avec le Cliâteau-Maudit.
Dans la partie la plus noire de la Forêt-Noire était un manoir.
Imposant et massif, ce vieux bourg, bâti d’ailleurs dans le plus pur
style roman d’aventures, se dres-
sait sur les pentes abruptes et
assombries de pins du Schwartz-
vvald, et dominait la gorge étran-
glée où le Grosskolossalbach forme
les Sept-Fontaines du Diable.
Le Château-Maudit faisait partie
du domaine des Lamerloy, bonne
noblesse de province et alliée —
par les femmes — à plusieurs famil-
les couronnées, mais depuis que
le dernier des comtes de Lamer-
loy avait été banni à l’instigation
de l’anglais Roland d’Hodeurforth,
depuis que sa fille avait mysté-
rieusement disparu, et que sa
femme était morte, le château, déjà
isolé par lui-mème, était tombé
dans le plus affreux abandon. A
l’intérieur les lambris se dédo-
raient, les tapisseries se détra-
maient, les rats et les cafards fai-
saient leur proie des vieux tru-
meaux ; au dehors, les orties, les
ronces, les gravats, les immon-
dices et autres plantes parasites
avaient envahi les allées séculai-
res du parc, où les Faunes lépreux
et les Œgipans mutilés cachaient
sous des caleçons de mousse les
beaux restes de leur nudité païen-
ne.
Par une orageuse soirée de juil-
let deux cavaliers — le pas de leurs
chevaux résonnait sur le sol — se
préparaient à traverser la gorge
des Sept-Fontaines du Diable. Ils
étaient -coiffés de feutres mous et
se tenaient enveloppés dans des mantes assorties à la couleur de leurs
réflexions, c’est-à-dire d’une teinte tirant sur le foncé. — « Cornes
de Belzébuth! fit soudain le premier de ces mystérieux voyageurs,
aussi vrai que j’ai nom comte Ar-
thur de Boisflotté, je trouverais à
propos, avant d’atteindre les posi-
tions ennemies, de nous concerter
un moment sur le meilleur plan
de conduite à adopter. Ne partages-
tu pas mon opinion, mon cherKel-
bou rouet?
— Par les bienheureux Enogat,
Jacut de la mer et Briac, répondit
d’une voix chaude le jeune cadet
de Bretagne — car c’était lui — tu
as fort bien parlé.
Les deux hommes mirent pied
à terre et s’asseyant en cercle sur
des' rocs renversés, ils restèrent
quelque temps songeurs à regar-
der la nuit descendre sur la val-
lée, par l’échancrure du col à l’en-
trée de la gorge.
— Si tu y consens, Breton, mon
ami, reprit le comte Arthur, re-
montons pour l’intelligence du
récit à quelques semaines en ar-
rière, à cette fameuse soirée que
la reine donna en son château du
Louvre. Tu n’ignores pas qu’après
avoir été accaparé par cette dé-
moniaque beauté qui a nom Pa-
méla, je me hâtai d’aller retrou-
ver mes charmantes amies de la
rue des Tournelles, mais lorsque
je pénétrai dans le petit salon où
je les avais laissées, un cri tei»
rible, effrayant, vibrant de toutes
Les statues cachaient sous des caleçons de toiles d'araignée les beaux restes
de leurs nudités païennes.
les angoissés et de toutes les fureurs s’échappa de ma robuste poi-
trine; LES JEUNES FILLES AVAIENT DISPARU!
(A suivre.) Texte et Dessins d’AvELOT.
— Oh! comme tu sais bien me prendre par mon côté faible, mon chéri!
Dessin de Rouveyre.
ils regardaient la nuit tomber sur la gorge
par l’ouverture du col.
LE SECRET D OUTRE-TOMBE
OU « SI, SI, LE VICE EST TOUJOURS PUNI ! »
CHAPITRE PREMIER
Où le lecteur fait connaissance avec le Cliâteau-Maudit.
Dans la partie la plus noire de la Forêt-Noire était un manoir.
Imposant et massif, ce vieux bourg, bâti d’ailleurs dans le plus pur
style roman d’aventures, se dres-
sait sur les pentes abruptes et
assombries de pins du Schwartz-
vvald, et dominait la gorge étran-
glée où le Grosskolossalbach forme
les Sept-Fontaines du Diable.
Le Château-Maudit faisait partie
du domaine des Lamerloy, bonne
noblesse de province et alliée —
par les femmes — à plusieurs famil-
les couronnées, mais depuis que
le dernier des comtes de Lamer-
loy avait été banni à l’instigation
de l’anglais Roland d’Hodeurforth,
depuis que sa fille avait mysté-
rieusement disparu, et que sa
femme était morte, le château, déjà
isolé par lui-mème, était tombé
dans le plus affreux abandon. A
l’intérieur les lambris se dédo-
raient, les tapisseries se détra-
maient, les rats et les cafards fai-
saient leur proie des vieux tru-
meaux ; au dehors, les orties, les
ronces, les gravats, les immon-
dices et autres plantes parasites
avaient envahi les allées séculai-
res du parc, où les Faunes lépreux
et les Œgipans mutilés cachaient
sous des caleçons de mousse les
beaux restes de leur nudité païen-
ne.
Par une orageuse soirée de juil-
let deux cavaliers — le pas de leurs
chevaux résonnait sur le sol — se
préparaient à traverser la gorge
des Sept-Fontaines du Diable. Ils
étaient -coiffés de feutres mous et
se tenaient enveloppés dans des mantes assorties à la couleur de leurs
réflexions, c’est-à-dire d’une teinte tirant sur le foncé. — « Cornes
de Belzébuth! fit soudain le premier de ces mystérieux voyageurs,
aussi vrai que j’ai nom comte Ar-
thur de Boisflotté, je trouverais à
propos, avant d’atteindre les posi-
tions ennemies, de nous concerter
un moment sur le meilleur plan
de conduite à adopter. Ne partages-
tu pas mon opinion, mon cherKel-
bou rouet?
— Par les bienheureux Enogat,
Jacut de la mer et Briac, répondit
d’une voix chaude le jeune cadet
de Bretagne — car c’était lui — tu
as fort bien parlé.
Les deux hommes mirent pied
à terre et s’asseyant en cercle sur
des' rocs renversés, ils restèrent
quelque temps songeurs à regar-
der la nuit descendre sur la val-
lée, par l’échancrure du col à l’en-
trée de la gorge.
— Si tu y consens, Breton, mon
ami, reprit le comte Arthur, re-
montons pour l’intelligence du
récit à quelques semaines en ar-
rière, à cette fameuse soirée que
la reine donna en son château du
Louvre. Tu n’ignores pas qu’après
avoir été accaparé par cette dé-
moniaque beauté qui a nom Pa-
méla, je me hâtai d’aller retrou-
ver mes charmantes amies de la
rue des Tournelles, mais lorsque
je pénétrai dans le petit salon où
je les avais laissées, un cri tei»
rible, effrayant, vibrant de toutes
Les statues cachaient sous des caleçons de toiles d'araignée les beaux restes
de leurs nudités païennes.
les angoissés et de toutes les fureurs s’échappa de ma robuste poi-
trine; LES JEUNES FILLES AVAIENT DISPARU!
(A suivre.) Texte et Dessins d’AvELOT.
— Oh! comme tu sais bien me prendre par mon côté faible, mon chéri!
Dessin de Rouveyre.
ils regardaient la nuit tomber sur la gorge
par l’ouverture du col.