LES DERNIERS JOURS DE L’EXPOSITION
POLITESSE JAPONAISE
■ Que je suis donc heureuse, chère et honorée voisine, de vous voir en
bonne santé !
— Pas tant que moi, madame, pas tant que moi!...
Dessin d’OBLED.
LE JOUR DES HUISSIERS
Dessin de F. Fau.
UES GHANSONS DE MA PORTE
A M. Anatole France.
Dans un des nombreux logements où s’abrita mon errante jeu-
nesse, il y avait une porte qui chantait un motif de Méhul quand on
l’ouvrait et une phrase de Schumann quand on la fermait.
Cette porte mélodieuse était ma meilleure ressource les soirs où
je recevais. Mes moyens ne me permettant pas d’avoir un piano,
ma porte en tenait lieu, et, grâce à elle, les concerts qu’on impro-
visait dans ma chambre comptaient deux numéros intéressants : le
motif de Méhul à la première partie et la phrase de Schumann à la
seconde.
A la longue quelques-uns de mes invités habituels se lassèrent de
ces deux fragments et se répandirent en plaintes peu fondées. Je
n’eus pas de peine à les convaincre de ridicule en leur faisant
remarquer qu’ils reprochaient à ma porte leur propre travers. De
fait, le mieux pourvu des plaignants n’avait que trois airs à son
répertoire. Pour les autres, ils n’en connaissaient qu’un qu’ils réé-
ditaient avec conviction toutes les fois qu’on était en nombre.
Lequel est le plus blâmable d’un homme qui ne chante qu’un air,
ayant la faculté d’en apprendre d’autres, ou d’une porte qui chante
deux airs alors que rien ne l’oblige à faire une chose si fort éloignée
de ses occupations?
Pour ma part, j’étais heureux de posséder une porte dont les
POLITESSE JAPONAISE
■ Que je suis donc heureuse, chère et honorée voisine, de vous voir en
bonne santé !
— Pas tant que moi, madame, pas tant que moi!...
Dessin d’OBLED.
LE JOUR DES HUISSIERS
Dessin de F. Fau.
UES GHANSONS DE MA PORTE
A M. Anatole France.
Dans un des nombreux logements où s’abrita mon errante jeu-
nesse, il y avait une porte qui chantait un motif de Méhul quand on
l’ouvrait et une phrase de Schumann quand on la fermait.
Cette porte mélodieuse était ma meilleure ressource les soirs où
je recevais. Mes moyens ne me permettant pas d’avoir un piano,
ma porte en tenait lieu, et, grâce à elle, les concerts qu’on impro-
visait dans ma chambre comptaient deux numéros intéressants : le
motif de Méhul à la première partie et la phrase de Schumann à la
seconde.
A la longue quelques-uns de mes invités habituels se lassèrent de
ces deux fragments et se répandirent en plaintes peu fondées. Je
n’eus pas de peine à les convaincre de ridicule en leur faisant
remarquer qu’ils reprochaient à ma porte leur propre travers. De
fait, le mieux pourvu des plaignants n’avait que trois airs à son
répertoire. Pour les autres, ils n’en connaissaient qu’un qu’ils réé-
ditaient avec conviction toutes les fois qu’on était en nombre.
Lequel est le plus blâmable d’un homme qui ne chante qu’un air,
ayant la faculté d’en apprendre d’autres, ou d’une porte qui chante
deux airs alors que rien ne l’oblige à faire une chose si fort éloignée
de ses occupations?
Pour ma part, j’étais heureux de posséder une porte dont les