LA
CENSURE EN MAUVAISE POSTURE
. .UN. -DRAME A CRICRIVILLE
VIEUX MARTYR
r » I
Lorsque le receveur des domaines lui-même l'eut constaté en passant le soir devant le
maison,.la chose ne fit désormais plus de doute : les Foc forçaient leur vieux père a .panger
genoux; dans un coin de la chambré, tandis qu'eux-mêmes, tranquillement assis autour de la
table, prenaient leur repas.
Aussi bien, n'était-elle pas naturelle l'histoire de ce vieux, parti du pays depuis plus de ving'
ans, que les Foc avaient, une belle nuit, mystérieusement rameré dans leur carriole
d'on ne sait quelle gare, et que depuis ils gardaient soigneusement caché chez eux.
Bientôt, les femmes s'en mêlant,-de discrétion en discrétion, tout le village fut au cou-
rant: non seulement les Foc forçaient leur vieux .père à manger à genoux, mais ils
i enfonçaient encore des aiguilles dans les yeux et personne n'ignorait pli|S
qu'en lui donnant sa soupe dans une mauvaise écuelle, la Foc lui disait réguliè-
rement :
— Tiens, propre à rien, tu vas donc pas bientôt crever !
L'indignation -fut à son comble, surtout contre le fils Foc qui depuis
arrivée de son père décourageait toutes les curiosités. Inébranlable, il sp
tenait devant la porte de sa maison, jetant un regard de défi sur les paysans
qui cherchaient à voir ce qui se passait chez lui. Et dire que pendant ce
temps, le vieux martyr mourait peut-être sous les coups!
Toutefois, personne n'osait formuler de dénonciation en règle : on se
contentait d'appeler sur cette maison maudite la Vengeance du ciel, ce
qui, chacun sait cela, est infiniment plus sur et moins compromettant!
mais le ciel ne voulant sans doute pas influer sur le jugement dernier»
ne fit rien. . .' .* • ' , -
A la fin, un veuf, sans enfants, qui partait pour les colonies, se décida
.à on parler au facteur au nom de tous les habitants. Le facteur, malgré
sa situation officielle, resta fort embarrassé, jura ses grands dieux qu'il
ne voulait pas s'en mêler, fit serment de ne rien dire, tant et si bien que
deux jours après, les gendarmes arrivèrent. Ils étaient chargés de
tire une enquête aussi discrète que possible sur le cas du vieux
martyr. - /' .' " ' .*
En un instant le village entier fut sur pied, on fit signe aux barques
plus proches, les charpentiers qui, sur la grève, construisaient
ba'eaux, abandonnèrent leur travail, et, de loin d'abord, prùdern-
nt, un à un, puis en foule, on s'approcha de la maison.
âme de l'Irlandais John Lynch tressaillait déplaisir...
fermée., rien ne bougeait à l'intérieur de la mai-
. La brigadier frappa et les coups qu'il donnait réson-
nèrent délicieusement dans le cœur des assistants.
Point n'est besoin d'être si raffiné pour éprouver
parfois des émotions voluptueuses. •
Enfin, on tira le loquet, c'était le fils Foc qui
montrait, sa figure inquiète, •-
JlPjlp^ Le- misérable pâlit en voyant les gendar-
^PIÈ* mes et resta à les regarder la bouche
rV*if&. ouverte. Ah ! pour sûr, on no s'é-
^V-rH W^&Kim. tait Pas trompé! Avait-il l'air
Èfe © ^.iv^^l^k. assez canaille,non, mais
Rowon, — Je crois bien que c'est nous, les « Avariés ». Dessin de gbandjouas.
CENSURE EN MAUVAISE POSTURE
. .UN. -DRAME A CRICRIVILLE
VIEUX MARTYR
r » I
Lorsque le receveur des domaines lui-même l'eut constaté en passant le soir devant le
maison,.la chose ne fit désormais plus de doute : les Foc forçaient leur vieux père a .panger
genoux; dans un coin de la chambré, tandis qu'eux-mêmes, tranquillement assis autour de la
table, prenaient leur repas.
Aussi bien, n'était-elle pas naturelle l'histoire de ce vieux, parti du pays depuis plus de ving'
ans, que les Foc avaient, une belle nuit, mystérieusement rameré dans leur carriole
d'on ne sait quelle gare, et que depuis ils gardaient soigneusement caché chez eux.
Bientôt, les femmes s'en mêlant,-de discrétion en discrétion, tout le village fut au cou-
rant: non seulement les Foc forçaient leur vieux .père à manger à genoux, mais ils
i enfonçaient encore des aiguilles dans les yeux et personne n'ignorait pli|S
qu'en lui donnant sa soupe dans une mauvaise écuelle, la Foc lui disait réguliè-
rement :
— Tiens, propre à rien, tu vas donc pas bientôt crever !
L'indignation -fut à son comble, surtout contre le fils Foc qui depuis
arrivée de son père décourageait toutes les curiosités. Inébranlable, il sp
tenait devant la porte de sa maison, jetant un regard de défi sur les paysans
qui cherchaient à voir ce qui se passait chez lui. Et dire que pendant ce
temps, le vieux martyr mourait peut-être sous les coups!
Toutefois, personne n'osait formuler de dénonciation en règle : on se
contentait d'appeler sur cette maison maudite la Vengeance du ciel, ce
qui, chacun sait cela, est infiniment plus sur et moins compromettant!
mais le ciel ne voulant sans doute pas influer sur le jugement dernier»
ne fit rien. . .' .* • ' , -
A la fin, un veuf, sans enfants, qui partait pour les colonies, se décida
.à on parler au facteur au nom de tous les habitants. Le facteur, malgré
sa situation officielle, resta fort embarrassé, jura ses grands dieux qu'il
ne voulait pas s'en mêler, fit serment de ne rien dire, tant et si bien que
deux jours après, les gendarmes arrivèrent. Ils étaient chargés de
tire une enquête aussi discrète que possible sur le cas du vieux
martyr. - /' .' " ' .*
En un instant le village entier fut sur pied, on fit signe aux barques
plus proches, les charpentiers qui, sur la grève, construisaient
ba'eaux, abandonnèrent leur travail, et, de loin d'abord, prùdern-
nt, un à un, puis en foule, on s'approcha de la maison.
âme de l'Irlandais John Lynch tressaillait déplaisir...
fermée., rien ne bougeait à l'intérieur de la mai-
. La brigadier frappa et les coups qu'il donnait réson-
nèrent délicieusement dans le cœur des assistants.
Point n'est besoin d'être si raffiné pour éprouver
parfois des émotions voluptueuses. •
Enfin, on tira le loquet, c'était le fils Foc qui
montrait, sa figure inquiète, •-
JlPjlp^ Le- misérable pâlit en voyant les gendar-
^PIÈ* mes et resta à les regarder la bouche
rV*if&. ouverte. Ah ! pour sûr, on no s'é-
^V-rH W^&Kim. tait Pas trompé! Avait-il l'air
Èfe © ^.iv^^l^k. assez canaille,non, mais
Rowon, — Je crois bien que c'est nous, les « Avariés ». Dessin de gbandjouas.
Werk/Gegenstand/Objekt
Titel
Titel/Objekt
Le rire: journal humoristique
Sachbegriff/Objekttyp
Inschrift/Wasserzeichen
Aufbewahrung/Standort
Aufbewahrungsort/Standort (GND)
Inv. Nr./Signatur
G 3555 Folio RES
Objektbeschreibung
Maß-/Formatangaben
Auflage/Druckzustand
Werktitel/Werkverzeichnis
Herstellung/Entstehung
Künstler/Urheber/Hersteller (GND)
Entstehungsort (GND)
Auftrag
Publikation
Fund/Ausgrabung
Provenienz
Restaurierung
Sammlung Eingang
Ausstellung
Bearbeitung/Umgestaltung
Thema/Bildinhalt
Thema/Bildinhalt (GND)