Tout change, tout se transforme; les artistes eux-mêmes, qui
devraient vivre dans les régions sereines de l’idéal, introduisent,
dans les classiques livrets, des variations que n’avaient certes
pas prévues les auteurs. Ainsi, vous vous rappelez la mort de
Carmen telle que l’a rêvée le pauvre Bizet. Au troisième acte,
José reproche à la volage Carmen ses infidélités et la conjure
de revenir à lui, lorsqu’éclate une fanfare de trompettes annon-
çant que le combat de taureaux va commencer, et qu’Escamillo,
le toréador, le nouvel amant de Carmen, entre dans l’arène.
* Carmen, oubliant alors les supplications de José, se précipite
vers la porte du cirque, et, d’après le libretto, l’artiste doit tour-
ner le dos au public afin que José lui plonge sa narvaja dans la
oitrine. Or, à Dresde, MraeCalvé voulut mourir de face, et José,
ésorienté, voyant une croupe andalouse, au lieu d’une poitrine,
ne sut plus à quel sein se vouer, et oublia de poignarder.
Alors, la chanteuse, exaspérée, se tourna vers le ténor médusé,
et lui envoya trois fois, en pleine figure, le mot énergique que
Cambronne n’avait lancé qu’une fois à la face des Anglais.
Depuis la bataille de Waterloo, les Anglo-Saxons n’ont jamais
oublié le sens du mot. Je ne sais pas ce qu’ils sentirent, mais le
roi de Saxe sortit de la salle. (Ah! que j’aurais voulu voir la
bobine du roi de Saxe!) Le lendemain, Mme Calvé recevait un
mot du comte Serbach, directeur général des théâtres : l’ordre de
ne plus paraître à l’Opéra-Royal, pour s’être livrée à des intem-
pérances de langage regrettables vis-à-vis d’un fonctionnaire al-
lemand (le ténor).
Il est probable que Carmen dut, une fois de plus, en lisant
cette lettre du comte, articuler le mot litigieux; mais, mainte-
nant, l’imprésario, M. Schurman, réclame vingt mille francs
de dédit à son irascible pensionnaire. Mer...ci! Ça ne lui aura
pas porté bonheur; mais, qui sait? C’est peut-être à Cambronne
qu’elle devra la joie de son mariage, même quand l’amour est
aveugle.
Les avocats ont, en effet, souvent des raisons que la raison ne
comprend pas.
Mme Caroline Otero, qui touchait, aux Bouffes, 425 francs par
représentation, ne faisait que 457 francs de recette. Cette nou-
velle me navre, mais elle navrait encore plus le directeur,
M. Monza, qui préféra ne pas payer les cachets de sa pension-
naire. Or, voici le raisonnement de M® Glunet :
— Si M. Monza avait rempli ses engagements, Mme Caroline
Otero ne serait pas partie pour Buenos-Ayres; elle n’y aurait
pas rencontré le richissime M. Wep, et n’aurait pas conclu, avec
lui, un autre engagement... matrimonial. Donc, M. Monza ne
doit rien à Mm® Otero; c’est elle, au contraire, qui lui doit son
bonheur.
LES ACQUISITIONS ;
— Elle a de la chance! son ami lui a payé une... (case à louer)
épatante!
— Et elle, s’est payé le chauffeur...
LE DERNIER TRUC DE DON JUAN
— Mon cher, je les attends à la sortie du Salon de l’Auto... Aujour-
d’hui, une femme qui n’a pas sa... (case à louer) est capable de tout!
Dessins de Guillaume.
Hé! hé! A quelque chose malheur est bon, et il est évident
que M. Wep, pendant qu’il est en train de payer — et il parait
très en train — devrait bien élever à M. Monza un monument.
A Monza, un Argentin reconnaissant.
Et sur le socle, on inscrirait, dans un harmonieux enlace-
ment, leschiffres de recettes des Bouffes, et ceux des revenus de
M. Wep, le tout dans une guirlande de roses. 011 é ! ollé!
*
* *
Mme Rosita Mauri n’a pas encore son monument, mais nous
ne verrions aucun inconvénient à ce que son petit toupet posti-
che remplaçât la crinière crespelée de Charles Garnier, au coin
de la rue Auber.
Charles Garnier était bien à vingt ans !
mais à soixante, saperlipopette! Enfin, revenons à Mme Rosita
Mauri, qui a pris, il y a déjà pas mal d’années, sa retraite comme
danseuse à l’Opéra, alors que la raideur de ses articulations ne
lui permettait plus de faire gracieusement comprendre au public
la dernière pensée de Weber et de M. Hausen.
Or Mme la ballerine en retraite vient d’ouvrir un cours de
danse, car il est à remarquer que lorsqu’une artiste n’est plus
bonne à rien, elle se consacre au professorat, trouvant naturel
d’enseigner ce qu’elle ne peut plus exécuter. On nous affirme
que la fête fut très touchante (?) Il y eut sans doute des jetés-
battus... et contents, et des sauts de chats pleins de la plus fran-
che cordialité. Une autre retraitée assistait à la cérémonie,
Mm" Julia Subra. Ces deux invalides de la danse qui, jadis ne
pouvaient pas se voir, même en photographie, auraient pu jouer :
Réconciliées depuis Wagram. Dans l’entrefiiet-réclame envoyé
aux journaux, un passage m’a rendu rêveur :
« Tous les jeudis, un cours spécial sera réservé aux femmes
du monde ».
On aimerait savoir le nom des femmes du monde qui vont
demander à Mme Mauri le secret des gargouillades, des jetés-
battus, et des entre-chats. Peut-être Mme la marquise de Belbeuf
ira-t-elle étudier là un nouveau pas de «likette», ou une » mouil-
lette » sensationnelle pour danser avec Colette, avec chaîne des
dames?
Ah ! mes enfants, si nous avions eu ce « clou » pour le béné-
fice de Paulus! Snob.
devraient vivre dans les régions sereines de l’idéal, introduisent,
dans les classiques livrets, des variations que n’avaient certes
pas prévues les auteurs. Ainsi, vous vous rappelez la mort de
Carmen telle que l’a rêvée le pauvre Bizet. Au troisième acte,
José reproche à la volage Carmen ses infidélités et la conjure
de revenir à lui, lorsqu’éclate une fanfare de trompettes annon-
çant que le combat de taureaux va commencer, et qu’Escamillo,
le toréador, le nouvel amant de Carmen, entre dans l’arène.
* Carmen, oubliant alors les supplications de José, se précipite
vers la porte du cirque, et, d’après le libretto, l’artiste doit tour-
ner le dos au public afin que José lui plonge sa narvaja dans la
oitrine. Or, à Dresde, MraeCalvé voulut mourir de face, et José,
ésorienté, voyant une croupe andalouse, au lieu d’une poitrine,
ne sut plus à quel sein se vouer, et oublia de poignarder.
Alors, la chanteuse, exaspérée, se tourna vers le ténor médusé,
et lui envoya trois fois, en pleine figure, le mot énergique que
Cambronne n’avait lancé qu’une fois à la face des Anglais.
Depuis la bataille de Waterloo, les Anglo-Saxons n’ont jamais
oublié le sens du mot. Je ne sais pas ce qu’ils sentirent, mais le
roi de Saxe sortit de la salle. (Ah! que j’aurais voulu voir la
bobine du roi de Saxe!) Le lendemain, Mme Calvé recevait un
mot du comte Serbach, directeur général des théâtres : l’ordre de
ne plus paraître à l’Opéra-Royal, pour s’être livrée à des intem-
pérances de langage regrettables vis-à-vis d’un fonctionnaire al-
lemand (le ténor).
Il est probable que Carmen dut, une fois de plus, en lisant
cette lettre du comte, articuler le mot litigieux; mais, mainte-
nant, l’imprésario, M. Schurman, réclame vingt mille francs
de dédit à son irascible pensionnaire. Mer...ci! Ça ne lui aura
pas porté bonheur; mais, qui sait? C’est peut-être à Cambronne
qu’elle devra la joie de son mariage, même quand l’amour est
aveugle.
Les avocats ont, en effet, souvent des raisons que la raison ne
comprend pas.
Mme Caroline Otero, qui touchait, aux Bouffes, 425 francs par
représentation, ne faisait que 457 francs de recette. Cette nou-
velle me navre, mais elle navrait encore plus le directeur,
M. Monza, qui préféra ne pas payer les cachets de sa pension-
naire. Or, voici le raisonnement de M® Glunet :
— Si M. Monza avait rempli ses engagements, Mme Caroline
Otero ne serait pas partie pour Buenos-Ayres; elle n’y aurait
pas rencontré le richissime M. Wep, et n’aurait pas conclu, avec
lui, un autre engagement... matrimonial. Donc, M. Monza ne
doit rien à Mm® Otero; c’est elle, au contraire, qui lui doit son
bonheur.
LES ACQUISITIONS ;
— Elle a de la chance! son ami lui a payé une... (case à louer)
épatante!
— Et elle, s’est payé le chauffeur...
LE DERNIER TRUC DE DON JUAN
— Mon cher, je les attends à la sortie du Salon de l’Auto... Aujour-
d’hui, une femme qui n’a pas sa... (case à louer) est capable de tout!
Dessins de Guillaume.
Hé! hé! A quelque chose malheur est bon, et il est évident
que M. Wep, pendant qu’il est en train de payer — et il parait
très en train — devrait bien élever à M. Monza un monument.
A Monza, un Argentin reconnaissant.
Et sur le socle, on inscrirait, dans un harmonieux enlace-
ment, leschiffres de recettes des Bouffes, et ceux des revenus de
M. Wep, le tout dans une guirlande de roses. 011 é ! ollé!
*
* *
Mme Rosita Mauri n’a pas encore son monument, mais nous
ne verrions aucun inconvénient à ce que son petit toupet posti-
che remplaçât la crinière crespelée de Charles Garnier, au coin
de la rue Auber.
Charles Garnier était bien à vingt ans !
mais à soixante, saperlipopette! Enfin, revenons à Mme Rosita
Mauri, qui a pris, il y a déjà pas mal d’années, sa retraite comme
danseuse à l’Opéra, alors que la raideur de ses articulations ne
lui permettait plus de faire gracieusement comprendre au public
la dernière pensée de Weber et de M. Hausen.
Or Mme la ballerine en retraite vient d’ouvrir un cours de
danse, car il est à remarquer que lorsqu’une artiste n’est plus
bonne à rien, elle se consacre au professorat, trouvant naturel
d’enseigner ce qu’elle ne peut plus exécuter. On nous affirme
que la fête fut très touchante (?) Il y eut sans doute des jetés-
battus... et contents, et des sauts de chats pleins de la plus fran-
che cordialité. Une autre retraitée assistait à la cérémonie,
Mm" Julia Subra. Ces deux invalides de la danse qui, jadis ne
pouvaient pas se voir, même en photographie, auraient pu jouer :
Réconciliées depuis Wagram. Dans l’entrefiiet-réclame envoyé
aux journaux, un passage m’a rendu rêveur :
« Tous les jeudis, un cours spécial sera réservé aux femmes
du monde ».
On aimerait savoir le nom des femmes du monde qui vont
demander à Mme Mauri le secret des gargouillades, des jetés-
battus, et des entre-chats. Peut-être Mme la marquise de Belbeuf
ira-t-elle étudier là un nouveau pas de «likette», ou une » mouil-
lette » sensationnelle pour danser avec Colette, avec chaîne des
dames?
Ah ! mes enfants, si nous avions eu ce « clou » pour le béné-
fice de Paulus! Snob.