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Le rire: journal humoristique — N.S. 1910 (Nr. 361-413)

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https://doi.org/10.11588/diglit.25441#0843
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C’est quand il y a du danger, monsieur, que je me montre et que je sers ma cause.
Eh bien, moi, monsieur, quand il y a du danger je serre les f... '

Dessin de J. Hémard.

L’AVENTURE DE POTIRON

Mon ami François Potiron est un type, un type dans le genre
de Jérôme Paturot!

Je veux dire par là qu’il cherche une position sociale.

Il la cherche depuis une pièce de bientôt vingt-huit ans, àpre-
ment, courageusement, sans une seconde de lassitude ou de
désespérance.

Parbleu, s’il avait voulu être comptable, employé au gaz,sous-
secrétaire d’Etat aux Beaux-Arts ou estimateur au Mont-de-piété,
il y a beaux jours qu’il serait casé. Mais mon ami François Poti-
ron recherche seulement les carrières dites libérales.

Il a essayé de bien des choses; il a été successivement cham-
pion de boxe, ordonnateur aux Pompes funèbres, chasseur dans
un café des Boulevards, critique dramatique, poulain dans une
écurie de bicyclettes, président d’une république équatoriale,
nègre dans un restaurant de nuit, candidat aux élections muni-
cipales, que sais-je encore?

Mais toutes ces situations ne lui ont laissé qu’amertume et
rancœur.

Il essaye en ce moment d’être auteur dramatique!

Son rêve serait de faire des pièces de terreur, dans le genre de
celles de Lorde, car l’avenir est là.

Il prépare une grande machine qui se passera dans une mai-
son de fous.

Le sujet, sans doute, n’est pas très neuf, mais, comme me disait
François Potiron, « il y a la manière ».

Pour se documenter, François Potiron s’en vint, la semaine
dernière, visiter un établissement fort connu de la banlieue
parisienne.

Accompagné du docteur de la Maison, il commença par la
section des fous ordinaires, et s’y intéressa prodigieusement. Il
remplit au moins douze pages de son calepin de notes transcen-
dantes.

Puis, il passa aux monomanes.

Justement, il en avisa un, fort occupé à aligner des chiffres
sur une grande feuille de papier, et à y tracer des figures géo-
métriques.

François Potiron le contempla curieusement.

Le monomane, fier de cette attention, lui sourit, puis :

— Vous semblez vous intéresser à ce problème?

— Beaucoup! repartit Potiron, pour ne point contrarier le
dément.

— En ce cas, continua l’autre, franchement que feriez-vous à
ma place?

— Comment...

— Oui! Abaisseriez-vous, ou n’abaisseriez-vous pas la perpen-
diculaire !

— Je l’abaisserais ! répondit François Potiron, comme il eût dit
le contraire.

Le géomètre se leva.

—- Vous l’abaisseriez!

—- Sans hésiter!

Il avait à peine achevé que le pauvre dément lui flanquait une

de ces gifles retentissantes qui vous font voir trente-six chan-
delles.

Et à-ce moment, le médecin le tira par la manche, et douce-
ment, :

— Si vous voulez, maintenant, nous allons passer aux fous
furieux!

C’est à la suite de cet incident que mon ami François Potiron
renonça à la carrière dramatique.

Rodolphe Bringer.

DE l’audace, ENCORE DE l’aUDACE...

— La persévérance, monsieur, ça mène à tout... Moi qui vous parle,
je suis venu à Paris en sabots. Dessin de Paul d’Espagnax.
 
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