Universitätsbibliothek HeidelbergUniversitätsbibliothek Heidelberg
Metadaten

Le rire: journal humoristique — 25.1919

DOI Page / Citation link:
https://doi.org/10.11588/diglit.28149#0051
Overview
Facsimile
0.5
1 cm
facsimile
Scroll
OCR fulltext
LA PAIX AU BOIS DORMANT OUVRE UN ŒIL

— Espérons que, cette fois, en s’y mettant tous, les princes de la diplomatie vont me réveiller complètement, pour deux ou trois cents ans.

LE RIRE DE LA SEMAINE

L’illustre pianiste Paderewski vient de faire ses débuts au
concert européen : il a été élu commissaire du gouvernement
polonais.

Un pianiste ne fera pas mal dans les milieux politiques de la
Pologne, — mais un accordeur serait peut-être plus indiqué.

C’est la première fois, je crois, qu’un vrai pianiste est appelé
au Gouvernement parce 'que, uniquement, il s’est créé une
véritable popularité comme virtuose. Il est vrai qu’un pianiste
déploie dans son art des qualités indispensables à l’homme
d’Etat : il lui faut du doigté, de la souplesse, de l’autorité, de la
poigne... La main de fer dans un gant de velours, c’est la main
de Paderewski. Les maîtres du clavier sont faits pour devenir
des conducteurs de peuples.

Il ne serait pas étonnant que Paderewski fût élu président de
la République polonaise... C’est peut-être le seul moyen d’adoucir
les mœurs politiques de cette capricieuse et trépidante nation :
quel argument qu’une sonate brillamment enlevée et quelle
leçon de sagesse parlementaire qu’une série de variations
improvisées sur le clavier!

Pour peu que les autres Etats se choisissent des dirigeants
capables de jouer d’un instrument de musique, le concert euro-
péen cessera d’être un vain mot.

La paix rêvée par Wilson sera musicale ou ne sera pas.

Mais, hélas! cette harmonie internationale ne tarderait pas à
jouer faux... Bientôt quelque artiste s’entêterait à donner des
notes discordantes, voire à jouer un morceau pour lui tout seul,
sans se soucier de ses voisins. C’est toujours ainsi que se perdent
les harmonies européennes : elles finissent en assourdissant
jazz-band avec coups de canons et explosions variées...

C’est pourquoi, malgré tout, je ne crois pas à l’avenir de
Paderewski, homme d’Etat.

Le piano ne peut pas être l’instrument d’une politique, même
dans la patrie de Chopin : parlez-moi de la grosse caisse, du
piston ou du violon,- — dans lequel on enferme ses adversaires!

* * * A l’heure où paraîtront ces lignes, j’imagine que la.
Seine sera rentrée dans son lit.

En voilà, une crue!

On n’a fias idée de pareils débordements... Tous les sept ou
huit ans, la Seine se livre à des excentricités scandaleuses : on
la voit vadrouiller sur les quais, on la rencontre dans des
quartiers où elle n’a vraiment rien à faire.

— La Seine, a dit le préfet de police, est devenue « indési-
rable »... Si elle continue, je lui interdirai l’accès de Paris!

Le fait est qu’elle se tient bien mal... En revanche, le zouave
du pont de l’Alma se tient admirablement. Je ne sais pas si ce
poilu est jamais allé au feu, mais il est allé à l’eau plus d’une
fois.

Le zouave du pont de l’Alma, l'éclusier de Chalifert et
M. Angot sont les trois personnalités qui, à chaque inondation,
font le plus parler d’elles... Malheureux zouave! Que de bains
de pieds il a pris ! En voilà un qui doit être membre de la Ligue
contre la licence des crues!... L’éclusier de Chalifert est moins
connu : personne ne sait s’il est grand, petit, gras ou maigre...
Il a quelque chose de mythique, comme les héros d’Ossian.
Mais quand les journaux parlent de lui, c’-est que la catastrophe
est prochaine, c’est que les nouveaux pauvres qui couchent
sous les ponts ont été expulsés tout comme les nouveaux riches
des palaces réquisitionnés. Quant à M. Angot, il est le dispen-
sateur de prédictions météorologiques que les reporters enre-
gistrent avec une admirable gravité :

— S’il cesse de pleuvoir, c’est que le temps se sera mis au
sec... Alors, la Seine baissera.

Ou bien :

— L’inondation est une catastrophe naturelle qui a, pour
cause première, la persistance des pluies... Pendant le déluge,
l’échelle du Pont-Royal marquait 190 mètres... Jamais l’Admi-
nistration n’a été pareillement débordée!

M. Angot est un savant que la pluie et iu sécheresse ont
rendu célèbre... Mais sa philosophie est grande.

— Je prends le temps comme il vient! déclare-t-il volontiers.

C’est un sage...

* * * Après les débordements de la Seine, nous avons les
débordements diplomatiques.

J’entends par là qu’à Paris la diplomatie coule à pleins bords, —
tout comme à Berlin le bolchevisme.
Image description
There is no information available here for this page.

Temporarily hide column
 
Annotationen