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Le rire: journal humoristique — 25.1919

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https://doi.org/10.11588/diglit.28149#0101
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EST-CE QUE JE RONFLE ?

LE DIPLOMATE HONORAIRE

Les parents âgés qui doivent, en mourant, laisser une jolie
fortune à leurs héritiers sont des gens insupportables : ils se
cramponnent à la vie et, comme s’ils se vengeaient par avance
de la nécessité où ils seront un jour de faire plaisir à quelqu’un,
ils sont fertiles en désirs saugrenus, en exigences infernales.
Mme de Vieuzault ne consentit pas à décéder avant que son
neveu Hector fût nanti, par ses soins, d’une belle et bonne
épouse.

Hector se fût bien passé d’une épouse. Il était encore à l’âge
où Ton se contente d’être trompé par ses maîtresses. Mais il
savait bien que le mariage, qui a été de tout temps une céré-
monie ridicule, est de nos jours une formalité sans consé-
quences. Au pis aller, on peut l’annuler par une autre formalité,
à peine plus compliquée. En tout cas, elle ne change rien à
une existence déjà organisée, et Hector était assuré que d’épou-
ser Mlle Berthe O’Granpiay ne l’obligerait pas à rompre avec
Mlle Lily Grafouille, laquelle lui tenait au cœur plus que tout.

Il aimait Lily, et il était aimé d’elle. Comme il en était aimé!

LE LAIT RARE

— Ah! c’est vous la nourrice; qu’est-ce que vous voulez comme

gages?

— Cent sous le litre. Dessin de R. Vion.

Comme elle lui sautait au cou quand il venait la voir! Quelles
prévenances elle avait! Que d’inventions ingénieuses pour lui
plaire ! Comme Hector reconnaissait en chacun de ses gestes et
de ses mots les marques de la passion la plus flatteuse et la
plus sincère! Mais aussi comme il l’en récompensait!

— Cette petite Lily te coûte bigrement cher, disaient ses
amis.

— Oui, répondait-il. Mais elle m’aime pour moi. Je ne serai
jamais trop généreux avec elle.

Et il était très généreux, car cet amour qu’il inspirait était sa
plus grande satisfaction.

Certain de ne pas perdre Lily, et soucieux d’hériter de
Mmo de Vieuzault, il consentit à présenter ses hommages à
Mme O’Granpiay.

— Monsieur, lui dit cette dame, je suis étrangère, je peux

parler net. Je sais que vous désirez obtenir la main de ma fille;
je ne vous la donnerai qu’à une condition : c’est que vous ne
ronfliez pas. Mon mari ronfle, monsieur, et ce ronflement redou-
table a troublé irrémédiablement un bonheur conjugal qui eût
été, sans cela, parfait. , (

Hector jura, en souriant, qu’il dormait bouche fermée et sans
faire plus de bruit qu’un enfant. Mais, par la suite, il réfléchit
mieux.

— Après tout, qu’en sais-je? Moi, je ne m’entends pas,

puisque je dors. Il se peut que je ronfle. Cela arrive à des gens
très bien. -,

Ses pas l’avaient conduit jusque chez Lily.

— Lily, lui dit-il, je t’adjure de me répondre franchement.
Ne cherche pas à m’être agréable, dis-moi la vérité. Il s’agit
d’une chose importante, de l’héritage de ma tante pour tout
avouer, c’est-à-dire de notre prospérité future. Est-ce que je
ronfle ?

Lily jura que ses lèvres exhalaient à peine un léger souffle,
charmant, harmonieux, et qu’elle adorait quant à elle. Mais ce
serment ne convainquit pas Hector.

— Elle est si bonne. Peut-être qu’elle a peur de me froisser.

Un louis glissé dans la poche du tablier de Justine, la femme

de chambre de Lily, et il posa la question.

— Justine, il m’arrive de yenir ici dans la journée et de...
enfin de dormir. Un ronflement, ça franchit des portes. Est-ce

l’appel des femmes boches

— Vous avez signé l’appel à la « générosité » des femmes des pays
victorieux ?

— Ya ! Frida... J’espère qu’elles auront la générosité... de nous lais-
ser les pendules ! Dessin de M. Radiguet.
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